Décès : Nedra LABASSI    Jalel Ziadi : « 16.000 tunisiens ont inscrit la mention de donneur d'organe sur leur CIN »    Des feux de forêt ravagent la France et l'Espagne et causent un mort et plusieurs blessés    Sami Tahri réagit aux attaques du député Youssef Tarchoun    Création d'un consulat de Tunisie à Benghazi en Libye    A l'occasion du Mondial féminin : une délégation tunisienne au Royaume-Uni pour la promotion du rugby féminin    À la recherche d'un emploi ? L'ANETI est désormais entièrement en ligne    Snit et Sprols: vente par facilités et location-vente    Tawasol Group Holding annonce un exercice 2023 dans le rouge    Karim Nebli revient sur une plainte pour viol déposée par une touriste britannique à Sousse    Nafaâ Laribi : Abir Moussi ne peut plus bénéficier d'aucun recours    Moins d'inflation, mais des prix toujours en hausse !    Le ministre de l'Equipement accueille le nouveau bureau de l'Association tunisienne des routes    Création d'un consulat général de Tunisie à Benghazi    Météo : des températures jusqu'à 37 °C dans le sud !    Kaïs Saïed, Ahmed Jaouadi, mosquée Zitouna…Les 5 infos de la journée    Nafaa Baccari nommé directeur général de l'Agence nationale pour la maîtrise de l'énergie    Mouvement dans le corps des magistrats militaires    Tennis de table – Championnats d'Afrique (U19) : Wassim Essid médaillé d'or    Un conseil ministériel consacré à l'initiative de l'ESCWA relative à la conversion de la dette extérieure en investissements    Vague d'indignation après le retour ignoré d'Ahmed Jaouadi    Pharmacie, pétrole, douanes : l'Inde et la Suisse dans le viseur de Trump    Le Comité National Olympique accueille avec fierté Jaouadi    Reconnaissance de la Palestine: l'Italie pose ses conditions    La SFBT publie son 10ᵉ rapport ESG : performance, responsabilité et engagement durable    Ahmed Jaouadi rentre à Tunis sans accueil officiel    Orchestre du Bal de l'Opéra de Vienne au Festival d'El Jem 2025 : hommage magique pour les 200 ans de Strauss    Hajj 2026 : Une nouvelle aventure tunisienne au cœur de la Mecque    Le Théâtre National Tunisien ouvre un appel à candidatures pour la 12e promotion de l'Ecole de l'Acteur    Données personnelles, IA, caméras : ce que changerait la proposition de loi déposée au Parlement    Patrimoine arabe : la Mosquée Zitouna parmi les sites retenus par l'ALECSO    Météo en Tunisie : ciel clair, températures entre 29 et 34 degrés    De Douza Douza à Jey Men Rif : Balti fait résonner Hammamet    Des ministères plus réactifs que d'autres à la communication du président de la République    Un séisme de magnitude 5,7 secoue le sud de l'Iran    Visa USA : une caution financière de 15 000 dollars pour certains pays    Place Garibaldi et rue Victor Hugo : Sousse repense son centre-ville avec le projet Femmedina    Israël : Netanyahu envisage une occupation totale de Gaza, selon des fuites    Photo du jour - Ahmed Jaouadi, le repos du guerrier    Ahmed Jaouadi champion du monde à nouveau à Singapour dans la catégorie 1500 m NL (vidéo)    La Nuit des Chefs au Festival Carthage 2025 : la magie de la musique classique a fait vibrer les cœurs    Robyn Bennett enflamme Hammamet dans une soirée entre jazz, soul et humanité    Fierté tunisienne : Jaouadi champion du monde !    Au Tribunal administratif de Tunis    Najet Brahmi - La loi n°2025/14 portant réforme de quelques articles du code pénal: Jeu et enjeux?    Ces réfugiés espagnols en Tunisie très peu connus    Le Quai d'Orsay parle enfin de «terrorisme israélien»    Mohammed VI appelle à un dialogue franc avec l'Algérie    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Epicerie-Hypermarché, Poids lourd contre poids plume
Publié dans WMC actualités le 24 - 10 - 2009

Othman, enseignant de français, 42 ans et père de deux enfants descend de sa voiture en laissant le moteur tourner pour acheter son pain et 500 g de spaghettis. Il parle avec son épicier du résultat du match de football de la veille et part sans payer. Il fonctionne à crédit. Sa femme passera faire ses achats, en cas de besoin. Il a ses aises et ne s'en plaint pas. «Je ne mets plus les pieds dans les hypermarchés. Le problème des grandes surfaces, c'est qu'elles vous invitent à consommer. Vous y entrez pour une chose et vous en ressortez avec un caddie plein. C'est une des causes de l'endettement des ménages en Tunisie» explique t-il.
Longtemps considérée comme un garde manger, l'épicerie tunisienne s'est faite coiffée au poteau par le supermarché, puis depuis moins d'une décennie par l'hypermarché. Astucieux, humains, contraints ou volontaires, les épiciers ont dû apprendre à jongler avec les nouvelles attitudes des consommateurs. Ils ont appris à faire contre mauvaise fortune bon cœur. Ils s'adaptent et contre l'adversité essayent d'avancer groupés.
Peu à peu, les écriteaux «Pas de crédit» se sont mis à disparaître et l'accueil est devenu plus courtois. Dans les épiceries, on vous demande des nouvelles de la famille et du travail, on connaît les prénoms de vos enfants et l'on vous parle de la pluie et du beau temps.
Le célèbre comptoir d'antan, séparant le vendeur du client, est pour ainsi dire disparu. Il laisse la place à la superette. Une sorte de compromis entre l'épicerie et le supermarché miniature. Un espace, où vous déambulez et faites vos courses par vous-même. Ils sont désormais 264 mille épiciers qui opèrent en Tunisie, 84% d'entre eux se sont autofinancés.
Ceci n'empêchera pas les épiciers les plus «classiques» à s'accrocher à leur comptoir. «Il est pour ainsi dire le symbole de leur métier. Jamais je ne l'enlèverais. Cela fait longtemps qu'il est là. J'ai nourri et marié 4 enfants avec cette échoppe. Je refuse de faire tout et n'importe quoi. Je m'en tiens aux produits classiques d'épicerie que je connais et que je suis surtout autorisé à vendre. Mais je peux vous garantir qu'on ne peut plus gagner décemment sa vie ...La baraka est finie... » Parole de Am Mohamed, 64 ans, épicier depuis plus de 40 ans dans un quartier populaire dans la ville de Nabeul.
Un rapide petit tour dans la ville conforte en effet son témoignage. Am Mohamed est loin d'être le seul à être fatigué et désabusé. Au coin de sa rue, le marchand de fruits secs vend du yaourt et du lait. Anecdotique ? Pas si sûre ! Un peu plus loin, un autre s'est converti en agent immobilier. Il loue des maisons et fonctionne à la commission. Sur le mur de son minuscule point de vente, il colle des annonces immobilières avec descriptifs à l'appui.
"Tout et n'importe quoi"
Loin d'être aussi scrupuleux qu'Am Mohamed, certains épiciers d'une ville touristique comme Hammamet se sont mis à proposer tout et n'importe quoi. Ils proposent de la location de voiture ou vendent des stylos et des cahiers durant la rentrée scolaire. D'autres proposent des efferalgan pour les maux de tête, quand ce n'est pas une dame tatoo qui propose des tatouages à des touristes en mal d'exotisme.
Le sociologue Ridha Boukraa relève pour sa part une autre particularité: «Les épiciers ont souvent fonctionnés en réseau. Le réseau des Djerbiens a longuement investi l'univers de l'épicerie, allant même jusqu'à s'établir en France. Seules trois villes ont échappés à cette tendance : Sfax, Nabeul et Hammamet. Les communautés de ces villes ont effectivement développées des compétences commerciales sérieuses pour marquer le terrain. Aujourd'hui à Hammamet, ce sont les exodés qui s'installent et ouvrent des épiceries polyvalentes et non plus alimentaires».
Justement, LJ est épicier dans la ville touristique. Il opère dans un quartier résidentiel et ne sait plus sur quel pied danser. Découragé, il s'accroche à un métier qu'il a hérité de son père. Il ne sait pas faire autre chose. Des prévisions, il en fait et défait par centaines. Une chose est sûre, l'été toute sa marchandise s'écoulera. Au pire, ce sont les Algériens qui dévaliseront son magasin. Le tout est de tenir jusque là. «Je me débrouille plutôt pas mal mais je touche à tout. Dans ce quartier, je fais office de marchand de légumes, de fruits secs, d'épices, je vends les journaux, les cartes téléphoniques, l'harissa de ma mère et le pain tabouna de ma belle sœur ...Je fais même des sandwiches, tout en sachant que je n'en ai pas le droit. Je fais crédit et exploite ma femme, mes enfants, mes frères et mes neveux. Certaines périodes de l'année sont difficiles mais je résiste tant bien que mal. Je dois reconnaître que lorsque je vois mes clients rentrer de chez Carrefour ou Géant, je suis hors de moi. Font-ils vraiment des économies ? Ils y dépensent presque la moitié de leurs salaires et le regrettent pendant des jours entiers. A quoi cela sert-il de stocker quand on a des commerces de proximité ?» regrette t-il amèrement.
Loin d'être générale, cette tendance est spécifique à Tunis capitale et aux villes limitrophes telles que Nabeul, ou Bizerte, ...Les hypermarchés n'étant pas installés sur tout le territoire, les épiceries les plus touchées par la déferlante de l'hypermarché sont celles installées autour des quartiers d'El Menzeh, Manar, Carthage ou la Marsa... D'ailleurs, ces épiciers ne décolèrent pas. Ils en sont réduits à uniquement «répondre aux urgences» et leur volume d'affaires a été pulvérisé.
La loi interdisant aux hypermarchés de s'installer dans les agglomérations n'a été promulguée que depuis cinq ans. Bien longtemps après l'ouverture de «Carrefour» qui fait office «de l'une des affaires du siècle en Tunisie.».
Un rapide coup d'œil au parking bondé des deux hypermarchés de la capitale en fin de semaine est plus qu'édifiant. Il y a incontestablement foule. Durant les grandes occasions et les fêtes cela tourne à l'émeute, tellement il y a du monde. La veille de Ramadhan, des clients ont quasiment été conduits à la sortie. Des femmes se sont évanouies et les plus âgée d'entre elles se sont réfugiées devant les présentoirs frigorifiques pour se protéger de la canicule et des bousculades. La grogne était générale mais on a beau critiquer, on y retourne sans rechigner.
Il faut dire que la voiture populaire et l'amélioration du pouvoir d'achat des tunisiens provoquent chez le consommateur un engouement sans précédent pour la grande distribution. Ridha Boukraa précise que «les hypermarchés répondent à des besoins d'anonymat. L'absence de sociabilisation est un fait. Il s'exprime avec les caissières anonymes et les achats en auto-service».
Pour le moment, la crise et l'endettement poussent le consommateur à la prudence. Les ménages ont enregistrés de très fortes dépenses ce dernier trimestre. «J'évite vraiment de venir à l'hypermarché en ce moment. Les dépenses de l'été, de Ramadhan, de l'Aid et de la rentrée scolaire ont été terribles pour les portefeuilles.» déclare AB, 37 ans, pharmacienne. Son fils veut une nouvelle console de jeux pour son anniversaire. Elle le suit à contrecœur.
Si certains crient aux menaces de la grande distribution sur le commerce de proximité, d'autres temporisent. Outre le fait de considérer ces petits commerces comme un refuge pour les consommateurs, on peut y voir un important acteur de la chaîne sociale et économique du pays. Il convient de les préserver et valoriser leurs savoir-faire au risque de les voir disparaître peu à peu.
De nombreux métiers et petits commerces ont déjà disparus dans notre pays : le laitier, le vendeur d'eau, le «Robba vechia». Il convient de rester prudent pour qu'ils ne deviennent plus qu'une page d'histoire.
Lire aussi :
-Tunisie : Les hypermarchés sont-ils en train de cannibaliser les industriels et les commerçants de quartier ?
- Mohamed Kolsi, président du Conseil de la concurrence : «En amendant la loi, le législateur tunisien a voulu moraliser le secteur de la grande distribution»
- Tunisie : Radhi Meddeb, la grande distribution tire la qualité vers le haut
- Tunisie - Grande distribution - petits commerces: Fiscalité et pratiques peu catholiques!
- Interview imaginaire avec un hypermarché : «Si mes clients veulent du lablabi, je leur en servirais»
- Tunisie - Grande distribution : Une nouvelle loi et des mécanismes pour protéger les petits commerces


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.