Tunisie Telecom remporte le prix Brands pour la publicité ramadanesque la plus engagée    Tunisie – Arrestation d'un individu pour appartenance à une organisation terroriste    Adhésion de la Palestine à l'ONU: La Tunisie regrette l'échec du projet de résolution porté par l'Algérie    Dopage : le ministère des Sports évoque des rumeurs tout en confirmant les sanctions    Tunisie – METEO : Températures comprises entre 14 et 20°    Tunisie – Signature demain d'un accord entre le syndicat de l'enseignement de bas et le ministère de tutelle    Aux origines de la fête du Travail    Noureddine Taboubi s'attache à l'organisation d'un dialogue national [Vidéo]    Dopage : la Tunisie sanctionnée pour non-conformité au Code mondial    Tunisie: Elaboration d'une stratégie nationale pour faire face au stress hydrique [Déclaration]    La Turquie rejoint l'Afrique du Sud dans une action en justice contre Israël pour génocide    Accès gratuit: Profitez du beau temps, emmenez vos enfants aux musées    Première expulsion d'un demandeur d'asile du Royaume-Uni vers le Rwanda    Taboubi : l'UGTT représente une force que nul ne peut ignorer !    Djebel Jelloud : un élève placé en garde à vue après avoir agressé son enseignant    Le Tunisien ne travaille que huit minutes par jour ? Le vrai du faux    Mineurs et criminalité : Coupables ou victimes ?    20e édition du Pamed, jusqu'au 3 mai à Yasmine Hammamet : La production animale entre projets et défis    DECES : Dr Lamine MEZIOU    Sanctions confirmées par l'Agence mondiale antidopage contre la Tunisie    CONDOLEANCES DE LA CCITF    Pourquoi : Ni vu, ni connu !    Vie associative | Génération mécénat    INM: Les quantités de pluies enregistrées en millimètres durant les dernières 24H    Tunisie – Electricité: Des projets de 500 mégawatts à partir des énergies renouvelables avant fin juin 2024    «La journée des Talents» à l'Institut Supérieur des Langues de Tunis (Islt) : Graines de talents    Célébration du «Jazz Day» au Goethe Institut, le 2 mai 2024 : Sous le signe de la virtuosité    Rencontre avec Selma Baccar : «Le cinéma d'auteur est un cinéma d'engagement»    CONDOLEANCES : Noureddine KETARI    USA – Pris d'assaut de campus Columbia : Arrestations massives lors d'une manifestation pro-Gaza    Quelle est l'origine du 1er-Mai, journée de lutte pour les droits des travailleurs ?    En légère hausse, le TMM s'établit à 7,96%, en avril 2024    Sonia Sahli nouvelle Déléguée Générale au Conseil Bancaire et Financier    Elections de la FTF : rejet des listes de Ben Tekaya et Tlemçani    1er mai: Ce mercredi, accès gratuit aux musées    Bayern Munich - Real Madrid : Sur quelle chaîne voir le match de la Ligue des champions ?    La ministre de l'équipement exhorte à l'amélioration urgente du port de Radès    Les Totally Spies sont de retour après 11 ans d'absence : Date et chaîne de diffusion    Malmö Arab Film Festival 2024 : Des artistes et réalisateurs tunisiens se distinguent (palmarès)    En solidarité avec Gaza : Les étudiants tunisiens descendent dans la rue    Attaque armée dans un restaurant célèbre à Istanbul    City Cars augmente ses revenus de 29,1% au premier trimestre 2024    WTA 1000 de Madrid : Ons Jabeur va en quarts    Journées Romaines de Thysdrus : retour en vidéos sur la manifestation qui a animé la ville d'El Jem    Les étudiants tunisiens manifestent pour une Palestine libre et indépendante    Expatriés | Rafia à la relance    POINT DE VUE | La tête sur les épaules !    Conférence de la ligue des parlementaires : Le soutien de la Tunisie au peuple palestinien est indéfectible    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mariages au « mixeur »
Mœurs sociales
Publié dans Le Temps le 03 - 06 - 2010

L'été est une saison propice aux rencontres pour bon nombre de jeunes tunisiens, une opportunité pour faire connaissance avec des femmes étrangères, essentiellement des touristes. Souvent ces rencontres s'achèvent par un mariage que l'on a pris l'habitude d'appeler « mixte », et que l'on pourrait qualifier d'hybride ou de métissé… Ce type d'unions peut durer toute une vie ou se briser sur les rochers des traditions, de la religion, de l'éducation des enfants.
Nous avons voulu ici faire le point sur ces rencontres improbables entre deux modes de pensées, deux univers étrangers l'un à l'autre…
Historiquement, il y a eu plusieurs vagues de mariages mixtes, avec tout d'abord ces étudiants qui sont partis dans les années 50 et 60 et qui ont ramené avec eux des épouses rencontrées sur place et qui les ont souvent aidés matériellement pour survivre dans des pays où la vie est chère et leurs moyens limités.
Puis il y a eu la génération de doux rêveurs directement influencée par la révolution idéologique de Mai 68. Leurs unions étaient basées sur une ouverture sur l'autre, sur un sentiment de citoyens du monde. Les crises qui ont depuis secoué le monde occidental ont vite fait de briser leurs rêves et leurs unions.
Le mythe du Bezness
Il y a enfin la troisième et dernière vague de mariages mixtes uniquement fondés sur l'intérêt mutuel : des jeunes tunisiens qui veulent avoir des papiers en règle dans des pays d'Europe et des étrangères, souvent âgées, qui sont intéressées par une relation stable, afin de vivre pleinement leurs dernières années… Des unions qui finissent mal trop souvent, car aucun sentiment réel ne lie les deux parties. Le film « Bezness » de Nouri Bouzid a d'ailleurs très bien analysé ce phénomène…
Le mot clé de toute union mixte, c'est la tolérance. Or aujourd'hui ce sentiment ne fait plus recette. Un sociologue résume la situation en ces termes : « déjà que la vie de couple n'est pas facile lorsqu'on appartient à une culture commune, que dire alors quand c'est avec une femme ou un homme d'une autre culture, d'une autre religion... Le mot tolérance laisse alors la place au rejet de l'autre et de sa civilisation. »
Une dame française de 42 ans, mariée avec un tunisien depuis près de vingt ans et ayant deux enfants confirme : « changer son style de vie, se fondre dans la culture de son conjoint, lui faire des couscous au Qadid, ne plus fêter Noël, devenir ce que on n'est pas : voilà ce que je ne pouvais plus accepter au bout de vingt ans de vie commune. » Elle est en instance de divorce et elle va rentrer chez elle avec un goût d'échec assez amer…
Elle a connu le père de ses enfants lors de vacances en Tunisie : « ce fut un coup de foudre et j'étais prête à tout pour rester avec lui. Mais avec le temps, de nombreux nuages sont venus assombrir notre vie. Sa famille ne m'a jamais acceptée, son caractère a changé, il me considérait comme sa bonne et non sa femme, nous avons eu des difficultés à trouver les prénoms à donner à nos deux enfants, puis il s'est enfermé dans une vision très stricte de ses traditions. J'ai tout donné, mais jusqu'à quand ? Je ressentais trop d'oppression, ce qui a abouti à un désir de séparation inéluctable… »
Des couples heureux
Ce qu'elle ne nous a pas dit, c'est ce que vont devenir ses enfants après son divorce. Resteront-ils auprès d'un père qui est très dur avec eux selon ses dires ou rejoindront-ils leur mère avec les difficultés matérielles qui se profilent déjà ? Aux dernières nouvelles, c'est sur ce sujet que la séparation achoppe depuis plusieurs mois…
Mais de couples mixtes heureux nous en avons rencontré aussi, elle enseignante, lui technicien, vivant en Tunisie sans trop de problèmes depuis plus de vingt trois ans. Le mari commence : « on a discuté tous les détails avant de nous engager et nous avons trouvé des solutions satisfaisantes pour nous et pour nos familles. Même pour les enfants, on s'est mis d'accord sur les détails avant de les concevoir : prénoms, éducation, religion… »
Sa femme précise « je suis moi-même née d'un mariage mixte franco-russe et je connaissais quelques aspects du problème à l'avance. Il faut apprendre à faire des compromis, à ne pas rester figé sur ses positions, mais aussi éviter de se sacrifier, de se fondre dans la culture de l'autre sans discernement. »
Leur fille unique a tout de même quelques problèmes avec ses camarades de classe au lycée : « on ne s'entend pas car ils sont partagés entre le respect des traditions et leur désir d'ouverture sur le monde... Quand ils s'aperçoivent que je suis de couple mixte, ils me prennent pour une fille facile, ce qui démontre que leur mentalité est assez rétrograde… »
Quant aux couples fondés sur l'intérêt mutuel, on en a rencontré deux seulement, car ils vivent le plus souvent en Europe et ne rentrent que rarement en Tunisie et ils ne sont pas très bavards de toutes façons. Avec eux, les choses semblent claires : de la compagnie et un peu de tendresse contre une carte de séjour qui permet à ces jeunes désespérés de se faire une petite place dans la vie et de ne pas être montrés du doigt par la société. Mais ils subissent tout de même la médisance et la méchanceté de leur environnement à travers des remarques désobligeantes. En général les femmes réagissent en ignorant ces remarques, tandis que les hommes baissent la tête et font semblant de ne rien voir. On nous rapporte une blague sur ce type de couples…
Un jeune tunisien de 28 ans, marié à une dame française de plus de cinquante ans retourne au pays pour les vacances d'été. Passant devant un café, la dame trébuche et tombe à terre. L'un des hommes attablés voit la scène et s'adresse au jeune homme en ces termes : « ramasse ta carte de séjour, elle vient de tomber… » Une méchanceté gratuite qui en dit long sur les mentalités de certains et leur refus d'accepter la différence.
En fait, c'est de plus en plus la religion qui cause des problèmes chez bon nombre de couples mixtes. Un homme de trente huit ans explique : « j'ai exigé que ma femme se convertisse à l'Islam avant même de la toucher. Je suis avec elle depuis dix ans et je n'ai pas à me plaindre. On passe le Ramadan en Tunisie et elle jeûne normalement. Pour les enfants, nous avons choisi des prénoms mais communs aux deux langues : Nadia et Sami. »
Quant à savoir pourquoi il n'a pas choisi une tunisienne pour se marier, il affirme : « la tunisienne est trop matérialiste, elle calcule trop, ne cherchant qu'à pomper le fric de son homme. Alors épouser une tunisienne, non merci. J'en ai assez bavé avec elles… »
Au cours de cette enquête, nous avons rencontré des sentiments les plus contradictoires : l'amour et la haine, la tolérance et la xénophobie, l'acceptation et le rejet. Les victimes ce sont les enfants, déchirés entre deux parents, entre deux pays, entre deux visions du monde...


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.