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La beauté de l'intérieur…
Centenaire de Jean Genet
Publié dans Le Temps le 20 - 11 - 2010

« Car il suffit qu'un parfum de roses s'égare dans une maison d'arrêt, pour que hurlent au cœur du prisonnier, toutes les injustices du monde… » Celui qui avait déclaré un jour qu'il avait écrit des livres, pour sortir de prison ; comme manière de signifier à sa façon, volontiers insolente, que l'enfermement ayant été la condition inhérente à l'écriture, une fois dehors - ce serait une affaire entendue-, il n'aurait désormais eu, plus rien à dire, n'en continue pas moins de susciter, passions et questionnements, émerveillements aussi, de par ses écrits, qui respirent le soufre et la tendresse, la violence et la douceur, la révolte comme le cœur de sa peur perpétuelle du vide, qui n'aura eu de cesse d'habiter sa colère, contre l'injustice qui divisait l'univers à ses yeux, en deux parties : les vainqueurs et les vaincus.
Quitte à accepter d'être toujours du côté des vaincus, pourvu qu'ils incarnent la figure du refus et de la transgression, les marginaux en somme, comme lui-même, acculés à l'être d'abord, à leur corps défendant, et finissant par s'en emparer comme d'un trophée nécessaire, à la survie, dans un monde où de toute façon on ne voulait pas d'eux, autant s'en faire l'ardent défenseur, désespérant et désespéré, à contre-courant toujours et mêlant allègrement, le politique et le sensuel, la rage qui vous mange les entrailles, de devoir en découdre, en même temps qu'un sentiment d'extrême solitude, qui ne dit pas son nom.
Né un certain 19 décembre 1910 à Paris, et décédé le 15 avril 1986, Jean Genet dont on va célébrer bientôt le centenaire de sa naissance, n'aura jamais autant fait parler de lui, de son œuvre étroitement chevillée à son existence, dont certains aspects, jugés choquants et équivoques à son époque, ne posent plus problème qu'à ceux qui préfèrent l'enfermer encore une fois, sous l'étiquette d'un « voyou » qu'il revendiquait par ailleurs, du reste, par coquetterie peut-être et sûrement par révolte, plutôt que de se laisser prendre par la beauté sauvage de ses mots, furent-ils assassins, auront encore une fois perdu au change. Car Genet demeure contemporain, et s'avère visionnaire autant que poète.
Plus rien à dire Jean Genet ? Celui que Sartre avait affublé d'une auréole qu'il devait juger pesante et incongrue, dans « Saint Genet, comédien et martyr », aurait eu beaucoup à dire sur le monde aujourd'hui. Il ne se posait certes pas en prophète, se défendait de tout engagement politique de quelque ordre qu'il soit, mais s'engageait tout de même, intransigeant et sans appel, devant toutes les causes qu'il jugeait justes. Quitte à laisser planer une certaine ambiguïté sur ses véritables intentions. Quitte à en jouer, il serait du côté des « Black -Panthers », des Palestiniens, des opprimés et des laissés -pour-compte, comme lui ; des immigrés, des ex-colonisés contre les ex-colonisateurs, bref, de tout ce qui représentait pour lui un certain ordre qu'il abhorrait, préférant somme toute un désordre certain, qui lui permettait de reconfigurer la figure d'un puzzle où il y aurait toujours une place manquante : celle d'un père qu'il n'a pas connu (aujourd'hui on sait que ce fut un certain Fréderic Blanc), et celle d'une mère qui le mit au monde au 22 rue d'Assas, avant de lui infliger sa première claque au visage. Il en aura d'autres.
Sa vie se décline au gré de ses livres. Cahin-caha. Et il aura beau chercher à noyer le poisson, parce qu'il était perdu lui-même, en éclats lumineux et en coins d'ombres, il aura semé, subrepticement, ses cailloux de « Petit Poucet », d'une œuvre à l'autre. Et ce n'est pas par hasard que ses pièces de théâtre, continuent d'être les plus jouées, et pas seulement en France, parce qu'elles disent quelque chose. Quelque chose d'essentiel. Exprimé férocement, avec force ou fureur, avec douceur ou pudeur, sans concession, sans rémission, touche au plus profond de l'âme humaine. D'un versant l'autre, c'est selon.
« Notre dame des fleurs», « Pompes funèbres», «Les bonnes », « Les nègres », « Querelle de Brest», « Les paravents », ou encore « Un captif amoureux » paru à titre posthume, « La galère », « Le condamné à mort », « Le funambule » ou « Un chant d'amour », sont comme les facettes irisées d'un prisme, lequel, s'il déforme l'image, ne l'en réfléchit pas moins, réfractaire et rétif à tout embrigadement, et peu importe ce qu'il en coûtera.
Et l'on aura beau dire, Jean Genet « menteur sublime » selon la formule de Ben Jelloun, était peut-être cynique, mais savait être fidèle à lui-même. Fidèle à son enfance aussi. Ce n'est pas un hasard si lui, l'enfant abandonné par sa mère, né de père inconnu, et ayant connu les maisons de redressement et l'errance, n'hésita pas à voler au secours d'un parfait inconnu, perdu au fond de sa cellule, parce qu'il avait sa semblance, qu'il était seul comme lui-même, qu'il avait eu un destin similaire, et qu'il lui avait écrit. La détresse de Truffaut l'avait émue, et cela suffisait.
Et puis, pourquoi oublier qu'on lui doit aussi ces mots : « Ecrire, c'est lever toutes les censures » ?


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