La Tunisie se fait-elle rattraper par son recours répétitif aux solutions de facilité ! Après la tempête révolutionnaire, les premiers gouvernements ont dû se rabattre sur le recrutement massif dans la fonction publique. Il y avait péril en la demeure, et les syndicats ont dû user de toutes les pressions possibles pour canaliser la furie des demandeurs d'emploi et les diplômés chômeurs. Puis on entama un cycle quinquennal de revendications salariales, tambour battant, pour répondre aux exigences des classes moyennes et faire face à la baisse du pouvoir d'achat des travailleurs. De leur côté, les « islamistes » ne se sont pas mis à la traîne et ont opéré du temps de la « sainte » Troïka, quelque 100.000 recrutements dans la fonction publique (excusez du peu) au titre de régularisation et de dédommagements de leurs militants « réprimés » du temps de l'ancien régime. Tout cela se paie cash, en termes de finances publiques et la masse salariale est passée de 6 milliards de dinars en 2010 à plus de 16 milliards de dinars en 2016, soit la moitié du budget de l'Etat. Ce qui ne laisse que des miettes au développement des régions et aux investissements publics en général ; Autre solution de facilité préconisée et brandie par les syndicats et même par certains experts comptables (ça semble assez curieux), c'est l'augmentation des impôts et la pression fiscale. Au titre de la loi de finances 2017 on annonce quelques réajustements bien douloureux bien que jugés insuffisants par quelques experts zélés. Le tour de vis et la pression fiscale attendus en 2017 et suivants devraient, selon ces mêmes expertises faire récupérer à l'Etat quelques quinze mille milliards de nos millimes (15 milliards de dinars) de manque à gagner du fait de fraudes et autres évasions fiscales. Ceci n'est pas fait pour réjouir les milieux d'affaires, qui jugent que la pression fiscale est déjà très forte en Tunisie en comparaison avec d'autres pays émergents. En effet, depuis la nuit des temps on n'a pas trouvé de mieux que la « Dime » (10% des bénéfices et non du revenu ou du chiffre d'affaires S.V.P) pour encourager l'activité et remplir les caisses de l'Etat. La règle immuable et universelle c'est que « trop d'impôts tuent l'impôt ». Ronald Reagan, président républicain américain a réussi la meilleure performance américaine en matière de croissance et de créations d'emplois en diminuant les impôts sur les ménages et même sur les bénéfices des entrepreneurs. M. Obama a fait pratiquement la même chose et son bilan économique est fabuleux, puisque la croissance américaine ne cesse de progresser pour atteindre bientôt les 5% du PIB, du jamais vu depuis un demi-siècle ! M. Fadhel Abdelkefi, ministre tunisien de la Coopération internationale et du Développement, en est très conscient, et rien qu'avant-hier, à la télé, il préconisait d'autres solutions pour faire face aux exigences et nécessités budgétaires des finances publiques avec cette augmentation tentaculaire de la masse salariale dans la fonction publique et dérivés. Pour le ministre et pour trouver l'argent pour le développement, il faut encourager l'investissement national privé et étranger. Or, si la pression fiscale est exagérée et trop contraignante, l'argent ira ailleurs! D'où l'impasse! Or, la solution passe par « le juste milieu » (encore une fois la sagesse et le génie d'Aristote) ! D'abord, dépolitiser l'impôt au sens de ne pas en faire une épée de Damoclès sur la tête des promoteurs et des investisseurs. Puis, rationaliser l'impôt de manière à en élargir l'assiette mais sans en augmenter considérablement le volume. Toutes les rébellions nationales depuis Carthage, Rome et la dynastie husseinite, comme celle de Ali Ben Ghedhahom, à Kasserine, en 1864, ou la révolte des « Fréchiches » en 1906, ont été provoquées par l'impôt (à l'époque la « Mejba » ou impôt de capitation), et la sécheresse combinés ! Or, nous y sommes en pelin, malgré les quelques pluies bénéfiques enregistrées ces derniers jours. Les islamistes d'Ennahdha, n'ont pas d'ailleurs, tort de promettre pratiquement un impôt unique sur les bénéfices et les revenus de 10% (El Oochor ». Voilà qui nous ramène à la « dime » charaïque et celle de beaucoup de pays évolués en ce moment. En effet, rien ne sert d'opérer la pression fiscale à la « française », pour venir après, faire la chasse à l'évasion fiscale des promoteurs français en Suisse! Demandez au grand cinéaste et acteur français Gérard Depardieu, pourquoi il a émigré en Russie où il a obtenu la nationalité russe des mains du grand Vladimir Poutine! Demandez, aussi, à un joueur de tennis légendaire, allemand, comme Boris Becker, pourquoi il réside à Monaco et non pas en Allemagne! Les réponses sont connues il y a trop d'impôts en France et en Allemagne et les capitaux vont ailleurs. Tout cela mérite réflexion sereine et apaisée et bien loin des surenchères politiques et syndicales. Le ministre Fadhel Abdelkefi s'est déclaré optimiste! La Tunisie peut remonter la pente si on réussit à faire revenir les investisseurs (qui ont émigré pour la plupart au Maroc) et si les Tunisiens se remettent au travail ! C'est bien vrai que la situation actuelle ne doit pas être une fatalité. Mais, on revient à la même rengaine réchauffée et rediffusée depuis le gouvernement Mehdi Jomaâ sans succès véritable. Ça frise le disque laser bien rayé par la turpitude des Tunisiens qui sont depuis six ans, à la mode du « Harakiri » économique ! « Yefaâlou el jahilou binafsihi... mala yafaâlou al aâdouwou bi aâdaouwihi »... Eh oui, le dicton populaire de nos ancêtres: « l'ignorant se fait plus de mal à lui-même que l'ennemi à son propre ennemi » ! Finalement, cette situation n'est pas la responsabilité des seuls gouvernements mais aussi celle de ceux qui ont frappé la culture du travail au cœur. Même le Mufti de la République, le cheikh honorable, Othman Battikh, le reconnaît. Il a appelé à cesser les grèves et les sit-in et a demandé aux Tunisiennes et aux Tunisiens de se remettre au travail ! Amen ! La justice fiscale et sociale c'est aussi de ne pas punir et pénaliser ceux qui produisent et travaillent vraiment pour encourager les fainéants à se la couler douce ! K.G