Préavis de grève des femmes de ménage, le 15 juin. Le secteur emploie 32 mille femmes de ménage, dont 80 % dans les établissements publics, et 38 mille agents de sécurité. Harcèlement sexuel et tentative de viol, absence de couverture sociale, des salaires dérisoires (la moitié du SMIG), absence de contrôle par les inspecteurs de travail, conditions de travail difficiles… il s'agit bel et bien des conditions de travail dans lesquelles exercent 32 mille femmes de ménage en Tunisie dont 80 % dans les établissements publics (ministère, hôpitaux, Caisses de sécurité sociale... « Cela est dû à la non application du cahier des charges régissant le secteur, le vide législatif et l'exploitation des entreprises de sous-traitance à cette force ouvrière et l'absence d'inspection… », c'est ce qui a été annoncé hier par M. Mongi Abderrahim, Secrétaire Général de la Fédération Générale des Professions et Service au sein de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) lors d'une conférence de presse qu'il a donnée au siège de l'union à la place Mohamed Ali. Organisée à l'occasion de la journée mondiale du soutien aux femmes de ménage et aux agents de sécurité, célébrée depuis quatre ans, la conférence été une occasion pour clamer haut et fort les conditions de travail et dénoncer ce qu'endure cette frange de la société et surtout parler des abus dont elles font l'objet. Le Secrétaire Général parle « d'esclavagisme au vrai sens du terme » et d'exploitation. « Et je suis étonné du fait que cette classe sociale exerce sans couverture sociale, ni droit à la retraite », déclare-t-il. Pour mieux attirer l'attention des responsables et à l'occasion de ce rendez-vous annuel, les femmes de ménages observeront une grève générale le 15. Elles comptent revendiquer par ce geste leurs droits les plus élémentaires. Car malheureusement elles ne peuvent pas se faire soigner en cas d'accident de travail ou faire valoir leurs droits à une pension de retraite. « Il faut qu'on arrête ce genre d'exploitation imposée par des « gangs » : les sociétés de sous-traitance non déclarées, mal structurées et qui accumulent les profits financiers au détriment de ces femmes », appelle le Secrétaire Général. Nous avons d'ailleurs, réclamé les droits de cette frange de travailleurs à plusieurs reprises et ce, en adressant des correspondances au ministère des Affaires Sociales, de la Solidarité et des Tunisiens à l'Etranger », précise M. Abderrahim. Et d'ajouter : « Nous avons adressé un préavis aux différents intervenants pour les informer de la grève générale qui aura lieu le 15 juin et pour attirer l'attention sur les conditions de travail rudimentaires et surtout la privation de couverture sociale ». A préciser dans ce contexte que les femmes de ménages ne bénéficient pas de pension de retraite car leur salaire est 2/3 moins le SMIG. « D'où l'importance à amender la loi pour garantir les droits de cette classe sociale », rétorque le Secrétaire général. L'administration fait encore la sourde oreille. « Elle ne nous a pas encore répondu pour négocier le sujet et fixer les solutions requises », déclare-t-il. « Face à cette situation et si le Secrétaire Général de l'UGTT n'interviendra pas auprès du Premier ministère, je compte décréter une grève de la faim », déclare M. Abderrahim. « C'est un moyen pour mieux attirer l'attention sur l'état des lieux et surtout l'exploitation de ces femmes », enchaîne le secrétaire général. Exploitation de toutes les formes, harcèlement sexuel, absence de couverture sociale, licenciement abusif…c'est le pain quotidien des 32 mille femmes de ménage en Tunisie. Le secteur n'a pas l'air de réaliser une mutation à cause du vide juridique, des lacunes enregistrées dans le cahier des charges et surtout de l'absence de contrôle de la part de la direction d'inspection du travail. D'ailleurs le secrétaire général a cité plusieurs exemples de dépassement. Et les agents de sécurité ? Si ce secteur tarde encore à se développer, celui de gardiennage a en revanche enregistré un saut qualitatif depuis 1993. Employant 38 mille agents de sécurité, le secteur se structure d'une année à l'autre. « Il a été organisé depuis l'instauration d'une convention collective pour le secteur », explique M. Abderrahim. « Les salaires bruts ont augmenté de 89 dinars pendant les années 80 à 365 dinars actuellement. Les heures de travail ont quant à elles diminué de 72 heures durant la même période à 60 heures actuellement », toujours d'après la même source. D'ailleurs, « la sous-traitance sera évoquée pour la première fois lors des prochaines négociations sociales et c'est un acquis », explique le secrétaire général. Recourir à la grève de la faim et à la grève générale reste pour les syndicalistes la solution extrême. Car jusqu'à présent, les autorités concernées n'ont pas manifesté une volonté à discuter pour améliorer les conditions de travail de cette frange de la société.