L'Ordre national des avocats en Assemblée générale élective vient de désigner le nouveau bâtonnier Me Ameur Meherzi, bien connu pour son indépendance au niveau personnel, et ce, dès le premier tour, ce qui confirme le large consensus (ou « Attawafouk ») cher au cheikh Rached Ghannouchi !), qui fonctionne à fond la caisse depuis un certain « après-décembre » 2014 ! Nous serions plutôt tentés de dire : C'est tant mieux !... dans la mesure où le pays aspire plus que jamais à la stabilité institutionnelle et politique mais surtout celle des esprits ! L'accumulation des problèmes et des exigences depuis bientôt six ans a dégradé et éreinté tellement l'autorité de l'Etat, qu'il faudrait maintenant un vrai miracle pour faire en sorte que le pays redémarre avec une certaine discipline collective et individuelle. En effet, tout le monde s'estime « possesseur » de sa part d'Etat et tant pis pour M. John Locke et son « contrat social » quand il préconisait, déjà depuis 1689, que les citoyens doivent céder une part de leurs « droits » et intérêts personnels à l'Etat, pour permettre la vie collective et la jouissance paisible des droits restants. C'est là qu'intervient « l'Etat de Droit » ou cette transcendance de la loi qui permet à chacun d'observer les limites de ses compétences. Or, la « loi » comme la définit Carré de Malberg, est cette mesure « obligatoire et sanctionnée » et donc, opposable à tous, gouvernants et gouvernés faute de quoi elle est non-opérationnelle et l'Etat de droit devient une simple illusion pour ne pas dire une fiction tout court. Le « consensus » peut-être la bonne trouvaille et la bonne source pour exprimer le minimum vital et opérationnel de la « volonté générale » et populaire, comme la définit J.J.Rousseau, l'un de ceux qui ont inspiré la Révolution française de 1789,qui a quand même permis beaucoup de « greffes » non seulement en Europe, mais dans les pays méditerranéens comme l'Egypte , la Tunisie ou l'Algérie. Ce consensus peut symboliser aussi l'expression d'une « majorité » sans laquelle la démocratie n'existe pas, et même si elle est constitutionnellement codifiée, seul le « bloc majoritaire » permet la stabilisation du pays. Là encore, il faut faire la part des choses. Le « consensus » ne veut pas dire « alignement » au niveau des valeurs et des partis. Ennahdha n'est pas de ces « chats » qui ne chassent que pour le seul Bon Dieu ! Le Nida... aussi ! Leur majorité consensuelle, semble résister encore depuis l'après-décembre 2014... mais jusqu'où et jusqu'à quand !? Le véritable arbitrage c'est le rapport des forces et l'actuel consensus permet le positionnement des partis et des forces qui le composent en vue des « batailles » électorales qui s'annoncent à commencer par les municipales. Là, tout le monde joue gros et toute défaite ou revers sont interdits. Les forces démocratiques et de la modernisation en Turquie l'ont payé cash depuis 15 ans et M. Erdogan et son parti qui ont gagné les municipales turques, en 2003, ont le contrôle total (je n'ai pas dit... totalitaire) de la vie politique et institutionnelle de l'ancien califat. Il est vrai aussi et pour rendre à César ce qui est à César que notre ami « Taiep » s'avère être un grand et bon manœuvrier et son virage à 180 degrés avec Israël et surtout la Russie de Poutine, le prouve, après avoir frôlé la catastrophe et la perte de marchés énormes, avec Israël et avec la Russie ! Eh oui, chers amis (es), la politique c'est aussi les intérêts et pas seulement l'idéologie ! Pour revenir à nos préoccupations du moment, chez nous, le consensus qui devient pratiquement la technique politique de pointe, chez Ennahdha et le Nida (orthodoxe), peut faire bien des « laisser-pour compte » et autres dindons qui auront juste servi la « farce » sans en tirer profit au moins politiquement. D'abord, la gauche, qui s'embourbe dans cette marée de l'inquisition nationale et qui s'acharne contre la réconciliation nationale. Les mêmes erreurs donnent les mêmes effets. La gauche a opté à un moment donné pour « l'ordre » (désordre) populaire et la Rue, avec un pousse-pousse politique aux luttes syndicales excessives au niveau des mobilisations des grèves et du blocage de la production surtout dans les mines, et dans l'Education nationale. Du coup, elle a poussé l'opinion, la mort dans l'âme, à se rapprocher un peu plus d'Ennahdha et du Nida, car le pays est pratiquement au bord du gouffre et menace faillite, puisque l'investissement ne repart pas à la hausse et le climat des affaires est de plus en plus mauvais. Sachant que le capital est volatile et pour s'en convaincre jetez un coup d'œil sur l'énorme percée du Maroc frère, dans ces domaines, c'est une leçon d'opportunisme d'Etat ! Enfin, les Destouriens ! Comme le dit l'adage populaire : « Mettekla we madhmouma » (on aime bien la manger mais on la rejette). Cette force énorme, qui, au niveau des valeurs de la modernisation, de la lutte pour l'indépendance, et la construction de l'Etat national, est irremplaçable et constitue le corpus du tissu national identitaire spécifique, est, aujourd'hui, la composante politique la plus convoitée. Sans elle, rien ne se fait, même si elle a subi les contrecoups de l'exclusion avec la réémergence de BCE, et aujourd'hui, même avec lui, ce qui est le comble du paradoxe ! Allez comprendre ! L'élection du nouveau bâtonnier doit être une nouvelle leçon pour les vrais « Destouriens » qui savent comme leurs précurseurs dont Bourguiba leur leader incontesté, que : « Ma yendeblek illa dhafrek we ma yebkilek illa chafrek », et qu'on peut résumer par la nécessité de ne compter que sur soi-même d'abord ! Porter les plumes du dindon de la farce, n'a jamais été le propre de ce grand parti unique en Afrique et dans le Monde arabe. Etre une force d'appoint, pour quelques miettes de générosité, ça et là est indigne de ce grand mouvement qui doit relever la tête et être fier de son passé mais aussi de son futur proche. Les destouriens ont tout pour émerger à nouveau mais, à condition de ne plus s'étaler au plus offrant dans cet hyper marché politique. Alors, leur destin est entre leurs mains, à eux de le vouloir et de le dire à haute voix ! Le reste est affaire de temps ! K.G