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«Il faut arrêter d'accorder à Ennahdha un statut spécial au sein du paysage politique»
Publié dans Le Temps le 12 - 06 - 2016

Depuis l'annonce de l'initiative de Béji Caïd Essebsi – qui consiste en la formation d'un gouvernement d'union nationale – tout l'échiquier politique et médiatique n'a d'yeux et d'oreilles que pour cela. Les différents analystes avancent diverses théories et tiennent des discours assez contradictoires.
Pour notre rubrique dominicale, nous avons été reçus par le journaliste et l'analyste politique Sofiene Ben Hamida avec qui nous sommes revenus sur tous les dossiers brûlants de l'actualité et, surtout, sur l'évaluation des partis les plus importants du pays.
-Le Temps: Béji Caïd Essebsi a annoncé son initiative pour la formation d'un gouvernement d'union nationale il y a dix jours. Les concertations ont débuté jeudi dernier au palais de Carthage et continueront demain. Pensez-vous que cette formation prendra beaucoup de temps avant de voir le jour ?
Sofiene Ben Hamida:Le président de la République, lors du premier round des concertations, avait déjà annoncé qu'il tenait à ce que le dossier du gouvernement d'union nationale soit plié avant la fin du mois de Ramadan. Ce qui représente une période relativement courte. Seulement, les tractations peuvent être très difficiles, douloureuses même compte tenu des positions des différents actants politiques notamment les partis de la coalition gouvernementale qui donnent l'impression d'avoir, chacun de son côté, sa propre conception de l'union nationale et de son gouvernement.
-Et en ce qui concerne l'UTICA et l'UGTT ? Pensez-vous que ces deux organisations iront vers la participation directe à ce gouvernement?
Personnellement, je ne le pense pas. L'UGTT, en premier lieu, et l'UTICA, en second lieu, ont une longue tradition dans la gestion des affaires publiques et politiques. Sauf dans des circonstances particulières, très différentes de celles qui caractérisent l'instant présent, ces deux organisations nationales ont toujours respecté une distance vis-à-vis de la gestion directe des affaires de l'Etat. Elles ont la vocation et le devoir de participer à la vie politique nationale. C'est dans l'ADN de ces deux organisations nationales mais elles ont toujours respecté la distance vis-à-vis du pouvoir même s'il y a eu des périodes de collusions imposées ou choisies.
Aujourd'hui, ces deux organisations soutiennent l'initiative présidentielle, ce qui est le principal atout de Béji Caïd Essebsi. Mais leur participation au sein de ce gouvernement ne sera une d'une manière directe mais à travers des personnages proches avec lesquels elles peuvent entretenir des rapports moins conflictuels.
-Béji Caïd Essebsi a été clair lors de son annonce; si l'UTICA et l'UGTT ne marchent pas, l'initiative n'aura pas lieu. Est-ce qu'une participation ‘limitée' peut selon vous satisfaire le chef de l'Etat ?
L'essence de la proposition du président de la République était, à mon avis, la recherche de la paix sociale qui permettrait au prochain gouvernement de travailler sur les dossiers et les réformes pressantes sans subir la pression de la rue. Le gouvernement d'union nationale, en association avec les deux principales organisations nationales, pourrait garantir cet état de paix sociale et être un palliatif à l'échec d'une structure qui n'a malheureusement jamais été activée qui est la structure énoncée dans le pacte social, signé il y a deux ans.
D'un autre côté, le président de la République chercherait, par cette volonté d'associer ces deux organisations nationales, à pallier une erreur commise par les constituants qui est la liquidation du Conseil économique et social, une structure qui favorisait le débat social et qui permettait aux politiques un échange riche avant l'élaboration de leurs textes de lois et leurs programmes de réformes.
-Et pour ce qui est du départ d'Habib Essid ? Etes-vous plutôt de ceux qui prévoient sa reconduction au poste de chef du gouvernement ?
Indépendamment des qualités de travailleur honnête et intègre, l'échec du gouvernement actuel est un échec personnel du chef du gouvernement qui n'a jamais donné l'impression de contrôler ses troupes et qui a manqué d'autorité et de poigne randonnant les départements ministériels des domaines réservés où les ministres, chacun selon son agenda, peuvent agir en toute liberté sans rendre compte ni à lui ni à personne.
Habib Essid est responsable du manque flagrant de la solidarité gouvernementale et c'est pour cette raison qu'il serait inopportun, incompréhensible même, de le reconduire à la tête du gouvernement d'union nationale. Bien entendu, pour les qualités déjà citées de l'homme, il serait impératif de trouver les formes pour lui garantir une sortie honorable.
-Cette question du départ ou du maintien d'Essid divise, de nouveau, Nidaa Tounes. On a vu les réactions de Belhadj et les réponses plutôt violentes des autres dirigeants. Nidaa risque-t-il de revivre une nouvelle crise à cause de l'initiative présidentielle ?
Selon les informations dont je dispose, la position de Ridha Belhadj était une position singulière au sein du comité politique. C'est pour cette raison que Nidaa Tounes ne semble pas connaître une turbulence à cause de l'initiative présidentielle. Je pense même que Belhadj mettra de l'eau dans son vin pour revenir à de meilleurs sentiments envers le président de la République, son initiative, son fils et ses camarades à la direction du Nidaa.
-Il semblerait que le fils du président de la République ait fait main basse, ‘officiellement', sur le mouvement. Cela coïncide avec le retour de quelques dirigeants qui avaient gelé leur adhésion à Nidaa Tounes. Comment évaluez-vous la situation interne de ce mouvement ?
Je pense que c'est exagéré. Il est évident que Hafedh Caïd Essebsi manque d'autorité et de légitimité. La situation actuelle est plutôt une situation de paxromana qui permet d'aller au congrès électif avec un minimum de cohésion. Nous verrons si Hafedh Caïd Essebsi peut résister à un congrès démocratique, électif. S'il en sort vainqueur, cela serait l'option des Nidaïestes et c'est leur problème, ou leur chance.
-Après avoir perdu plus d'une vingtaine de ses députés, et suite au scandale déclenché par l'adhésion des trois députés dissidents du bloc de l'Union patriotique libre, le bloc parlementaire de Nidaa Tounes tente aujourd'hui de récupérer sa place d'antan. Pensez-vous qu'il réussira sa mission ?
C'est une question à poser pour une diseuse de bonnes aventures. En politique, tout peut arriver, il suffit de réunir les conditions pour cela. Les résultats et le déroulement du prochain congrès du Nidaa seront déterminants pour l'image de son bloc parlementaire et sa capacité de captation.
-Après la même affaire, celle des députés dissidents du bloc de l'UPL, le parti de Slim Riahi semble vivre une crise sans fin et les discours ne cessent de chuter. Quel est votre avis sur la question ?
Objectivement, l'UPL ne répond pas aux normes conventionnelles d'un parti politique dans le sens où il n'exprime pas les intérêts d'une frange ou d'un groupe au sein de la société. Son ascension a été boostée par l'apport financier de son président et fondateur qui a réussi une opération marketing et électorale remarquable. Cela est-il suffisant pour créer un parti ? Nous ne le pensons pas compte tenu des défaillances multiples et répétées de ses cadres.
Sur le plan strictement politique, l'UPL n'apporte aucune nouveauté, aucune option de choix différente par rapport aux idées et aux orientations déjà existantes sur la scène politique. La personnalité et le comportement de son président renforcent l'amalgame forcément négatif entre le politique, le financier et le sportif. Nous avons connu une ascension fulgurante d'Al Aridha en 2011, nous avons connu une ascension fulgurante, aussi, de l'UPL en 2014, je ne serais pas surpris qu'ils connaîtront le même sort lors des prochaines élections.
-Suite à son dixième congrès, le mouvement d'Ennahdha semble peiner à unir les positions entre ses différents dirigeants. Etes-vous de ceux qui pensent qu'Ennahdha est loin de l'image qu'il a donnée lors du congrès en question ?
Depuis des années, j'étais convaincu qu'Ennahdha est un parti politique composé d'hommes et de femmes politiques comme les autres. Je n'ai jamais cru à cette image colportée de solidarité sans faille. Les allers-retours d'Abdelfattah Mourou, la sortie de Riadh Chaïbi, le départ de Hamadi Jebali, pour ne parler que des épisodes récents, montrent qu'Ennahdha connaît des problèmes internes aussi.
Les choix énoncés à la fin du dixième congrès n'ont pas été pris de la manière la plus démocratique ou consensuelle. Il a même fallu que Rached Ghannouchi menace de démissionner pour imposer certaines décisions. En ce sens, je pense qu'il faut arrêter d'accorder à Ennahdha un statut spécial au sein du paysage politique. C'est un parti comme les autres qui connaît autant de problèmes internes que les autres.
-Et que pensez-vous de la nouvelle ligne politique du mouvement adoptée, toujours, au cours du dixième congrès ?
Je ne crois qu'il y ait eu de nouvelle ligne politique mais il y a eu uniquement l'adoption de nouvelles modalités au service du même projet. Pour Ennahdha, dominer la vie politique et sociale, c'est-à-dire islamiser la société tunisienne, ne serait pas possible à travers l'outil politique. Ils en ont payé les frais lors de leur passage au pouvoir. Ils en ont vu ailleurs, notamment en Egypte, les conséquences désastreuses.
Aujourd'hui, ils ont opté pour les outils sociaux et économiques pour concrétiser leur rêve d'islamisation de la société tunisienne. La motion économique et sociale adoptée à l'issue du dixième congrès, énonce ces outils qui sont, notamment, les finances islamiques, le fonds zakat et l'institution des awqaf. La nouveauté réside donc au niveau des modalités et non à celui des orientations qui restent strictement les mêmes.
-De toutes ces crises partisanes internes, le parti d'Afek Tounes semble en être, relativement, épargné. Etes-vous d'accord ?
Je pense que cela est dû à une homogénéité au niveau de ses cadres et de ses adhérents que l'on ne retrouve pas dans les autres partis. Afek Tounes a été, dès sa création, et reste encore un parti de cols blancs. Il est attractif, pour une frange de cadres administratifs et de petits bourgeois entrepreneurs, ce qui permet une stabilité interne mais c'est un parti qui n'arrive à s'élargir sur des franges populaires capables de lui assurer une assise électorale importante. C'est le dilemme auquel il doit faire face ; rester petit mais homogène et sans problème ou s'élargir et prendre les risques qui en découlent.
-Depuis leur prise de fonction au sein du Parlement, les blocs de l'opposition sont souvent critiqués pour leur rendement. L'opposition a t-elle été dévorée par la démocratie de la majorité ?
Il n'y a pas une opposition au sein du Parlement ; il y a des oppositions multiples au sein de l'Assemblée des représentants du peuple qui, souvent, trouvent des difficultés à travailler ensemble pour plusieurs raisons. Concernant le Front populaire, qui est la principale force d'opposition, je pense que, malgré l'hégémonie de la coalition gouvernementale, arrive à tirer son épingle du jeu puisqu'il a été l'initiateur de plusieurs opérations qui ont permis de bloquer des textes anticonstitutionnels.
Mais comme c'est une minorité, à un moment ou à un autre, ils doivent se plier à la loi de la majorité. L'expérience démocratique naissante ne permet pas, aujourd'hui, de penser à une opposition plus participative ni à une majorité plus respectueuse des droits des minorités politiques.
-Actuellement, nous vivons une grande polémique causée par la diffusion d'une caméra cachée qui fait croire à ses invités qu'ils sont en communication directe avec Ben Ali. Si l'on croit la bande-annonce, vous avez été parmi les concernés. Comment évaluez-vous ce concept ?
Le concept de la caméra cachée existe ailleurs et entre dans le cadre du divertissement. En Tunisie, il est intimement lié au mois du Ramadan et c'est adapté aux spécifiés tunisiennes. Je n'aimerais pas donner à une émission de divertissement un sens qui déborde son concept initial. C'est versé, je pense, dans la conspiration.
De toute façon, je ne pense pas que les producteurs de cette émission aient forcé leurs invités à venir ou à dire des propos contraires à leur conviction. A chacun de gérer son positionnement et son image comme il l'entend.
-Pour finir, la scène médiatique, tous supports confondus, semble connaître une crise d'éthique. Etes-vous de cet avis ?
Il faut relativiser: la crise d'éthique est une crise qui accompagne la profession journalistique d'une manière constante. Les journalistes se remettent en question tous les jours. De son côté, l'éthique n'est pas une ligne stable; elle est en mouvement en fonction de l'évolution de notre société. Ce qui est éthique à un moment donné devient immoral à un autre moment et vice versa. C'est pour cela que nous avons l'obligation de continuer sans relâche de poser la question éthique au sein de notre profession.
Bien entendu, il existe des dérapages, parfois, flagrants mais contrairement aux autres professions protectionnistes, notamment, les médecins, les avocats, les magistrats et les sécuritaires, les journalistes dévoilent, facilement, les écarts de conduite, les condamnent publiquement et les proposent aux débats publics. En ce sens, nous sommes avancés par rapport à plusieurs autres secteurs quant à la réflexion sur l'éthique et la déontologie.


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