Les affrontements ont repris, hier, à Ben Guerdane et à Médenine entre la police et des protestataires qui réclamaient le rétablissement de l'activité commerciale entre la Tunisie et la Libye et la suppression des taxes imposées aux ressortissants de ces deux pays au niveau des postes frontaliers ainsi que le droit des habitants de ces régions au travail. A Ben Guerdane, les agents de l'ordre ont fait usage du gaz lacrymogène pour disperser les protestataires rassemblés à la Place du Maghreb arabe. Ces derniers ont riposté par des jets de pierres. Par ailleurs,un calme précaire régnait hier à Dhehiba, où un jeune protestataire a trouvé la mort et quatorze personnes ont été blessées dimanche lors de heurts violents au cours desquels les manifestants ont jeté des pierres et des cocktails Molotov sur les forces de l'ordre, selon un porte-parole du ministère de l'Intérieur. Les funérailles de Saber Meliane, le jeune décédé lors de ces affrontements, ont été reportées pour aujourd'hui (mardi) vu que la dépouille du défunt n'a pas été livrée à sa famille à temps. Dépêchée sur les lieux pour remplacer les unités de la garde nationale, l'armée nationale s'est déployée dans la région pour protéger les locaux de sécurité et plus particulièrement le poste de la garde-frontière de Dhehiba. Hier, la ville est entrée, en grève générale. La grève à laquelle a appelé la société civile a paralysé le trafic à l'intérieur de la ville. Les établissements éducatifs et les différentes administrations n'ont pas ouvert leurs portes, en ce début de semaine. D'autre part, un comité formé des deux députés à l'Assemblée des Représentants du Peuple, en l'occurrence Ahmed Laâmari et Taher Fadhel, a entamé dimanche soir des négociations avec des responsables libyens en vue d'examiner les moyens d'annuler les taxes de sortie du territoire imposées aux ressortissants tunisiens et libyens qui franchissent la frontière dans les deux sens. Cette taxe d'une valeur de 30 dinars par personne avait été imposée par la Tunisie aux Libyens en application d'une disposition de la loi des finances pour l'exercice 2015. Invoquant le principe de la réciprocité, la Libye avait, elle aussi, imposé aux Tunisiens non résidents souhaitant entrer sur son territoire de s'acquitter d'une taxe de 30 dinars. Aujourd'hui, grève régionale à Tataouine Selon Ahmed Laâmari, des propositions concrètes ont été soumises aux négociateurs libyens, lesquels ont demandé davantage de temps pour consulter les autorités centrales de leur pays. Côté tunisien, l'intérêt se porte désormais sur la suspension de cette taxe controversée. Les régions du sud tunisien frontalières de la Libye vivent largement du commerce, formel ou informel, avec la Libye. Ces régions sont un haut lieu de contrebande de carburant en provenance de Libye, un trafic lucratif sans lequel la population locale dit ne pas pouvoir survivre. En attendant l'issue des négociations entre les responsables tunisiens et leurs homologues libyens, l'Union régionale du travail de Tataouine a annoncé, hier, le maintien de la grève générale prévue aujourd'hui dans la région en signe de protestation contre l'usage excessif de la force par la police et les tirs à balles contre les manifestants. Sur un autre plan, plusieurs partis, dont le Courant Démocratique et le mouvement Ennahdha, ont appelé à l'ouverture d'une enquête sérieuses sur les évènements de Dhehiba, estimant que les protestations des habitants sont légitimes au regard de la marginalisation dont souffrent les régions du sud depuis de longues décennies. Le mouvement du peuple des citoyens, une nouveau parti créé par l'ancien président Moncef Marzouki, a, quant à lui, appelé le ministre de l'Intérieur à intervenir pour mettre fin à l'usage de balles réelles par les forces de l'ordre, tout en appelant les protestataires à manifester pacifiquement et à ne pas s'en prendre aux biens publics et aux institutions de l'Etat. A noter que le gouvernement avait annoncé dimanche avoir pris une série de mesures suite aux incidents survenus dans la délégation de Dhehiba. Il s'agit notamment d'ouvrir une enquête sur les circonstances de la mort de l'un des manifestants, d'examiner la possibilité de réviser la taxe de sortie du territoire tunisien imposée aux Libyens et de dépêcher une délégation gouvernementale vers Dhehiba pour s'enquérir de la situation socio-économique dans la région. Selon un communiqué de la présidence du gouvernement, ces décisions interviennent à l'issue de la réunion de la cellule de crise en charge du suivi de la situation sécuritaire dans le pays.