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Aguirre, cinéma novo et éblouissements
Publié dans Le Temps le 03 - 11 - 2018

Depuis plus de cinquante ans, les JCC offrent au public de découvrir un autre cinéma et aller, à travers le monde, à la rencontre des plus grands réalisateurs. Regards d'un cinéphile des années soixante-dix et éblouissements sur grand écran.
Dans la vie d'un cinéphile tunisien, les JCC sont nécessairement le lieu cardinal de toutes les découvertes. Quelles sont les images qui restent de la fréquentation assidue de ce festival? Comment toute une génération de cinéphiles a-t-elle appris un autre cinéma grâce aux JCC? La question a été posée à plusieurs cinéphiles et cinéastes par le critique Khémais Khayati qui a ensuite consigné ces témoignages dans un ouvrage paru pour célébrer les cinquante ans des Journées cinématographiques de Carthage.
Cinquante ans de pelliculture
Il fallait pour chaque cinéphile faire l'effort de retrouver ses coups de coeur et les oeuvres les plus marquantes. Me prêtant à cet exercice, j'ai tenté de rendre compte de quelques éblouissements et de la fièvre qui vous prend à chaque retour des JCC, plateforme internationale des cinémas dominés et des films d'auteurs. Comme pour remonter la généalogie de mon propre regard sur le cinéma, j'ai ainsi tenté de retrouver la trace de quelques films m'ayant durablement marqué.
Comment en effet répondre à la question de Khémais Khayati sans entrer dans les méandres du plus incroyable des labyrinthes? C'est qu'en une cinquantaine d'années, les JCC nous ont nourris de pellicule, transformés en explorateurs intrépides allant à la découverte de cinématographies du monde.
Le festival fondé par Tahar Cheriaa et ses compagnons de route est venu au moment où les idéaux, la curiosité, le débat étaient un socle commun à tous les Tunisiens qui cherchaient un élan pour la jeune république.
De fait, les JCC n'ont jamais été une île. Ponctuellement, le festival revenait pour que la fête soit totale durant quelques jours. Toutefois, la cinéphilie se portait plutôt bien et se déclinait à travers une multitude de ciné-clubs qui, du lycée au cinéma de quartier, irriguaient de leur sève le regard d'un public pleinement engagé.
Les portes d'un paradis insoupçonné
A cette époque, on lisait religieusement "Les Cahiers du Cinéma", "Ecran" et les revues tunisiennes "Nawadi" et "Goha". Vraiment, le cinéma était partout: populaire sur les boulevards, ludique dans les petites salles et intellectuel dans les maisons de la culture.
Comme tout un chacun, j'ai vécu au rythme des films d'aventure des westerns et des péplums jusqu'à la découverte sublime d'un autre cinéma. Premiers films tunisiens, oeuvres de Youssef Chahine, grands classiques ont restructuré mon regard sur le cinéma. On ne sort pas indemne d'un cycle consacré à Fritz Lang ou de la projection des pépites de Buster Keaton. Toutes ces découvertes et le patient travail des animateurs de ciné-clubs m'ont ouvert les portes d'un paradis insoupçonné dont la plus grande des messes n'était autre que les JCC.
C'est en 1974 que j'ai commencé à fréquenter le festival mais c'est la session de 1976 qui allait me marquer durablement. Cette année-là, je découvrais des cinémas inédits et un film-culte que je revois toujours avec la même fièvre.
La saison avait été riche en rencontres cinématographiques. La maison Ibn Rachiq avait ainsi organisé une semaine du jeune cinéma français avec des oeuvres de Claude Miller, Jacques Doillon ou Joel Santoni. Le même espace nous avait également gratifié de quelques oeuvres de l'Allemand Werner Herzog, notamment "L'énigme de Kaspar Hauser" et "La ballade de Bruno".
C'est dire si j'étais prêt à aller à la rencontre du lieutenant Aguirre...
Shakespearien, archétypal, légendaire
Produit en 1972, ce film est tout simplement un éblouissement. Cette histoire est celle de conquistadores partis à la recherche de l'Eldorado et qui se retrouvent à bord d'un radeau sur un fleuve impétueux, à la recherche d'un or mythique alors que les rapides et les tourbillons risquaient de les emporter à tout moment.
A leur tête, un usurpateur sublime dont le nom résonnait de tous les tonnerres du fatum... "Aguirre, la colère de Dieu", le titre du film sous-entend déjà les ressorts implacables de destins auxquels on n'échappe pas. Illuminé, hystérique et mégalomane, Aguirre allait entrainer l'expédition à sa perte. Le regard fou de Klaus Kinski, interprète du rôle-titre, me hante encore. Son rire tonitruant et son visage en sueur sur fond de rivières amazoniennes avait quelque chose de profondément shakespearien, archétypal, légendaire. Un peu comme un Sisyphe en pleine chute ou un Atlas qui ploierait sous le poids du monde...
"Aguirre, la colère de Dieu" fera de moi un fan absolu des oeuvres de Herzog. Au fil des ans, je verrai cette autre folie baroque et amazonienne qui porte le titre de "Fitzcarraldo" et met en scène dans les mêmes forêts impitoyables Klaus Kinski et notre Claudia Cardinale. Je verrai aussi "Nosferatu" ou "Cobra Verde" avant de passer à d'autres oeuvres, d'autres cinématographies, d'autres sessions des JCC...
Cette même année 1976 fut pour moi celle d'un autre éblouissement: une autre section des JCC présentait un cycle consacré au cinéma novo brésilien. Dans une esthétique proche de celle des néo-réalistes italiens, ces oeuvres brésiliennes trouveront leur chemin vers mon coeur et ma mémoire. En noir et blanc, elles racontaient la cruauté, la misère, l'aridité d'une terre toujours assoifée, la violence de classes sous le soleil des serfs insoumis.
Guerra, Raucha et Dos Santos
Comment oublier "Sécheresse" de Nelson Pereira Dos Santos ou "Les dieux et les morts" de Ruy Guerra? Comment ne pas mentionner ces coups de coeur que furent "Terre en Transe" et "Le dieu noir et le diable blond" de Glauber Rocha?
Comment ne pas songer ensuite au forum tricontinental des JCC qui nous fit découvrir le cinéma indien iranien, chinois ou argentin? Aventure sans cesse renouvelée, quête inlassable de nouvelles esthètiques, les JCC restent notre fenêtre sur les cinémas du monde.
De Sembène Ousmane aux horizons les plus lointains, de Merzak Allouache à Michel Khleifi, de Abdellatif Ben Ammar à Moufida Tlatli, les JCC sont un éblouissement, une découverte de soi et un regard sur l'altérité. Au-delà, ce festival qui aura toujours 18 ans relève à la fois du vertige et de l'émerveillement...
En un mot comme en mille, les JCC c'est durablement ébouriffant!


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