Au cours des cinq premiers mois de l'année 2014, le nombre des journées de travail perdues a augmenté de 36% en comparaison de la même période de 2013. Cependant que le projet de loi de finances complémentaire présente une augmentation de 13% de la masse salariale. Une pure aberration ! Faut-il craindre un scénario grec pour la Tunisie ? Est-on vraiment à l'abri d'un tel scénario catastrophe ? Contrairement à la marge de manœuvre du gouvernement tunisien, celle du gouvernement grec était réduite du fait de son appartenance à la zone euro. Elle l'était d'autant plus que le cadre défini par la troïka des créanciers de la Grèce, constituée de la BCE, du Fonds monétaire international et de l'Union européenne, pour le sauvetage de l'économie grecque était contraignant. Face au risque de faillite, le gouvernement tunisien aura, lui, toujours la possibilité de s'offrir le luxe de faire fonctionner la planche à billets sans que cela ne porte préjudice à ses créanciers. Seul aura à payer très cher la facture le Tunisien et, après coup, l'économie nationale. L'on est bien évidemment encore loin de ce scénario, mais si l'on force délibérément ainsi les traits, c'est pour mieux en appeler à la responsabilité de tous ceux qui aujourd'hui en Tunisie, considèrent encore légitime et fondé de pousser un peu plus le train des revendications sociales après que le gouvernement a consenti des majorations salariales dans le secteur public. Tout se passe comme si, et pour reprendre une expression fort inspirée de notre confrère Leaders, « les naufrageurs de la Tunisie » n'auront de répit et ne seront tout à fait repus que le jour où ils s'apercevront par eux-mêmes que les caisses de l'Etat sont vides et que même la planche à billets n'y pourra plus rien ! Le comble est qu'ils continuent à occuper du terrain et à prendre en otage l'économie nationale et l'appareil productif. Au cours des cinq premiers mois de l'année 2014, les grèves dans le secteur privé et les établissements publics à caractère commercial et industriel ont augmenté de 4% par rapport à la même période de 2013. Le nombre des journées de travail perdues a augmenté de 36% en comparaison de la même période de 2013. Les grèves ont touché 155 entreprises dont 131 entreprises privées et 24 entreprises publiques. Contre toute logique, le projet de loi de finances complémentaire 2014 présente une augmentation de 13% de la masse salariale par rapport à 2013. Passe encore cette pure aberration, mais que certaines parties expriment encore de sérieuses réserves sur ce qu'elles considèrent comme étant des mesures « douloureuses », voilà qui dépasse l'entendement. ! C'est à désespérer les plus optimistes qui, pour l'instant, excluent le risque d'un scénario grec pour la Tunisie. C'est propre aussi à renforcer chez certains observateurs la conviction que seul un grand choc psychologique pourra stopper notre fuite en avant et juguler la fièvre populiste. Pour l'instant, et non sans audace, le gouvernement s'efforce de développer toute une pédagogie pour dire la nécessité de prendre des mesures douloureuses et l'impératif d'engager au plus vite les réformes structurelles. Tout à son crédit, il entend de la sorte au moins mettre le pays sur les rails de la réforme et préparer ainsi le terrain et une plateforme d'action pour les futurs gouvernements.