Certains chercheurs ont qualifié de « quatrième ère du marketing », celle de la fragmentation du marketing, de sa pensée, de ses thèmes de recherche comme de ses implications managériales. Moins qu'un appel au changement, cet ouvrage veut ainsi rendre compte de la fragmentation de cette discipline qui n'a plus réellement de logique dominante depuis l'effondrement du marketing dit kotlérien. Fragmentation qui conduit à voir quasiment apparaître une nouvelle « panacée marketing » chaque mois : nous avons ainsi recensé une centaine de ces panacées qui vont du guerrilla marketing au viral marketing en passant par l'expeditionary marketing et bien sur le marketing relationnel ; nous les avons ensuite catégorisées et réorganisées dans la généalogie présentée pour essayer de donner un sens à cet ensemble fragmenté qu'est le marketing aujourd'hui. Dans cet ouvrage, l'auteur , croit beaucoup au développement du Knowledge marketing et de ses dérivés. Il obligera le marketing à une véritable révolution, et j'espère pour une fois ne pas galvauder ce mot, si souvent utilisé pour des changements insignifiants en marketing. Alors que l'idée de connaissance du consommateur est centrale au marketing, elle n'est souvent comprise par les marketers que dans un sens restreint et manipulateur, selon moi : tout connaître sur le consommateur pour le satisfaire et ainsi le fidéliser. Rarement, l'idée que le consommateur ait des connaissances qui puissent être intéressantes pour l'entreprise est mise en avant. C'est pourtant de cela qu'il s'agit : le marketing, en quittant une position ‘fondamentaliste' vis-à-vis du consommateur, devra prendre en compte l'Autre, le consommateur, non en apprenant sur lui mais en apprenant de lui, de son expertise, de ses expériences… en mettant ainsi en jeu un type de pensée plus méditerranéenne qu'atlantique. D'où l'idée intéressante du Knowledge Marketing proposé récemment par Oleg Curbatov qui consiste à mobiliser et développer, à la fois, les compétences des consommateurs et des collaborateurs de l'entreprise impliqués dans le processus organisationnel de création conjointe des connaissances et qui rejoint ainsi les approches anglo-saxonnes dites de customer empowerment." La nouvelle définition du marketing : « le marketing est une fonction organisationnelle et un ensemble de processus visant à créer, à communiquer et à fournir une valeur destinée à des clients, de même qu'à gérer les relations avec ceux-ci de façon rentable pour l'entreprise et ses partie prenantes ». Si cette définition apporte une évolution certaine par rapport à la précédente datant des années 70, en misant davantage sur la relation client à long terme, en introduisant l'idée de valeur et en ajoutant une notion de rentabilité pour l'entreprise, elle reste cependant très frileuse quand au rôle du consommateur : ce dernier est toujours cantonné à un rôle de récipiendaire de l'offre et de la communication de l'entreprise. Si on s'intéresse à toutes les innovations ou panacées marketing produites aujourd'hui, tout cela avec un œil extérieur à la discipline, on peut trouver un coté presque indécent à vouloir à tout prix accoler certains termes totalement extérieurs au marché au mot marketing. Cela ressemble à un ensemble de tentatives pour maintenir le marketing sous perfusion de sang frais provenant de champs extérieurs au marché : l'accouplement métaphorique du marketing avec un terme laissant alors supposer que le marketing est capable de s'en emparer sans forcément en épouser les valeurs qui lui sont sous-jacentes. Ces tentatives semblent aller de pair avec la marchandisation de biens et valeurs demeurés jusque-là hors de la sphère marchande : le capitalisme pour se régénérer doit, en effet, puiser à l'extérieur de la sphère marchande ce que l'on peut appeler des gisements d'authenticité dans la société. Le cas de l'eco-marketing et de la marchandisation des produits issus de l'agriculture écologique est un bon exemple de ce fonctionnement en binôme marketing/capitalisme. Malheureusement, comme l'ont montré Boltanski et Chiapello, cela conduit à un seul et même résultat : un soupçon toujours plus étendu envers le marketing et le capitalisme. Le lot même de marché accouplé à une idée, un bien, une valeur… a ainsi pour effet de jeter un doute sur ces panacées marketing. Se repose alors non seulement le problème du changement de logique dominante de la discipline mais surtout celui de sa dénomination : pouvons-nous toujours parler de marketing quand l'action (-ing) recherchée se déroule dans la société et non seulement dans le marché.