Durant ces derniers jours, nous vous avons proposé plusieurs reportages sur l'état des marchés. Nous avons ainsi pu découvrir ce les prix du marché central, de celui, plus populaire, de Sidi El Bahri, mais aussi ceux plus lointains de Tabarka et de Hammamet. Aujourd'hui c'est à la découverte d'autres lieux que nous vous convions : il s'agit de ces boutiques situées aux alentours des quartiers chics, proches de Tunis, mais éloignés des bourses modestes. En effet, en allant vers ces quartiers dits huppés, vous rencontrez souvent sur votre route des boutiques de fruits et légumes chics, mais qui proposent des prix chocs, au point de vous faire tomber dans les pommes. Dans ces lieux, d'El Menzah à El Manar, en passant par cité Ennasr et dans la banlieue nord, des marchands bénéficient de baraques souvent construites dans des espaces publics, rues ou squares, grâce à des relations plus ou moins douteuses avec les anciennes autorités locales. Sevrés de tabac en ce mois de Ramadhan, ils sont souvent de mauvaise humeur et acceptent mal de discuter les prix ou la qualité de leurs fruits. Il faut dire que la qualité ici est très bonne, mais à quels prix ! Lors de notre tournée, nous avons constaté qu'ils sont très élevés : jusqu'à un Dinar de plus que les prix des marchés. Mais l'arnaque est tout de même présente : balance mal équilibrée, poids irréguliers, emballage en papier lourd… On a également constaté que bon nombre de ces marchands pesaient plus de fruits dans les paquets que le poids demandé par le client, mettant ainsi une grande pression psychologique sur des clients qui osent rarement protester. En fait, le seul avantage de ces boutiques c'est de se situer près de ces banlieues plus ou moins lointaines, évitant ainsi aux clients une descente à Tunis qui ressemble à une descente aux enfers. Quant aux inconvénients, il y a les légumes ravivés à grands renforts d'eau plus ou moins propre. Ici la moindre petite salade ronde est à 900 Millimes, le persil à 600, les concombres à près d'1D500. Les tomates, pommes de terre et autres piments restent hors de prix, avec un demi Dinar de plus en moyenne par rapport au marché. Côté fruits, c'est également plus cher que tous les autres marchés : 2D600 en moyenne pour la plupart des fruits de saison, avec des pointes à près de quatre Dinars pour les figues, cinq pour les pêches plates, les dattes et plus encore pour certaines variétés de pommes. Les bananes semblent alors bien sages avec leur 2D500 le kilo en moyenne. Interrogé sur les raisons de ces prix trop élevés, un des marchands s'explique : « au marché du gros la demande est toujours en hausse, les frais de transport ont augmenté, et surtout nos clients sont très exigeants… Résultat : nous sommes obligés de jeter bon nombre de fruits qui sont légèrement égratignés ou qui ont un défaut visible. On doit en outre acheter plus cher et donc vendre plus cher et j'ai ici toutes les factures… » Côté clients, ce sont des souvent des cadres pressés qui n'ont pas le temps d'aller tranquillement au marché ou de discuter les prix. Alors ils se retrouvent dans l'obligation de faire leurs emplettes dans ces boutiques qui ont les mêmes tarifs que les pharmacies, l'hygiène en moins. D'ailleurs ils ne veulent même pas donner leur avis sur cette situation, préférant payer et repartir au plus vite se reposer dans leurs confortables appartements climatisés… Au bout de notre tournée nous avons le sentiment qu'une race de profiteurs continue encore à arnaquer les consommateurs, à profiter de certaines positions stratégiques pour installer des boutiques de façon illégale sur les trottoirs et dans les espaces publics. Un héritage d'un passé que les tunisiens mettront longtemps à « dégager »…