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Chronique, Le mot pour le dire : LETTRE D'OUTRE-TOMBE - L'ULTIME DISCOURS DE FEU CHOKRI BELAID
Publié dans Tunivisions le 12 - 03 - 2013

« Tous les hommes sont en quête d'un bien qui leur échappe, et le moins que j'en puisse penser est que personne ne peut dire qu'il l'atteignit. De ce bien, il m'a semblé qu'une sorte d'angoisse nous séparait et je l'ai pour cette raison désigné sous le nom de part maudite ».
Georges Bataille, Œuvres complètes, t. VII, pp. 471-472
I
Nous voilà, au bord de l'abîme, la main dans la main, le cœur battant de concert, scrutant l'inconnu qui, vers nous, agite son bras ! Magnanime ? « Qu'importe l'intention si le cœur y est ? », me murmure-tu à l'oreille de peur d'effaroucher le salut éloquent.
Debout, au bord de l'abîme, face au mystère grandiloquent, nous regardons déferler, dans le ciel incrédule, le cortège de monstres : succubes, incubes, princes et princesses des ténèbres, démons et pervers le fouet haut et la glotte déliée, âmes errantes dans les artères du monde là où, sans répit, s'active l'horreur et se déchaîne l'humaine bonhomie !
« N'est pas homme qui veut », nous crie le carnaval hallucinant, vautré dans le luxe du masque ! « Et qu'on ne me parle ni de transparence, ni de clairvoyance ; qu'on ne me parle surtout plus de sagesse ! J'ai beau rechercher, dans le cirque grotesque de vos gueules renfrognés, la moindre trace de l'homme, je n'y vois que la bête brute ricanant à gorge déployée, foulant de ses sabots sacrilèges le panthéon sublime d'où jaillit les Lumières ! ».
Ayant parlé ainsi, l'espace d'un soupir l'oracle se tait et nous livre au calvaire : la honte d'être ce que nous sommes, d'en être fiers, l'impossibilité de devenir ce que nous voulons être coûte que coûte, et de ne pas en être mortifiés ou déçus, de résister toujours à l'idée – Ô combien évidente ! – que la vermine, la plus sordide et la plus répugnante, ne vaut pas moins que le Narcisse le plus irrésistible ! Et de vous esclaffer jusqu'à l'épuisement dans le désert où s'use le vivant !
Car il n'y a de beauté que par rapport au vivant. Lui seul sait s'émerveiller dans le cristal d'un étang. Cela n'est que trop évident ! Le singe, cette troublante caricature de l'être, a-t-il seulement besoin de s'admirer dans un miroir ! Dirait-il de sa frimousse grimaçante qu'elle est belle ou laide ?! Et la mouche, plus méprisable qu'un crachat, cède-t-elle jamais au charme du rythme et du chant elle qui, à longueur de vie, n'arrête de tournoyer en bourdonnant ?
C'est donc chose normale que nous soyons là, face à l'abîme, dans l'éclat du matin qui commence à peine, fouillant du regard le précipice à nos pieds en quête d'un soupir qui oriente nos désirs et nos pas vers l'impossible salutaire : l'Eden où se prélasse la brute ou l'ange, peu importe ! Et si nous étions, dans la même enveloppe, l'un et l'autre, qu'est-ce que cela changerait au fait que nous soyons, de ce monde croulant, les maîtres incontestés ?!
Qu'avons-nous à faire, nous qui respirons l'homme jusqu'au bout des ongles, de tant de pantins grotesques et de tant de chimères ?
Pour être pleinement, pour prendre racine dans le terreau putride de l'univers, nous n'avons à tendre la main à personne, surtout pas aux ridicules silhouettes de l'éternelle tentation !
Que peuvent pour nous aujourd'hui les Dracula, cloîtrés dans les ténèbres, s'ils n'ont toujours pas l'envie de se produire sur la place inondée de soleil !
Un monstre qui ne mord que la nuit ne fait peur qu'aux ombres ! Pour terroriser le vivant, il faut que le monstre le surprenne là où il n'a pas de place !
Un soupir n'est rien peut-être, mais il suffit amplement à attiser le brasier qui consume l'âme du vivant ! Mais rien ne bouge dans la vallée, à perte de vue, étendue comme un tapis grandiose ou comme les ailes du Rock, incapable de décoller !
L'horreur n'est pas une chimère qui, fuyant le royaume tranquille du songe, déferle dans le monde, brandissant à pleines mains sa haine rutilante ! Sous le soleil flamboyant, en plein centre-ville, parmi les véhicules piaffant d'impatience et les piétons avançant à pas cadencés, l'horreur est là qui regarde impavide, un sourire narquois au coin des lèvres, la bêtise du vivant qu'aveugle son ardeur !
A-t-elle visage d'homme ? Ressemble-t-elle aux monstres aménagés par les effets spéciaux des illusionnistes et l'imagination débordante des faiseurs d'enfers ?
II
Et qu'est-ce l'horreur à mesure du vivant ? Nul besoin d'épuiser son zèle dans d'exténuants montages, il n'en résulterait que mirage. Tournez-vous seulement du côté du trottoir et regardez, sans détourner les yeux un seul instant, le petit chaton au pelage sombre, et à la queue sectionnée, par le caprice ou la cruauté, qui ouvre des yeux hagards sur le monde désolant et meurt d'envie de pouvoir lécher sa plaie purulente. A moins d'un pas de ce supplicié se tient une ombre loqueteuse et crasseuse qui clame, d'une voix caverneuse, sa misère. Le chaton, lui, tapi dans le froid glacial, ne pouvant parler, se contente de quelques larmes que personne, parmi les passants, ne voit !
Il y aurait toujours quelqu'un pour jurer son panthéon de divinités que la gueule de l'horreur est au-delà de tous les cauchemars !
Un autre prétendrait avoir aperçu ses crocs de suceur de sang, plus longs et plus affutés que ceux de tous les vampires qui ont défilé sur les écrans du monde ! Un autre enfin dirait, sans s'émouvoir, que le monstre ressemble à la vouivre ou à Barbe-bleue!
L'horreur a-t-elle visage d'homme ? « Question idiote que celle-ci, le savez-vous au moins ? ». A cette question, que l'horreur a vociférée à l'adresse du vivant, y a-t-il seulement de réponse possible ?
Y a-t-il seulement un refrain ou un râle que le récitant, dans le feu de sa fougue, puisse réussir ? Y a-t-il seulement un miracle qui, dans le fond de l'être, réconcilie l'ange et la brute ?
Nous nous regardons atterrés. Nous venons de comprendre que l'horreur méprise à ce point l'humain qu'elle ne daigne même pas emprunter son enveloppe charnelle pour se produire dans le monde ! C'est là sa manière de nous braver !


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