- Du travail pour des diplômés et pour les non diplômés ; la rupture avec les pratiques des délégués, des cheikhs et des Omdas : est-ce compliqué ? La colère qui a gagné Kasserine et s'est enflammée brusquement ne va pas s'apaiser sous peu, paraît-il. Des voix appellent à saccager encore une fois cette ville du nord ouest pour faire entendre les cris étouffés d'une population longtemps brimée… Hier, devant la SNCPA, la société nationale cellulose et papier Alfa de Kasserine, les jeunes, entre diplômés et personnes non qualifiées ont manifesté exprimant leur volonté d'être écoutés. N'est-ce pas là une mission qui incombe au gouverneur fraîchement nommé ? se demande-t-on. Il n'en n'est aucunement le cas même si Amor Bel Hadj Slimane a montré sa volonté d'écouter la population qu'il a commencé à accueillir depuis le début de la semaine, mardi dernier. Statistiques D'après Noomane Mabrouk un natif de la région, « le premier jour il a reçu au siège du gouvernorat 80 personnes. Mercredi il était dans l'impossibilité de recevoir du monde, au début de la journée, puisque le chaos a régné, chose qui a amené les militaires à intervenir pour mettre de l'ordre dans les rangs des postulants dont il a fini par écouter les doléances d'une vingtaine parmi eux. » Mais les choses n'ont pas avancé pourtant. Car les jeunes n'ont pas eu satisfaction quant à la volonté des instances publiques régionales à leur prêter une oreille attentive. Et comme un ventre affamé n'a pas d'oreille, certains manifestants ont même menacé de reprendre de plus belle avec les actes de violence ayant donné lieu à la Révolution du 14 janvier. « J'ai demandé au gouverneur de procéder à l'élaboration de statistiques qui reflètent une image réelle de Kasserine quant aux taux de chômages, taux de développement économique, etc.,. Il faut, en effet, couper court avec les statistiques erronées de l'ancien régime pour pouvoir changer la situation, d'autant plus qu'on ne peut pas se fier aux dires du délégué ou des cheiks des différentes régions de Kasserine , les mêmes ‘'bourreaux'' de l'ancien régime, pour espérer à un véritable changement. « Le délégué me propose 10 dinars » La réponse du gouverneur était catégorique. Il m'a renvoyé. Et pour me calmer le premier gouverneur m'a proposé 10 DT pour que je puisse rentrer chez moi en taxi et m'a promis de me débrouiller un poste dans l'usine de la ville.» nous dit Noomane qui est, par ailleurs, un diplômé au chômage qui a continué « Le gouverneur s'est contenté de proposer aux diplômés de s'inscrire dans un bureau crée pour ce faire et d'étudier les dossiers par la suite au cas par cas. Il a également demandé à certaines personnes l'ayant rencontré de travailler pour 120 DT en attendant des jours meilleurs. » Un autre problème exposé et une autre situation encore plus insoutenable : c'est le cas de Fatma Z. M.qui est partie voir le gouverneur pour avoir été exploitée par le cheikh de son quartier, une personne sans foi ni loi l'ayant obligée à ‘'satisfaire ses pulsions sexuelles'' pour pouvoir garder son emploi en tant que femme de ménage dans un lycée. Mais ce n'est pas tout, car cette même personne a abusé de son pouvoir pour que la mère de trois enfants n'ait jamais eu une couverture sociale. Le gouverneur a promis à la dame d'en discuter avec le Cheikh pour apporter une solution à son problème. Drôle d'attitude ! Pour Khaled Nasri, un membre du Comité régional de la sauvegarde de la Révolution, « Tous les projets qui allaient élire domicile à Kasserine ont été détournés par la mainmise totale d'une horde d'employés de l'Etat qui détiennent les rênes du gouvernement. Kasserine devrait avoir son aéroport, une autoroute qui mène droit au son centre ville, deux universités. Kasserine peut être sauvée si on amène des industriels à créer des usines employant chacune 1000 employés, en exploitant à bon escient les multiples richesses du pays. Pourquoi a-t-on changé le siège de la cour d'appel au Kef ? Pourquoi réserve-t-on aux 27 dispensaires du gouvernorat 500 mille dinars seulement ?» se demande-t-il. Il faut dire que beaucoup de questions nous brûlent les lèvres en ces moments et attendent d'être résolues quant à l'avenir de la Révolution du côté de Kasserine. Sauf que M. Hadj Slimane qu'on a contacté en début de journée, était très absorbé par son travail et par les affaires de son nouveau gouvernorat et n'a pu de ce fait répondre à nos questions… « On va vous rappeler madame » nous dit au bout du fil le secrétaire de M. le gouverneur. On attend toujours.