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Le conjoncturel et le durable
Rap et chanson à tradition modale
Publié dans La Presse de Tunisie le 11 - 09 - 2014

Le meilleur moyen de connaître ses limites ? Le labeur (Dicton chinois)
La petite guerre de déclarations assassines à laquelle se sont livrés, cette année, le rappeur Bendirman et le chanteur compositeur «classique» Mokdad Shili et où ils ont trouvé autant d'alliés que de détracteurs, interpelle à plus d'un titre. Elle révèle surtout la lutte entre un genre émergent, en quête de reconnaissance et de propagation et une chanson aux repères bien définis qui cherche à conserver ses acquis et sa prédominance. Soit le rap, d'un côté, et la chanson à tradition modale, dite «tarabiya», de l'autre.
Incontournable, le texte
Si la musique arabe —tout comme celle tunisienne— ne manque pas de production instrumentale, sous forme de pièces, de préludes... elle demeure dans sa majorité à base de textes. Plus que le «qacid», le «dawr» ou le «mouachah», la chanson et les chansonnettes dans leurs formes sont les plus populaires, les plus répandues aussi. Elles exigent, pour leur réussite, en plus de la pertinence et de la musicalité du texte, une écriture musicale «savante», c'est-à-dire respectant les modes et les rythmes connus, novatrice autant que possible et qui, conjuguée à la sensibilité, aux dispositions vocales de l'interprète et à sa maîtrise des techniques du chant, provoque chez l'auditeur cette sensation de «tarab» (jouvence ou plaisir des sens) qui résulte de la symbiose, du moins de la complémentarité entre ses trois composantes. Certains pensent à tort que le «tarab» n'est suscité que par les textes d'amour, notamment lorsqu'ils sont à complaintes. Faux. La chanson dite tarabiya, bien que dominée par ce genre, peut être patriotique, révolutionnaire même, humoristique, liturgique ou célébrant autant le quotidien plus ou moins anodin que les valeurs universelles. Les répertoires de Sayed Derouiche, Mohamed Abdelwahab, les Rahabani ou Bouchnaq l'attestent.
La pérennité, l'acceptation et la large diffusion de la tarabiya dépendent de l'ingéniosité et du talent du trio : parolier, compositeur et interprète, ainsi que de leur capacité à lui conférer un air nouveau... un air du temps. Les noms que nous avons cités plus haut et bien d'autres l'ont compris. C'est pour cela que leur produit est encore écouté, sollicité et repris.
Turbulences
Avec les revers subis par le monde arabe, particulièrement la défaite de 1967, le soulèvement estudiantin de mai 1968 dont les ondes de choc ont été ressenties jusqu'au Moyen-Orient, la culture et les arts «classiques» dominants ont commencé à être décriés par une jeunesse arabe de plus en plus contestataire et de plus en plus rebelle, qui les jugeait complaisants, passifs et laxistes à l'égard des régimes totalitaires, sinon dictatoriaux qui étaient en place. La tarabiya venait en premier lieu.
L'apparition de paroliers et de poètes, politiquement engagés et prolifiques, bien que poursuivis et persécutés, notamment en Egypte, allait préparer le terrain à un nouveau genre de chanson appelée «engagée» ou «à texte». En effet, les écrits de Amal Doukol, Ahmed Fouad Nejm, Abderrahmane Al Abnoudi (ce dernier a continué à produire en parallèle pour la tarabiya), Samih Al Qacem, Mahmoud Darwich... ont été mis en musique par des noms comme Cheikh Imam en Egypte, Mustapha Al Kord, le Palestinien exilé en Allemagne, Ahmed Qaâbour et Marcel Khalifa au Liban, l'étudiant tunisien en France, Hédi Guella...
Bannie des réseaux de diffusion officielle, cette chanson allait faire entendre quand même ses «voix» auprès des masses ouvrières et estudiantines, surtout en Europe et par des enregistrements qu'on s'échangeait sous la table comme un produit de contrebande. L'ouverture que certains pays arabes, dont la Tunisie, lui ont concédée par intermittence dans les circuits culturels, sur les campus et dans les foyers universitaires, a permis la découverte de Mohamed Bhar, Zine Essafi, Aouled Al Manajem, l'ensemble Boumakhlouf, la troupe de recherche musicale de Gabès «Al Hamayem el bidh»...
Se prétendant un produit de «substitution», la chanson engagée, privilégiant souvent le texte au détriment de l'écriture musicale et des règles du chant, n'a pas mis en péril sa «rivale» dominante et dominatrice. Certes, la première était à peine tolérée et ne jouissait de pratiquement aucun soutien officiel, mais nous croyons que le déséquilibre criard qui l'a caractérisée a été pour beaucoup dans sa quasi disparition des attentes du public. Le «tarab» était, en effet, son élément manquant.
Ceux qui, comme Marcel Khalifa et un peu moins Cheikh Imam, ont compris cela, perdurent encore. Et comment ne pas avoir ici une pensée pour Hédi Guella qui a mis en musique et interprété «Babour zammar» et «Fi galbi jrida»? Du pur tarab... respectueux de la tradition modale, justement.
Et le rap ?
La «Chababiya», cette chanson qui, elle, ne se base que sur les rythmes, dédaignant la portée du texte, la créativité musicale et la qualité du chant, est en perte de vitesse, malgré le tapage et les gros sous consentis par les chaînes satellitaires de l'Orient. Emergeant et toujours là, des Melham Barakat, Georges Wassouf et Saber Rebaï (revenu à notre bon vieux répertoire tunisien) n'ont jamais tourné le dos au «tarab» qui n'a aucun rapport avec le rap qui, lui, est l'expression du mal-être d'une jeunesse longtemps marginalisée, cloisonnée, muselée et souvent trouvant d'énormes difficultés à survivre. L'après-14 janvier lui a permis de faire entendre sa voix, de crier son désespoir et ses espoirs, de dénoncer ceux qui la réprimaient, par des mélodies tout ce qu'il y a de plus simple.
Il n'y a aucun mal à cela. Il n'y a aucun mal non plus à ce qu'elle le fasse dans le même langage des jeunes des faubourgs et des banlieues de France et d'ailleurs : le rap. Une mode ou un genre qui a aujourd'hui son écoute, bien que se basant sur un argot de la rue, à peine enveloppé dans des notes musicales et ne nécessitant pas une formation académique ou un apprentissage autodidacte.
Et si tout ce qui se prétend tenir du «tarab» ne l'est que s'il est beau, créatif et performant, il n'est pas permis d'insulter le savoir, l'effort et l'innovation, absolument indispensables au «tarabi». Aussi, demanderait-on de ronger son frein à un animateur qui a commis la surélévation de «Houmani» (c'est son droit) en raillant «Khay khay» de Abdelwahab. Sacrilège.
On n'efface pas les maîtres par une parole. Fût-elle dite en... rap.


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