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«L'Etat c'est moi !»
Publié dans Le Temps le 01 - 10 - 2020

Persévérant dans son attitude consistant à évoquer ses contradicteurs et tous ceux qui veulent porter atteinte à l'Etat de droit, en procédant par insinuation, le président de la République a-t-il, en débattant sur la peine de mort et son exécution, dépassé les prérogatives qui lui sont dévolues par la Constitution ? Bien plus et selon certains observateurs, il a empiété sur le pouvoir judiciaire en faisant part de sa position concernant une affaire encore pendante devant la justice.
Les grands débats sur la peine de mort ne datent pas d'aujourd'hui, seulement, elle a été instrumentalisée, au fil de l'histoire et des régimes politiques, par les gouvernants qui y ont pris un prétexte soit pour exercer leur dictature et leur tyrannie, soit pour influencer les gouvernés et les impressionner d'une manière ou d'une autre selon la conjoncture sociale et politique du moment. Mais quoi qu'il en soit, c'est dans les régimes dictatoriaux que les gouvernants tiennent les commandes de la peine de mort, en envoyant directement à la potence même des innocents, ou en exerçant leur ascendant sur les juges. C'est la raison pour laquelle, a été conçue, dans les régimes démocratiques, la séparation des pouvoirs en vue de favoriser l'indépendance des magistrats, qui font partie désormais d'un pouvoir à part, mais qui agit de concert avec les autres pouvoirs, sans abus et sans que l'un d'eux empiète sur les prérogatives de l'autre et ce, conformément à la loi suprême qu'est la Constitution.
L'indépendance du juge baromètre de libertés
Dans les régimes dictatoriaux, les gouvernants décidaient seuls de la peine de mort et faisaient même exécuter le condamné sur la place publique. Les sultans dans les contes des mille et une nuits ordonnaient à leur bourreau de trancher la tête à celui qu'ils condamnaient sans appel et sans lui donner l'occasion de se défendre.
Au fil du temps, dans les régimes qui étaient soi-disant démocratiques, l'intervention des gouvernants se faisaient indirectement, avec même des pressions sur les juges appelés à examiner les affaires, notamment dans les procès politiques.
En Tunisie, durant l'ancien régime, il y avait une influence directe par le président de la République, sur les magistrats, dont certains profitaient pour commettre des malversations en contrepartie, sur lesquelles on fermait les yeux. Les magistrats intègres constituaient la majorité fort heureusement, et certains d'entre eux ont payé cher leur honnêteté à l'instar du juge feu Mokhtar Yahyaoui, qui a été révoqué et a subi les pires des exactions.
Dès 2011, l'indépendance de la magistrature a été parmi les premières préoccupations des défenseurs des droits humains, pour être consacrée par la Constitution de 2014. Toutefois elle a été affectée, surtout depuis que les juges ont été impliqués dans divers tiraillements politiques. Si bien qu'à un moment donné les juges eux-mêmes ont tiré la sonnette d'alarme à ce sujet, se sentant à nouveau dans le collimateur de beaucoup de contradicteurs, dont notamment ceux qui essaient d'occulter la vérité sur les abus de tout genre en se retranchant derrière des prétextes fallacieux, tels que l'immunité qui, jusqu'à présent, n'a jamais été levée pour aucun député, même si sa culpabilité est établie par des preuves tangibles et irréfragables.
Un président décontenancé
C'est dans cette conjoncture, d'une justice devenant de plus en plus vulnérable, avec des divergences de points de vue entre ses différents organes sur l'indépendance du juge, que le président de la République intervient, une fois de plus pour créer davantage d'animosités, en adressant des critiques acerbes au pouvoir judiciaire à travers les juges qui ne sont pas assez diligents, dit-il, dans les affaires importantes telles que les affaires de corruption. En effet, son intervention, lors de sa réunion avec le conseil supérieur de la sécurité nationale, et au cours de laquelle il a évoqué, l'exécution de la peine de mort, appelle à réfléchir, au-delà du débat sur la peine de mort et de son exécution, sur l'opportunité d'une telle intervention. Pourtant, l'enquête sur l'affaire du meurtre, commis par un individu sur la personne d'une jeune fille, est à peine ouverte, et le juge d'instruction n'a même pas encore été saisi du dossier, l'affaire étant encore à l'étape de l'enquête préliminaire. C'est justement, suite à la marche organisée par la famille de la victime, jusqu'au palais présidentiel à Carthage, que Kaïs Saïed a jugé opportun de s'adresser au public, pour faire part de sa position, sur l'exécution de la peine de mort en spécifiant au passage que le mis-en-cause est un récidiviste, et qu'il mérite la peine de mort si l'accusation à son encontre est prouvée. Il n'a pas manqué toutefois de faire observer que l'accusé a droit à un procès équitable, avec toutes les garanties de défense.
Certes, le président de la République a le droit de gracier un condamné à mort, ou de refuser de le faire. Il a aussi le droit de donner son avis sur la peine de mort, et de son exécution. Cependant, il n'a pas à intervenir à l'occasion d'une affaire en cours, afin de ne pas exercer d'influence sur les juges chargés de l'examiner. C'est une atteinte flagrante à l'indépendance de la justice et par là-même à la Constitution.
Son intervention a rappelé celle de l'un de ses prédécesseurs, à savoir le président Bourguiba, à l'aube de l'indépendance, par des séances radiophoniques au cours desquelles il faisait passer des interrogatoires à des personnes, impliquées dans des délits de gravités différentes, pour les sermonner et les admonester publiquement et ce, avant leur comparution devant le tribunal.
Prérogatives limités
par la Constitution
C'est ce qu'a fait Kaïs Saïed, toute proportion gardée, dans sa dernière intervention au cours de sa réunion avec le conseil supérieur de la Sécurité.
Il peut donner son avis sur la peine de mort, et son exécution, en tant que juriste, ou en tant qu'enseignant de droit, au cours d'une conférence à l'amphi, mais pas en tant que président de la République, qui est par là-même président de tous les tunisiens, y compris les délinquants parmi eux. Il est tenu d'être discret également concernant le droit de grâce, qui lui est conféré par la Constitution. A défaut, aucune demande de grâce ne lui sera plus jamais présentée, dans des affaires similaires où on connait sa position à l'avance.
En donnant son avis sur le meurtrier, il a empiété sur le domaine réservé à la justice, qui consiste à prononcer la condamnation adéquate, au vu des pièces du dossier et des tenants et des aboutissants de l'affaire, d'une part, et en vertu de la seule intime conviction du juge. Celle-ci ne doit être impressionnée, ni par l'avis préalable du président de la République, ni par celui de l'opinion publique parmi laquelle, les proches de la victime qui ont organisé une marche pour demander à ce dernier l'exécution de la peine de mort.
Kaïs Saïed, en l'occurrence, n'a pas parlé en son nom personnel, mais en principe au nom de l'Etat. Dès lors, il était censé agir conformément à la constitution, et il n'avait pas de ce fait à empiéter sur le domaine du pouvoir judiciaire, que ce soit en ce qui concerne la peine de mort ou de son exécution. Celle-ci vient à l'issue d'un procès équitable au cours duquel l'accusé doit bénéficier de toutes les garanties de défense, afin qu'il soit jugé sur la base de preuves tangibles établissant sa culpabilité.
Le président de la République devait certes intervenir, en réponse à la famille de la victime après la marche qu'elle a organisée, surtout pour la rassurer que les juges accompliront leurs devoir, afin que justice soit faite. Il devait également inciter toutes les institutions de l'Etat à déployer davantage de moyens afin de lutter contre la corruption, la contrebande sous toutes ses formes et le terrorisme, en vue d'instaurer la sécurité et la paix publique, afin que nous ayons de moins en moins l'occasion de parler de la peine de mort et de son exécution.


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