Ève et les mots, groupe de lecture tunisien riche de plus de 5000 membres, s'est donné comme objectif de diffuser et de partager l'amour de la littérature et de remettre le livre au centre de la vie quotidienne de femmes actives au sein de leurs familles ou dans leurs professions. Après le succès fulgurant du live avec Hela Ouardi, « Ève et les mots » a invité, cette semaine l'écrivain algérien Yasmina Khadra pour une rencontre inédite, via une plateforme de visio-conférences, entre l'écrivain de renommée internationale et quelques membres du groupe. La rencontre s'est déroulée pendant environ une heure et demi dans une ambiance conviviale. L'auteur s'est prêté au jeu des questions réponses avec un naturel et une modestie désarmants. Yasmina Kadhra ou Mohamed Moulessehoul (de son vrai nom) un écrivain algérien très en vue au cours de ces vingt dernières années. Il a touché plusieurs millions de lecteurs dans le monde. Adaptés au cinéma, au théâtre, en bande dessinée et en chorégraphie, ses romans sont traduits dans 48 langues et édités dans 56 pays. En 2013, il a fait son entrée dans le dictionnaire (Le Petit Robert des noms propres). Pour son pseudonyme Yasmina Khadra, Mohammed Moulessehoul explique: « Mon épouse m'a soutenu et m'a permis de surmonter toutes les épreuves de la vie. Je porte ses prénoms et c'est ma manière à moi de lui montrer ma reconnaissance et de lui rester redevable. Sans elle, j'aurais abandonné. » Yasmina Khadra à travers cette rencontre digitale a parlé de son enfance confisquée, de l'amour, de la position de la femme tunisienne et la femme à travers ses œuvres, … Mon œuvre est une invitation à la réflexion Un auteur polyvalent, ses écrits sont une invitation à la réflexion. Il dit à ce propos « Quand j'écris je compte sur la lucidité du lecteur, mes livre sont une invitation à la réflexion pour décoder les messages… » Il ajoute « Dans mon texte j'interroge mon époque, le monde dans lequel j'évolue. A travers mes propres textes j'accède à mes propres questions … par exemple à travers mon texte j'ai compris la situation de la femme en Afghanistan, j'ai perçu nettement les frustrations de cette femme qui a été chosifiée, disqualifiée … En fait je suis quelqu'un de solitaire, mes personnages sont mes seuls compagnons … Quand le monde se réduit à l'ennui j'essaie de l'élargir à travers mon propre imaginaire et je me surprend à vivre une histoire qui n'est pas la mienne mais qui finit par m'appartenir et c'est ce qui peut faire la magie d'un écrivain.» La femme et L'Amour chez Yasmina Khadra Concernant l'Amour dans l'œuvre de Khadra, il réclame que l'amour existe et qu'il faut y croire pour le mériter. L'amour qu'il considère comme « un accueil permanent de bonheur » n'est pas selon lui une utopie ou un rêve, mais plutôt un projet technique, raison pour laquelle il essaie d'éveiller les gens sur cette « nécessité » de croire en l'amour et de l'inventer. Quant à la femme et sa position dans ses écrits , il avance « même si la femme n'est pas présente dans mes textes, mais on la sent parce qu'elle « est l'essence de toute chose dans le monde , elle peut inventer des choses, et qu'elle n'est pas appréciée à sa juste valeur que se soit en Occident ou en Orient. » Le paysage sociopolitique en Tunisie Pour le paysage sociopolitique en Tunisie il considère que le monde arabe est en danger, « seul le peuple tunisien va s'en sortir » parce qu'il pense que c'est un peuple conscient et lucide. « La femme tunisienne a une très bonne image dans le monde entier » dit-il.. Il considère en ce sens que la liberté de la femme et sa position sociale renforce la société. Son enfance Yasmina Khadra a aussi parlé de son enfance, il fait remarquer à ce propos « J'écris pour récupérer mon enfance qui a été confisquée. » Il explique qu'il a beaucoup souffert dans son enfance, il n'a pas eu le sentiment d'être protégé par sa famille. Il s'est retrouvé enfermé dans une caserne militaire où il devait se comporter comme un adulte sinon il serait puni ou emprisonné. C'était terrible pour lui… Yasmina Khadra considère que ces épreuves ont forgé sa personne. Les auteurs qui l'ont marqué Au cours de cette rencontre Yasmina Khadra a parlé de ses auteurs préférés. « Lire c'est découvrir, et je suis comme une abeille qui fait son propre miel, en butinant dans tous les jardins du monde », fait-il remarquer en ajoutant « J'aime la littérature et les beaux romans, sans considération de nationalité. Il n'y a que le talent qui compte. J'ai beaucoup aimé la littérature russe, les œuvres de Nejib Mahfoudh, Taha Hussein et tous les écrivains algériens sans exception… Sans oublier le grand poète tunisien du 20 ème siècle Abou El Kacem Ecchebbi…» On apprend que Yasmina Khadra travaille sur un nouveau projet, un roman policier américain de science fiction…