Le printemps explose de mille joies, verdoie partout, étend sa splendeur sur ce lieu mythique à nul autre pareil. Kèn ouvre ses portes et offre ses merveilles au regard qui découvre des splendeurs, à chaque coin. Quand un printemps livre ses promesses et fait offrande de retrouvailles d'artistes, réunis grâce à un Oiseau Lunaire, surnom ô combien poétique de l'artiste Hassen Gomri qui organise un événement de taille, annonciateur d'autres fêtes, Il est à parier que tout sera beauté, convivialité et réussite. Et ce fut grandiose. L'Oiseau est là et partout à la fois, il se démène, choisit l'emplacement des œuvres, les accroche, les couve du regard pour avoir l'effet escompté et vole s'occuper d'un autre détail. Un marathon de quelques heures, tandis qu'artistes et invités profitent de la sérénité des lieux. Les rires fusent, la maîtresse des lieux, tout sourire, nous reçoit avec amabilité, nous fournit mille détails, disponible et affable. Lorsque tout fut prêt, nous découvrîmes, avec ravissement, mille tableaux, photos, nés du talent incontestable d'une pléiade d'artistes, confirmés ou inconnus, tous là pour nous livrer le meilleur. Mahmoud Chalbi promène son objectif entre ciel, terre et mer, l'imaginaire en bandoulière: le nuage prend forme animalière, la mer accueille le corps féminin avec douceur, l'entoure d'un halo de vaguelettes, le sublime. Aérienne, la jeune femme semble s'envoler dans le bleu marin, traversé des ondes que le corps lui imprime. La photo dit l'invisible, le suggéré et nous entraîne dans un monde onirique. Amira Yaakoubi dit l'intime, le froissement d'un drap, la confession des corps nus, entre jouissance et timidité. Le crayon prête son souffle au papier pour des portraits d'une rare beauté. Fatma Ben Slama révèle le caché, le dévoile, donne mille dimensions à son monde, aux corps mécanisés parfois. La démesure et le multi dimensionnel sont sa marque. Ses personnages aux multiplies facettes, se meuvent dans toutes directions. Devant ses tableaux, vous serez toujours surpris par une multitude de minuscules détails dont elle a le secret. Mohamed Ben Lamine, chimiste de talent, travaille ses photos à en donner le tournis. Un rougeoiement submerge, traversé de signes cabalistiques, fascine le regard qui fond dans les clichés sortis d'on ne sait quelle manipulation pour avoir cet effet saisissant. Imed Jemaïel nous propose Deux tableaux grand format comme deux fresques. Il maîtrise le détail et semble s'adonner à une séance de tatouage singulière. Des signes hiéroglyphiques tout menus, dessinés avec minutie et des noces de couleurs inégalées. Boutheïna Yazidi connaît les secrets de la couleur: le bleu symbolise la sensualité vous interpelle et vous envoûte. Vous vous perdez dans le tableau à suivre l'errance infinie de ces nuances si belles, si intenses. Le rouge exprime le désir incandescent et le cri extatique de la femme vous bouleverse. Une technique aboutie finit par vous fasciner. Olfa Jomaa peint le visage d'un personnage et le décompose, le déstructure. Il devient carte morcelée, un pays en perdition, déchiré, un personnage déchiré, en quête d'un pays d'accueil, réfugié sur les routes de hasard. Abdesslem Elfaleh adopte le naïf et lui confère des couleurs d'une luminosité rare, un éclat sublime, malgré la gravité des thèmes abordés. Rifeh Gharsallaoui revisite le mythe de l'éden perdu, brosse les portraits d'Adam et d'Eve, séduits par la tentation. L'un de ses tableaux attire l'attention: un arbre desséché dont les racines telles des chaînes retiennent une victime qui ne peut s'en échapper et rêve de délivrance. Selima Triaa nous plonge dans un camaïeu de bleu-vert où les signes semblent suspendus, nager dans un éther ou en mer. Un monde particulier s'ouvre et donne envie de s'y aventurer. Michel Giliberti démasque son personnage qui enlève ce second visage que le jeu social lui impose, se libère de l'hypocrisie et du paraître et trouve ainsi, cette paix intérieure tant rêvée. Wissem Ben Hassine quête une terre de rêve où l'être retrouverait amour, sécurité et joie de vivre. Est-ce chose aisée? L'important est de s'interroger. La soirée qui s'en suivit fut belle, conviviale et joyeuse. Une bande de copains, des mots, des chants et des rires et ce désir ardent de refaire le monde à la mesure de tous les rêves réunis.