La priorité sera accordée à l'examen de la situation d'une trentaine d'entreprises publiques opérant dans les secteurs du transport et de l'industrie Après la mise en place d'une commission dédiée à la réforme du système national des subventions, le gouvernement d'union nationale et l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) viennent de s'attaquer à l'épineux dossier de la restructuration des entreprises publique, qui est au cœur d'un débat à hue et à dia, depuis environ une année. Une commission bipartite ad hoc a été en effet mise sur pied fin juillet dernier. Cette commission présidée par Taoufik Rajhi, ministre-conseiller auprès du président du gouvernement chargé des grandes réformes, a tenu sa première réunion le 27 juillet dernier, en présence du secrétaire général adjoint de l'UGTT, Samir Cheffi. Durant cette première réunion, les deux parties se sont accordés sur la tenue d'un atelier de travail consacré à la présentation de la stratégie du gouvernement en matière de restructuration des entreprises publiques les 8 et 9 août, selon des sources syndicales ; L'intérêt se porte, dans un premier temps, sur la restructuration «au cas par cas» d'une trentaine d'entreprises opérant dans le secteur du transport, dont Tunisair et la Compagnie Tunisienne de Navigation (CTN), et dans le secteur de l'industrie telles que la Société tunisienne de sidérurgie El Fouladh et la Société tunisienne des industries de pneumatiques (STIP). Pertes cumulées de 6,5 milliards de dinars La restructuration des entreprises publiques est au cœur d'un bras de fer entre le gouvernement et la centrale syndicale depuis environ un an. C'est le conseiller économique chargé de la fiscalité auprès du président du gouvernement, FaycelDerbal, qui a jeté un pavé dans la mare en juillet 2017, en déclarant que la maitrise du déficit budgétaire passe par la privatisation des entreprises publiques «non vitales et non essentielles» comme les banques et la Régie nationale des tabacs et des allumettes (RNTA) ainsi que la cession des biens immobiliers et des sociétés confisquées au clan Ben Ali. Il n'en fallait pas plus pour les chantres du libéralisme économique à tout crin pour plaider pour le désengagement de l'Etat du secteur productif. L'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA) et la Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT) ont sauté sur l'occasion pour presser le gouvernement de se débarrasser du «boulet qu'il traîne depuis de longues décennies» et de ce «fardeau» qui grève les finances publiques. L'économiste MoezJoudi recommande, quant à lui, la privatisation d'une dizaine d'entreprises publiques sur les quelque 213 sociétés détenues par l'Etat, dont la Société Nationale de Distribution des Pétroles (SNDP), la RNTA et l'une des trois banques publiques (Banque de l'Habitat, Société Tunisienne de Banque, Banque Nationale Agricole). Selon lui, certaines de ces entreprises sont un véritable gouffre financier, un puits sans fond que l'Etat s'efforce maintenir à flot en puisant dans les fonds qui auraient pu servir à améliorer les services offerts au citoyen. En mars dernier, le président du gouvernement, Youssef Chahed, a également plaidé pour la cession de quelques entreprises publiques afin d'alimenter les caisses de l'Etat, révélant que les pertes accumulées des entreprises publiques ont avoisiné les 6,5 milliards de dinars en 2016. Ligne rouge de l'UGTT Dans un mémorandum de politique économique et financière adressé l'an dernier à la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie et le ministre des Finances ont écrit noir sur blanc que «la fonction d'Etat actionnaire sera revue, y compris par une identification des secteurs non stratégiques où un désengagement de l'Etat sera poursuivi». Dans le cadre de ce débat, les syndicats n'y sont pas allés de main morte. Le secrétaire général de la centrale syndicale, Noureddine Taboubi, a déclaré à maintes reprises ces derniers mois que la privatisation des entreprises publiques constitue «une ligne rouge à ne pas franchir». L'organisation ouvrière a également appelé à instaurer le dialogue entre toutes les parties prenantes pour trouver les solutions adéquates aux entreprises publiques qui sont censées, selon elle, servir de locomotive à l'économie nationale et d'exemples à suivre en matière de bonne gouvernance et d'efficience économique. L'UGTT a d'autre parte expliqué que le déficit abyssal des entreprises publiques s'explique essentiellement par des choix erronés, des politiques inadéquates, et à une mauvaise gestion héritée du passé. A noter par ailleurs que les salariés de plusieurs entreprises publiques, dont la Régie nationale des tabacs et des allumettes et la Société tunisienne de l'électricité et du gaz (STEG) ont débrayé pour exprimer leur refus catégorique de toute privatisation de leurs entreprises.