Le droit de grâce est parmi les prérogatives propres au président de la République et dont il peut user à la demande de l'intéressé ou à l'occasion des grandes dates de l'histoire du pays. L'amnistie fait partie de ce droit de grâce dont peut user le Président de la République. Elle peut être spéciale, c'est-à-dire, concerner une personne ou un domaine déterminé. Ainsi, le président de la République a signé un décret-loi d'amnistie concernant l'infraction d'émission de chèque sans provision, en la limitant dans le temps, soit toute infraction commise avant le 14 janvier 2011. Elle peut être, également, générale, c'est-à-dire, qu'elle concerne tous les détenus, quelle que soit l'infraction commise. Là aussi, il y a des limites aussi bien dans le temps que dans les catégories d'infraction. A l'occasion de la fête de la République, le président de la République par intérim, a fait bénéficier de son droit de grâce un grand nombre de détenus, et ce, en accordant l'amnistie par le biais de la liberté conditionnelle ou la remise de peine. Cela se pratiquait-il de la même façon sous l'ancien régime ? La réponse à cette question ne peut être que mitigée. En effet, si la forme est restée, à quelques différences près, la même, il n'en va pas de même en ce qui concerne le fond. Il y a, en effet, une volonté indéniable de la part du président de la République par intérim, ainsi que du gouvernement provisoire, de faire libérer le maximum de détenus et de les faire profiter du droit de grâce de la manière la plus équitable, ce qui n'existait pas avant le 14 janvier. Les demandes adressées par les détenus à qui de droit, n'étaient pas toutes prises en considération. Plusieurs de ces demandes étaient classées sans suites ou mises dans le sous-main du bureau d'un des responsables. En outre, on procédait par catégories d'infractions pour totalement en exclure certaines, telles que la consommation de stupéfiants. A propos de cette infraction, un centre de désintoxication a été créé en vue de remplacer la peine corporelle pour les jeunes toxicomanes. Hélas, on en faisait bénéficier quelques uns au détriment d'une majorité de jeunes qui en avaient pourtant bien besoin. Concernant l'amnistie, une liste était préalablement préparée en excluant d'office ceux qui étaient considérés comme dangereux, dont notamment les détenus politiques. De temps en temps, quelques uns étaient libérés à des occasions bien déterminées, mais, c'était plutôt à titre de parade pour l'opinion publique et les organisations internationales des droits de l'Homme. Pourquoi la présence du ministre de l'Intérieur ? Sous l'ancien régime, on annonçait, à l'occasion d'une amnistie que le président déchu avait reçu le ministre de la Justice et le ministre de l'Intérieur. Pourtant, l'administration pénitentiaire n'est plus sous la tutelle du ministère de l'Intérieur, mais sous celle du ministère de la Justice. C'est la raison pour laquelle on s'est posé des questions depuis, la raison de la présence du ministre de l'Intérieur. Sous l'ancien régime, il y a bien sûr le rapport de la police politique qui était nécessairement présenté par le ministre, concernant les prétendants au droit de grâce. Après le 14 janvier, le motif n'est certainement plus le même, la police politique ayant été supprimée. Peut-être, à cause du fichier pour lequel il n'existe pas, pour le moment, de coordination, ni avec l'administration des prisons, ni avec celle du ministère de la Justice. Beaucoup de travail reste à faire à ce niveau. En effet, le ministère de l'Intérieur ne peut que communiquer au ministère de la Justice, l'état complet du fichier de chaque détenu. Celui-ci, une fois jugé, n'est plus sous la tutelle du ministère de l'Intérieur. Il ne peut l'être que s'il fait l'objet d'une enquête pour un fait nouveau. L'intervention du ministère de l'Intérieur ne doit plus, désormais, avoir sa raison d'être, une fois que les coordinations nécessaires auront été accomplies entre le ministère de la Justice et l'administration pénitentiaire, pour ceux qui ont été définitivement jugés. C'est l'avis de la plupart des juristes ainsi que les défenseurs des droits de l'Homme.