Emna Mnif est une femme militante. Elle incarne la Tunisie de demain. Acteur politique indépendant, elle préside actuellement l'Association Kolna Tounes, un projet que porte la mouvance démocratique progressiste centriste. Emna a bien voulu nous parler de la journée de la femme, des libertés et des droits de la femme tunisienne, de l'égalite homme-femme et du féminisme lors d'un meeting organisé par le Parti Républicain à Nabeul
Que doit défendre la Journée de la femme en 2012?
La journée de la femme en 2012 doit être sous les emblèmes de le République et de la Citoyenneté. En définitive, ce sont les valeurs de la République et la consécration de la Citoyenneté qui peuvent assurer à tout citoyen ses droits et fixer ses devoirs en toute égalité et sans discrimination de genre, de race, de région ou de culte.
Pensez-vous que les libertés et les droits de la femme sont menacés ?
Actuellement, les Droits et les Libertés sont menacés pour tous les citoyens. La Femme est menacée dans son existence en tant qu'entité, citoyenne à part entière, définie à travers elle même, par rapport à elle même, dans sa propre trajectoire.
Dans quel(s) domaine(s) pensez-vous qu'il existe des inégalités entre hommes et femmes aujourd'hui?
Incontestablement dans les domaines de l'accès au travail, l'accès aux responsabilités notamment et particulièrement politiques, des libertés individuelles... En somme, les inégalités viennent, d'une part d'un processus de modernisation autoritaire de l'état, d'autre part, d'une volonté politique d'acculturation du peuple tunisien qui a fait que la société dans son ensemble n'a pas évolué à la même cadence que ses élites et que ses Lois. La menace est que, sous couvert d'un discours religieux tourné vers le passé et dépouillé de sa nature progressiste, et dans processus totalitaire de modeler un nouveau projet de société, les inégalités se creusent aux dépens de la Femme.
Quelle discrimination envers les femmes vous choque le plus?
La mise sous tutelle de la femme, la position de dépendance vis à vis de l'Autre masculin.
Ennahdha affirme l'égalité citoyenne et l'égalité homme-femme. Qu'en pensez-vous ?
C'est une illusion drapée dans un discours politique galvanisé.
Si vous étiez un homme politique, que feriez-vous pour les femmes. Quelles sont les mesures à prendre pour défendre les droits de la femme?
En tant que femme politique, je mettrai en œuvre tous types de mesure qui permettraient aux femmes d'assumer leur citoyenneté entière sans leur dénier leur singularité féminine. Pour permettre la scolarité avancée des filles rurales et de milieux défavorisées, généraliser le transport scolaire urbain et périurbain, pour déculpabiliser les femmes laborieuses et atténuer les charges domestiques et la prise en charge des enfants, généraliser les crèches en milieux professionnels, aménager les horaires de travail pour reconstruire la cellule familiale et que l'on travaille pour vivre plutôt que de vivre pour travailler, sortir la culture des espaces clos et l'amener à l'espace public pour la rendre accessible aux femmes dans les milieux conservateurs, assurer la sécurité à toutes les femmes...
Vous vous dites féministe? Qu'évoque pour vous cette notion? Que pensez-vous de la connotation négative associée parfois à ce terme?
Je me dis humaniste, le bien être de l'humanité est indivisible, les Droits Humains sont indépendants du genre, de la race ou du culte, encore une fois. Je ne condamne pas pour autant les mouvements féministes. Le féminisme est une forme de militantisme qui a fait avancer la question de la femme dans le monde, en général, et en Tunisie, en particulier depuis des dizaines d'années et sans lequel le combat actuel, en Tunisie, pour la citoyenneté absolue ne serait pas possible. La connotation négative procède d'une volonté de marginaliser la femme et ses aspirations.
Pensez-vous que votre mouvement Kolna Tounes défend assez la femme tunisienne ?
Kolna Tounes s'investit pour consacrer les Libertés, les Droits et l'Egalité à travers le désenclavement des régions et des catégories sociales par la promotion d'un nouveau projet de société qui pourra édifier une République Solidaire Responsable, par la diffusion de la culture, à travers l'esprit de solidarité... Tout cela défend les catégories précaires, Homme ou Femme, et nécessairement particulièrement la Femme. À titre d'exemple, Kolna Tounes a financé de nombreux micro projets. La majorité des bénéficiaires étaient des femmes... parce qu'elles étaient dix fois plus nombreuses à proposer des projets