Tous les Tunisiens s'attendaient à mieux de la part d'un chef du gouvernement qui avait fait ses preuves, sous l'ancien régime de Zine El Abidine Ben Ali et qui est considéré, à tort, comme un technocrate et un indépendant. Mais, hélas, il semble que les espoirs sont tombés à l'eau et que le gouvernement actuel patauge à vue, chaque ministre de son côté, sans coordination ni ligne directrice. Et on se demande quelle marge de manœuvre a le chef du gouvernement technocrate, avec un président de la République issu de la vieille école ? Depuis son arrivée à la tête du nouveau gouvernement, Habib Essid semble gérer la situation d'une manière qui laisse penser qu'il ne maîtrise rien et qu'il dépend des directives, avec un attentisme et une tendance à laisser pourrir les situation avant de trancher, tout en étant un piètre communicateur. Trop de problèmes qui risquent de peser lourd sur l'avenir du pays, alors que la classe politique s'enfonce dans ses dissensions de salonnards et que le peuple se lasse des promesses qui lui avaient été faites, concernant le développement, l'emploi , la démocratie, la justice et la sécurité. Certes, personne ne peut prétendre que le chef du gouvernement a une baguette magique pour faire avancer les choses. Toutefois, les hésitations du gouvernement actuel, après l'échec d'un grand nombre de ministres du gouvernement précédent, ont laissé peu d'espoir sur la possibilité que la situation va évoluer dans le bon sens et que le chef du gouvernement aura le courage de pousser les membres de l'Assemblée des représentants du peuple à lui donner les outils pour avancer, mais, M. Habib Essid se cantonne dans ses tranchées, attendant cette manne, tout en faisant des promesses qu'il est certain de ne pas pouvoir tenir, à l'état actuel des choses. Loin de nous l'idée de dénigrer le chef du gouvernement, mais le manque de charisme et d'aura, lors de son apparition sur les écrans de télévisions laissent beaucoup de personnes averties douter de ses nouvelles décisions. Cette communication qui nous manque Mauvais communicateur, en plus, M.Habib Essid n'a pas, souveznt, la suite dans les idées, dans ses messages au peuple et rares sont les fois où ses décisions ont été suuivies d'effet immédiat, pour répondre aux demandes urgentes et très empressées des citoyens qui croient, toujours, que le gouvernement est composé de sorciers capables de satisfaire ilolico presto à leurs doléances. A l'état actuel, le commun des mortels sait qu'il est le porte-courrier du président Essebsi qui polarise le pouvoir et qui est capable de donner la dynamique nécessaire pour impulser la roue de développement, là où il faut et, parfois au profit de certains secteurs aux dépens d'autres. Pourtant, c'est au gouvernement qui est sur le terrain que revient le rôle de choisir ses priorités. Parmi les multiples errements de ce gouvernement, le ratage qui vient d'être constaté, au niveau de la collecte de l'argent au profit du Fonds national de lutte contre le terrorisme dont la création avait été annoncée par le chef du gouvernement, en novembre 2015, après l'attentat qui avait coûté la vie à des membres de la garde présidentielle, au niveau de l'avenue Mohamed V, à Tunis. Près de cinq mois sont passés et les banques, ainsi que la poste tunisienne n'ont pu recueillir que la somme futile et insignifiante de 25 mille dinars. Il est malheureux de constater que les concernés n'ont pas fait la promotion nécessaire de ce fonds auprès de la population et le ministre des Finances, Slim Chaker l'a reconnu tacitement. Et c'est là une bavure de trop qui est, pratiquement, impardonnable, surtout que la Tunisie a un besoin urgent d'argent pour armer nos forces fa ce au terrorisme qui se propage, sans attendre. Le secteur du phosphate en perdition Il y a lieu de constater une situation opaque dans le pays, au niveau économique, avec des secteurs de production en pleine crise, notamment le tourisme, l'agriculture et la pêche, en plus de la confection, de l'habillement et des industries manufacturières, en plus d'un secteur du phosphate qui a subi des pertes nettes et un manque à gagner de près de 5 mille millions de dinars (MD), depuis l'année 2010, comme l'a affirmé le président directeur général de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) et du Groupe chimique tunisien (CGT) Romdhane Souid. Souid intervenait à l'ouverture des travaux d'un atelier de travail qui se tient les 5 et 6 mars 2016, sur le thème «La réalité et les perspectives du secteur du phosphate et des engrais», à l'usine de nitrate d'ammonium du GCT, en présence du ministre de l'énergie et des mines Mongi Marzouk. Il a précisé, par la même occasion, que la production de phosphate a régressé de près de 60%, atteignant en 2015 environ 3,2 millions de tonnes. Le niveau de la transformation a baissé également à 2,5 millions de tonnes ainsi que le transport des phosphates qui est passé de 7,3 millions de tonnes au cours de 2010 à 2,3 millions de tonnes en 2015. Le responsable a relevé que la CPG œuvre pour retrouver le rythme normal de la production, en vue d'atteindre huit millions de tonnes de phosphate commercial, réaliser les équilibres financiers de la CPG et poursuivre la réalisation des projets. Pour sa part, le ministre Mongi Marzouk a souligné l'impératif de faire un diagnostic de l'état des lieux du secteur du phosphate afin de formuler les recommandations pratiques et fixer les réformes devant aider à surmonter la situation difficile que connaît l'activité de production et de transformation du phosphate et engrais. Il semble que le ministre cherche midi à quatorze heures, surtout que le problème ne concerne pas, actuellement, la réforme de la CPG ou du GCT, mais d'ouvrir la voie à ce que ces deux entreprises fonctionnent, normalement, sans aucun obstacle ni mouvements sociaux qui bafouent la liberté de travailler qui est un droit des employés de ces deux entreprises nationales d'envergure. Face à cette situation dans ce secteur vital, le chef du gouvernement et ses ministres concernés n'ont pris aucune initiative pour mettre fin au chaos qui règne et aux multiples sit-ins, pourtant organisés par des poignées de sans-emplois. Les travailleurs, l'UGTT et les mouvements sociaux Face à la contestation sociale, Essid et le gouvernement n'ont jamais tranché. Ils ont fait semblant de tenir bon et laissé la situation pourrir, pour plier, par la suite, et satisfaire des revendications qui, le plus souvent, avaient été approuvées par l'autorité de tutelle, mais qui avaient tardé à être appliquées. Cet état de fait a affaibli le gouvernement et lui a fait perdre son prestige, tout en acculant le pays à l'endettement extérieur pour payer les salaires et satisfaire les revendications salariales. Il faut dire, aussi, que le gouvernement n'a pas été aidé par l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), le syndicat le plus important sur les quatre existant sur la place, qui approuve, toujours, les revendications de ses affiliés, dans la crainte de la menace qui pèse et selon laquelle les travailleurs le quittent pour adhérer à l'un des autres syndicats. Pourtant, il aurait été plus simple pour le chef du gouvernement de dire la vérité au peuple tunisien, surtout que le pays est sur la voie d'une faillite certaine, avec les problèmes auxquels il fait face. Il aurait, aussi, pu demander aux fonctionnaires de travailler davantage pour mériter les salaires qu'ils perçoivent, parce qu'actuellement et, selon un sondage, le fonctionnaire ne travaille que six minutes par jour (Avec nos excuses pour ceux qui travaillent vraiment et qui s'échinent au labeur). A ce magma s'ajoute la contrebande et le commerce parallèle qui sont à la base de la flambée des prix des produits de consommation et du déséquilibre des finances publiques, surtout que ces fléaux représentent presque la moitié des ressources économiques du pays. Certes, les travailleurs ont raison de demander des augmentations de salaires, surtout que, même ceux qui font partie de la classe moyenne, pourtant assez à l'aise dans le passé, n'arrivent plus à joindre les deux bouts. Mais que peuvent faire les chefs d'entreprises qui voient leurs revenus péricliter que ce soit à cause des grèves, ou de la nonchalance des travailleurs, de l'absence de débouchés pour leurs produits sur le marché local, le recul des exportations ou de la prédominance des produits importés illégalement dont les prix défient toute concurrence, mais qui peuvent être nocifs pour les consommateurs ? L'investissement et le Code qui se fait désirer Les problèmes économiques et sociaux ne cessent de s'amplifier, alors que l'ARP se dandine encore, sans que personne ne la pousse, pour que le nouveau code des investissements voit le jour. D'ailleurs, l'esquisse de ce Code est loin de faire l'unanimité en sa faveur et nombreux sont ceux qui dénigrent ce projet qui est considéré, pour la plupart, comme une entrave et un nouveau « terreau nécessaire à la corruption ». Pour Salah Amamou, expert-comptable et commissaire aux comptes, le projet du code de l'investissement, un scandale à dénoncer. Il juge que « le projet de code d'investissement avance doucement mais sûrement vers son adoption par l'assemblée des représentants du peuple et aucune personnalité politique, aucun économiste, aucun financier et aucun parti de l'opposition n'ont à ce jour dénoncé le scandale historique qui pointe à l'horizon au sujet de ce projet ». Il souligne qu'en 2013, « sous la troïka, un projet de code d'investissement de 74 articles a été présenté à la Constituante, un projet complet, bien structuré et qui reprenait, pratiquement, le code actuel avec certaines améliorations. Dès l'arrivée du nouveau gouvernement, le projet a été subitement retiré pour être remplacé quelques mois plus tard par un autre projet scandaleux, squelettique contenant 25 articles avec 4 articles "utiles". Mais utiles pour qui ? ... Dans ce nouveau projet, en lieu et place de l'automatisme des avantages fiscaux et financiers accordés aux investisseurs, il est créé un nouveau rouage, en l'occurrence la commission d'investissement, au sein du ministère du Développement et de la Coopération internationale, qui décidera souverainement "selon l'intérêt national que présente le projet d'investissement" de l'octroi ou du refus de ces avantages. A titre d'exemple, dans le code actuel (ou le premier projet de 2013), pour bénéficier des avantages liés aux projets de développement régional, il suffit d'établir une déclaration d'investissement à l'API sous réserve que l'administration exerce son droit de contrôle a posteriori pour s'assurer du respect par l'investisseur des conditions de son éligibilité alors que selon le code projeté, l'investisseur devra attendre la décision de la commission d'investissement et ensuite le décret y afférent pour bénéficier de ces avantages. Toutes les démocraties du monde, à commencer par la France, ont toujours opté pour cet automatisme d'abord et le contrôle ensuite. La Tunisie l'a fait, aussi, depuis la loi de 1972 sur les encouragements de l'investissement, alors qu'elle n'était pas encore une démocratie. Pourquoi ce retour à l'arbitraire ? A quoi jouent les initiateurs de ce code ? L'on sait que là où l'on crée une commission pour décider du sort des projets d'investissement, l'on crée aussi le terreau nécessaire à la corruption pour la laisser s'épanouir tranquillement, merveilleusement. Ce scandale n'a pas besoin d'être développé davantage. Pour l'intérêt de la Tunisie, il est à dénoncer sans délai avant qu'il ne soit trop tard ». Cela explique beaucoup de choses, surtout au niveau de la mainmise de l'ARP sur tous les nouveaux projets de loi, avec des députés qui s'engoncent dans leurs différends et cherchent, seulement, à régler leurs comptes partisans. Pourtant un Code des investissements clair et attrayant ne peut qu'aider à créer des emplois, dynamiser la vie sociale et remettre notre économie sur les rails. 1717 La politique étrangère du pays a fait quelques percées en rétablissant les relations avec la Syrie et en dynamisant celles que nous avons avec la Russie, mais les dérapages sont, encore, multiples. Sinon, comment expliquer notre consentement à classer le mouvement Hezbollah comme organisation terroriste, à contre-courant avec la volonté du peuple tunisien qui voit en ce mouvement un rempart contre l'expansion sioniste, aux dépens des Arabes et, surtout, de la cause palestinienne qui a été, de tous temps, la nôtre. Certes, on a donné des explications concernant la réunion des ministres de l'Intérieur des pays arabes, à Tunis, surtout qu'on a allégué que si nous avons refusé, les ministres de l'Intérieur arabe auraient quitté, mécontents, la Tunisie. Mais comment expliquer l'adhésion de la Tunisie à cette idée, durant la réunion des ministres des Affaires étrangères, au Caire ? Aujourd'hui, le tableau est noir, si on excepte la victoire contre les terroristes qui ont attaqué la ville paisible de Ben Guerdane, pour en faire un Emirat extrémiste et heureusement pour nous, cette tentative a échoué. La solidarité tunisienne s'est exprimée de belle manière, nous faisant oublier les hésitations et les vadrouilles de notre gouvernement. En parallèle, les défis sont multiples et ce n'est pas un chef du gouvernement « punching ball » qui peut gouverner un pays comme une barque sans voile. Dans tous les pays du monde, un chef du gouvernement doit anticiper, prévenir et prendre les devants, afin de trouver des solutions à tous les problèmes. Malheureusement, ce n'est pas le cas, chez nous, avec une direction politique tripolaire : un parlement qui s'embourbe, un chef du gouvernement qui ne dispose pas des prérogatives nécessaires et un président de la République qui tire les ficelles, sans en donner l'air. Selon des informations rapportées par la revue « Jeune Afrique », la nomination de Habib Essid comme chef de gouvernement a été suggérée au président Béji Caïd Essebsi, par Ridha Belhaj, alors directeur du cabinet présidentiel. L'hebdomadaire parisien généralement bien informé sur les arcanes du palais de Carthage dit aussi que le chef du gouvernement paraît « affaibli au sens propre comme au sens figuré ». Néanmoins son remplacement « n'est pas d'actualité » mais rien n'est « tabou ». ses débuts »,il se prépare à reprendre la main, notamment sur le plan économique, domaine pourtant réservé au chef du gouvernement. A l'état actuel des choses, en Tunisie, il n'y a pas de place pour les hésitations et les atermoiements, et le peuple tunisien qui a fait confiance à Nidaa Tounes pour le sortir de l'ornière attend mieux de nos politiciens et a besoin d'un chef de gouvernement fort qui prend les décisions les plus difficiles lorsqu'il le faut et quand il le faut, pour que vive la Tunisie, libre, démocratique et respectueuse des droits, même les plus élémentaires, des citoyens.