Il y a 28 années, jour pour jour, soit le 4 Octobre 1985, le Conseil de Sécurité des Nations Unies avait adopté la résolution N° 573, par quatorze (14) voix et une abstention, celle des Etas Unies. La position américaine était historique à plus d'un titre dans la mesuré où c'était l'une des rares fois, voire la première fois, que l'administration américaine (sous le mandat de Ronald Reagan à l'époque) s'abstenait d'user de son droit de veto, de par son statut de membre permanent, contre une décision du Conseil de Sécurité condamnant l'entité sioniste. C'était une victoire diplomatique pour la Tunisie. Une victoire amer mais victoire quand même, qui reste dans les annales du Conseil de Sécurité. En effet, le Président Habib Bourguiba avait menacé de rompre les relations diplomatiques si les Etats Unis tentaient de bloquer le processus d'adoption de la résolution en question et d'opposer leur veto. Soucieux de conserver un allié traditionnel sans trop épingler l'entité sioniste, Ronald Reagan, contraint de reconsidérer la position initiale de son pays dont l'énoncé approuvait le raid sous prétexte de « légitime défense contre des actes de terrorisme », avait instruit la délégation américaine à New York d'en diluer au maximum le texte et de voter abstention, au grand dam de Tel Avis et du lobby juif américain, jugeant le texte « totalement inacceptable », en récusant « l'usage impropre des termes acte d'agression et acte d'agression armée ». Les Etats Unis avaient mis tout leur poids pour en atténuer le langage et le ton. Un compromis finalement accepté par tous les membres du Conseil de Sécurité. La lâche agression militaire, commise le 1er Octobre 1985, sous le nom de code « Jambe de bois », en représailles contre l'unité d'élite de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP), la Force 17, contre le quartier-général de l'OLP, situé à Hammam Chott, à la banlieue sud de Tunis, avait fait, selon les chiffres officiels annoncés par le gouvernement tunisien, 68 morts (50 palestinien et 18 tunisiens) et une centaine de blessés. Pour évaluer les dommages en termes humains et matériels, le gouvernement tunisien a mis sur pied une commission spéciale d'enquête dont le rapport final (127 pages) a estimé, outre le nombre total des victimes, que les dégâts matériels étaient de l'ordre d'environ 5,5 Millions de Dinars. Le texte de la résolution, âprement négocié, sans être à la mesure de la gravité de l'opération militaire, avait toutefois condamné l'attaque sans mentionner les palestiniens ni trop charger le coupable. Un langage édulcoré que les américains avaient imposé, en contre partie de son abstention. Sur un autre plan, aux termes de cette résolution, le texte avait demandé des compensations financières pour les préjudices humains et matériels subis par la Tunisie dont l'entité sioniste avait reconnu la responsabilité. Il y était précisé que la Tunisie « se réserve le droit de réclamer des dommages et intérêts pour violation de sa souveraineté et atteinte à son développement économique et social ». 28 années après, ce crime d'Etat a sombré dans l'impunité et l'oubli et le dispositif de la résolution est resté lettres mortes. Depuis cette date, aucun gouvernement tunisien n'a daigné rouvrir le dossier et revenir à la charge pour la pleine et entière mise en œuvre de cet acte solennel onusien de condamnation, notamment le volet portant sur les réparations. Les familles des victimes attendent encore de recouvrer leur droit, de récupérer leur dû et de faire reconnaitre le sacrifice de leurs enfants. Même après le 14 Janvier 2011, le pouvoir, pourtant issu des entrailles de la révolution, continue à faire passer sous silence ce pénible et non moins légitime dossier. Quant au Chef de l'Etat, M. Moncef Marzouki, au lieu de ferrailler contre l'Egypte, la Syrie ou la Corée du Nord, et de se draper de son habit de militant des Droits de l'Homme au détriment de la tunique de Président de la République, comme son mandat et sa fonction supposent, il aurait été plus inspiré, et certainement soutenu à bout de bras, s'il avait raclé les placards de Carthage pour remettre sur le tapis ce dossier et le mener à bon port. Il s'agit avant tout d'une question de souveraineté. A moins que sa religion et son cache-misère de prérogatives ne l'en aient dissuadé.