Karim MISSAOUI Avocat à la Cour de cassation - Notre pays vient de vivre une semaine cruciale. Il me semble que notre avenir est sur le bon chemin. Trois événements majeurs se sont déroulés. Tout d'abord, Mohammed Ghannouchi a démissionné. Depuis sa fameuse interpellation de « la majorité silencieuse », une frange importante de la population a saisi le signal qui lui était adressé par l'ancien Premier ministre. Désormais, il va falloir compter avec cette partie de la population. Les rapports de force qui étaient du côté de l'UGTT, des courants politiques et associations faisant partie du conseil de la protection de la révolution, se sont relativement rééquilibrés. Désormais, il n'y a plus un seul son de cloche dans le pays. Et c'est tant mieux pour la démocratie. Car, quand il y a une seule coalition qui s'exprime, ce n'est jamais une bonne chose pour la démocratie. Le deuxième événement est, bien évidemment, la nomination de Béji Caïd Essebsi en tant que nouveau Premier ministre. Depuis cette nomination, les choses ont commencé à bouger, jusqu'à aboutir au troisième événement, à savoir la récente déclaration du président de la République par intérim qui vient de nous annoncer cette feuille de route que nous avons tant réclamée. Le nouveau tandem Caïd ESSEBSI/Foued MEBAZZA vient de mettre le pays sur les bons rails. Il fallait travailler sur trois dimensions, le symbolique, la politique et le juridico-institutionnel. Et c'est chose faite. Sur le plan des symboles, nous pouvons affirmer que la Révolution tunisienne est en bonne marche. Après avoir balayé le RCD, les ministres de l'ancien régime et les gouverneurs inféodés au RCD, la Révolution vient désormais de basculer l'ancienne Constitution. Nous voilà donc dans un pays sans Constitution et dont le pouvoir exécutif, le président et le Premier ministre, va désormais commander sans norme constitutionnel ! Le président par intérim et le Premier ministre vont diriger le pays par référence à la légitimé populaire, celle du peuple révolté ! Comme elle est belle notre Révolution. Excusez mon émotion, je suis un citoyen libre qui vit dans un pays emporté par la dynamique révolutionnaire. Et cerise sur le gâteau, cette dynamique est désormais positive et constructive ... Vive le peuple tunisien révolté, bravo à nos dirigeants par intérim ... La deuxième nouveauté concerne la dimension politique. Notre tandem MEBAZZA/Caïd ESSEBSI vient de mettre dos à dos plusieurs courants politiques et organisations associatives et syndicales. Ahmed Najib Chebbi et Ahmed Ibrahim ont été invités à faire le choix entre leur ambition politique et leur appartenance au gouvernement provisoire. Finis la confusion des genres, l'amalgame et le calcul politicien. Ahmed Najib Chebbi était très remonté contre Caïd ESSEBSI, accusant le nouveau Premier ministre de s'incliner devant le dictat des membres du conseil de la révolution ! Et comble de l'irresponsabilité politique, il nous a annoncé l'imminente intervention des militaires, accusant cette fois-ci notre honorable et sage armée républicaine ! Or, les événements, encore une fois, viennent le contredire et de façon très spectaculaire. En effet, notre tandem MEBAZZA/Caïd ESSEBSI, qui commence à mettre un pied dans l'Histoire du pays, a décidé de ne pas cautionner et légitimer l'auto proclamation du conseil de la protection de la révolution en une sorte de concentré de pouvoirs –excusez du peu- exécutif/législatif/judiciaire/médiatique ... Il semblerait que les membres de ce conseil vont devoir faire preuve de sagesse et se contenter d'intégrer la commission de Iadh Ben Achour pour préparer une loi électorale spéciale, pour la tenue démocratique des prochaines élections de l'Assemblée constituante prévues pour le 24 juillet 2011. J'espère que les consultations et tractations autour de cette loi ne seront pas utilisées par quelques courants comme une occasion pour semer la confusion et le trouble. L'intérêt supérieur de la nation et de la Révolution doit primer sur les intérêts partisans et les petits calculs politiciens. Gageons que le peuple désormais éveillé saura rester vigilant. Enfin et c'est la troisième dimension du travail de notre tandem MEBAZZA/Caïd ESSEBSI, la dynamique révolutionnaire commence à se traduire juridiquement. Elle prend le cap de la construction d'un nouvel Etat de droit démocratique. La Révolution est en bonne marche ... Nous aurons le 24 juillet 2011, une Assemblée constituante qui se chargera essentiellement de la préparation d'une nouvelle Constitution. Une fois que notre pays aura une nouvelle Constitution, nous organiserons des élections législatives. Notre chère Tunisie entrera alors dans l'exercice concret de la démocratie. Soyons à la hauteur de ces événements, soyons dignes de cette opportunité historique. Améliorons nos vies et préparons un destin meilleur pour nos générations futures.