Par Abdelhamid Gmati Début poussif de la campagne électorale, émaillée de plusieurs infractions, irrégularités et dépassements de la part des candidats et des partis. On continue, du reste, à épiloguer sur les parrainages falsifiés de la présidentielle qui font l'objet d'une quinzaine de plaintes par jour auprès du ministère public. Des falsifications pour le moins farfelues : peut-on imaginer un instant que la comédienne Leïla Toubel puisse parrainer Bahri Jelassi ? Et il appert que pour les centaines de candidats aux prochaines élections présidentielle et législatives, désireux d'obtenir le maximum des suffrages auprès des 5.285.136 électeurs inscrits dont 359.530 expatriés, tous les coups sont permis. Incivilité, malveillance, insultes, accusations, diversions, tergiversations sont monnaie courante, à croire que les prétendants n'ont rien d'autre à proposer que de dénigrer leurs adversaires. Le Tunisien post-révolution prétendait à mieux, à un débat d'idées par exemple, à des propositions réalistes pour trouver des solutions aux nombreux problèmes du pays. Selon la loi électorale, la campagne est définie comme « l'ensemble des activités menées par les candidats ou les listes de candidats, leurs partisans ou les partis durant une période définie par la loi, pour faire connaître le programme électoral... De fait, depuis quelque 4 jours, les politiques et les candidats défilent dans les médias, particulièrement sur les plateaux de télé, pour nous abreuver de promesses faute de programme réaliste et bien ficelé. Des promesses à satiété. Que ce soit lors du défilé quotidien sur les chaînes Watania I et II, les candidats viennent affirmer que tous les problèmes des circonscriptions seront résolus grâce à eux, ou lors des talk shows programmés par toutes les chaînes, les prétendants ne font pas bonne figure. Il semble qu'ils ne soient pas encore familiarisés avec le petit écran et se trouvent malmenés par cette nouvelle mode du journalisme, agressif, irrévérencieux, déstabilisateur, à la limite de l'inquisition. Mal préparés, les invités n'en mènent pas large, à quelques exceptions près. Visiblement, la majorité ne sont pas au fait de leurs dossiers et ne les ont pas bien préparés. Et les promesses les plus farfelues fusent. Les uns promettent qu'une fois élus, le chômage sera rapidement résorbé. Sans nous spécifier la baguette magique qui garantira ce résultat. D'autres assurent que chaque chômeur recevra 200 DT jusqu'à ce qu'il trouve un emploi. On ne nous dit pas la source de ce financement. Un autre certifie qu'un candidat à la présidentielle, créateur d'une chaîne télé, a été l'ingénieur et l'artisan de la révolution du 14 janvier 2011. Bien entendu, chacun a toutes les solutions pour les problèmes des régions et des circonscriptions. Certaines de ces promesses sont dangereuses ; comme celle de promettre que le produit d'une région doit d'abord profiter à cette région. On oublie de dire que chaque région bénéficie de ses produits et de ceux des autres régions. Il y a là de quoi accentuer le régionalisme, voire le tribalisme, grands dangers pour l'unité nationale. Le comble, c'est ce pseudo journaliste qui s'enorgueillit de son amitié avec un chef terroriste, ennemi public, recherché depuis des mois. L'émission, souvent décriée, qui a permis cela s'est attiré les foudres de la Haica, qui l'a interdite pendant un mois. Résultat de ces premiers jours de la campagne ? Des Tunisiens, électeurs potentiels, sont déçus par leurs dirigeants, désabusés par les promesses farfelues, dépités par les partis politiques. La médiocrité des politiques, les mensonges débités, la démagogie, l'inexistence de propositions réalistes et réalisables expliquent ce début de désaffection pour le scrutin. Mais il est encore temps de décider par nous-mêmes. L'abstention, voilà l'ennemi. Car elle ne résout rien, bien au contraire : elle permet aux forces rétrogrades de nous imposer ses choix et de nous engager sur une voie détestée. Nous devons tous nous rendre compte que l'avenir, notre avenir, est entre nos mains. Et nous devons tous contribuer à le tracer selon nos choix, nos traditions, notre personnalité tunisienne.