Elles sont deux personnes impliquées dans une affaire de fausse déclaration, faux et usage de faux. Elles ne se connaissent pas du tout, l'un est employé de banque, l'autre est bon client. Hédi, a comparu en état d'arrestation devant la chambre criminelle du tribunal de 1ère instance de Tunis. Incarcéré depuis une année, il attendait impatiemment le jour du procès pour clamer son innocence et déclarer qu'il n'a aucun lien ni de près ni de loin avec cette affaire. Il a toujours effectué ses tâches avec exemplarité. Mourad, client de la banque, a comparu en liberté. Il a déclaré au juge que c'est lui la victime et qu'il n'a jamais pensé qu'il allait comparaître en tant qu'accusé. Voici les faits : Agriculteur depuis une trentaine d'années, Mourad projetait d'agrandir son domaine. Avec l'aide de son père, il a voulu créer une société dont le capital est de l'ordre de 400 Mille dinars. Il avait l'intention d'acheter du matériel assez coûteux. Il lui fallait l'aide de l'Etat. Pour cela il est allé contacter le chef d'agence bancaire d'El Mornaguia qui lui a expliqué les modalités lui permettant de réaliser son projet. A part les formalités qu'il devait remplir et signer il lui fallait un auto-financement représentant le 1/3 du capital à savoir 100.000 Dinars. Mourad a déclaré que quelque temps après il s'est présenté au comptoir de l'agence ayant un sac en plastique contenant la somme demandée. Le montant était constitué de différentes coupures. Il a trouvé Hédi au comptoir de réception. Ce dernier l'a dirigé vers le guichet caisse pour verser la somme. Comme la somme est constituée de différentes coupures, le caissier l'a informé qu'il faudrait au moins une heure pour les compter. Il lui a demandé d'aller prendre un café quelque part et revenir plus tard. En revenant il n'a pas trouvé le caissier. Il a déclaré que Hédi lui a remis l'attestation nécessaire prouvant qu'il a réglé l'auto financement . Ayant quitté la banque, Mourad s'est dirigé vers la recette des finances pour enregistrer l'attestation. Il a déposé son dossier pour l'octroi du crédit. Un mois plus tard, et à la suite de vérifications effectuées au niveau de la banque, il s'est avéré que cette somme n'a jamais figuré dans la comptabilité bancaire et qu'il n'y a aucun indice d'encaissement. L'affaire a été transmise à la Direction des affaires économiques du Ministère de l'intérieur qui a ouvert une enquête. Interrogé, Mourad a insisté sur le fait que c'est bien Hédi qui lui a remis l'attestation contenant le cachet et la signature du responsable de la banque.. Ce que Hédi a complètement nié en déclarant qu'il ne connaît pas Mourad et que son travail consiste à diriger les gens vers les différents secteurs pour les opérations bancaires. Devant le juge, les deux inculpés ont maintenu les mêmes déclarations. Chacun a réitéré ses déclarations faites devant le juge d'instruction. L'avocat de Hédi a pris du temps pour essayer de convaincre les juges de l'innocence de son client. Il s'est référé d'abord sur les expertises effectuées sur l'attestion et l'authenticité des signatures. La première expertise effectuée par un laboratoire reconnu et groupant un nombre d'experts travaillant pour le compte de l'Etat et travaillant à l'aide d'un matériel assez sophistiqué, n'a pas pu déterminer s'il s'agit de la signature de Hédi. Une deuxième expertise a été effectuée par un particulier dont la compétence ne peut pas égaler celle des premiers experts. Ce dernier a déclaré que la signature opposée sur le cachet de la banque pourrait être celle de Hédi. L'avocat a déclaré que son client a constamment nié les faits et ce au cours de toutes les étapes de l'enquête. Aussi et pour conclure, il a informé le juge que son client a été traduit, à la suite de cette affaire, devant le conseil de discipline de la dite banque et qu'aucune charge n'a été retenue contre lui par les responsables de la banque. Pour toutes ces considérations, il a demandé l'acquittement pur et simple. L'avocat de Mourad s'est étonné du déroulement de la procédure. Comment se fait-il que son client qui est normalement la victime dans cette affaire se trouvé impliqué alors que les agents de la banque qui sont liés par cette affaire ne soient même pas entendus par les enquêteurs. Le caissier Imed ?? Quel est son rôle dans cette affaire ?? Le chef d'agence également. L'avocat a insisté sur le fait que cette affaire a été classée deux fois par le juge d'instruction. Ce n'est qu'à la suite de la deuxième expertise que l'affaire a rebondi pour mettre en cause son client et le premier accusé Hédi. Il a demandé l'acquittement. Une énigme que les juges prendraient du temps pour élucider.