* Lilia Laâbidi demande «pardon aux femmes tunisiennes» Le Centre de recherches, d'études, de documentation et d'information sur la femme veut-il se faire une seconde virginité ? Le CREDIF qui a longtemps consacré la politique de l'ancien régime quant aux recherches faites sur la femme a-t-il fait son mea culpa pour pouvoir aller de l'avant et surfer sur la vague de la révolution ? Peut-on aujourd'hui, se fier aux études qui ont été faites par cette institution ? Des questions qui nous brûlent les lèvres, il faut dire, et qu'on a tenu à poser aux personnes concernées lors de cette première rencontre médiatique organisée au siège du CREDIF suite aux évènements du 14 janvier. Les questions ont fusé de tous bords. Les unes ont remis en cause la crédibilité des recherches faites par cette institution, les autres ont évoqué la pertinence de cette thématique abordée lors de cet atelier de réflexion, à savoir « Femmes journalistes et processus de transition » qui a tenté un tant soit peu de « débattre des différentes formes d'implication et de participation de la femme journaliste dans le déclenchement de la révolution et le processus de transition ainsi que ses perspectives. » « Quoi qu'on fasse ce n'est jamais assez pour la femme. » commente-t-on dans la salle « Mais pour pouvoir avancer il faut en finir avec le féminisme qui devient anachronique avec notre époque. Il faut qu'une ‘'image dégage'' et qu'une autre reprenne sa place. » a-t-on dit au début de cette rencontre. Débat pluriel Le débat qui en a découlé était un espace d'échange et de confrontations d'idées. Des expériences de femmes dans l'exercice de leur métier y ont été relatées. A commencer par Fawzia Mezzi journaliste et sociologue qui a évoqué son expérience et celle de ses consœurs du journal « La Presse » où certaines femmes ont dû passer carrément 40 heures dans l'établissement de presse lors des évènements du 14 janvier. Elles étaient sur le terrain pour tenter, un tant soit peu, de soigner l'image de leur établissement qui a toujours été victime de son image pro-gouvernementale… L'image du CREDIF aussi. Les intervenants étaient tous unanimes, en effet, pour demander à repenser cette institution en anticipant sur certaines questions comme le rôle de son conseil scientifique et celui du comité de rédaction du magazine du CREDIF, etc. Dans la foulée Fatiha Saïdi, a élucidé quelques points ayant pesé lourd sur son esprit de sociologue, exerçant depuis cinq ans au sein du CREDIF. « Notre institution doit se positionner par rapport à ce qui se passe autour de nous. Il faut revoir la place de la femme en faisant fi des données quantitatives et en privilégiant les données qualitatives. Qu'importe le fait d'annoncer que la femme est représentée à 20% au Parlement… L'essentiel est de refléter l'image de la femme dans les domaines à étudier.» a-t-elle remarqué. Faten Aouadi, qui porte la casquette d'une journaliste et celle d'une responsable au CREDIF a précisé que cette rencontre et les tables rondes qui seront prochainement organisées œuvreront dans le but de donner une autre image du CREDIF loin des clichés qui lui collent à la peau depuis deux décennies. « Je suis d'accord qu'il y a des dérives à corriger et des insuffisances à combler au sein du CREDIF. Nous ne sommes pas exempts d'erreurs à l'échelle de ce qui s'est passé dans le pays. Cela n'empêche : on ne peut remettre en question la totalité du travail entrepris par cette institution. On peut rectifier le tir et c'est une question de temps. D'ici un an, on pourra certainement opérer des changements dans cet établissement. » confie-t-elle. Le témoignage de Mme Lilia Laâbidi, ministre de la Femme dans le gouvernement de transition était aussi annonciateur d'une nouvelle étape pour ce qui est de l'avenir de la femme tunisienne. « Pardon » dit-elle les sanglots lui nouant la gorge. « Je demande pardon à toutes les femmes tunisiennes qui ont souffert de la marginalisation, et à celles qui sont longtemps restées reléguées aux oubliettes : Sihem Ben Sedrine, Rachida Enneifer et les autres figures de proue du militantisme en Tunisie. Pendant 23 ans, il est vrai qu'on a mangé du pain, mais permettez-moi d'utiliser cette parabole : un enfant qu'on nourrit et qu'on prive d'amour et de liberté peut grandir mais ne naîtra pas en tant qu'être social. » Cela se passe de tout commentaire.