Pendant des années, la médina de Mahdia souffrait de l'absence de collecte régulière des déchets ménagers. Aujourd'hui, grâce à une succession de programmes de coopération urbaine financés par l'Union européenne, le dépôt des ordures est devenu un réflexe pour les habitants, et le quartier s'est transformé. C'est devenu un réflexe pour les habitants de cette coquette médina ancestrale de la ville tunisienne de Mahdia. Tous les soirs, depuis près de deux ans, ils ont pris l'habitude de déposer, d'une manière régulière, les déchets ménagers devant leur domicile dans des sachets en prévision du passage des agents de la municipalité chargés de la collecte. Un geste ordinaire voire anodin de prime abord, mais qui a nécessité une action d'envergure et un budget de taille, dont la plus grande partie 120.000 euros a été financée par l'Union européenne. En fait, ce quartier de la ville arabe de Mahdia a, durant des années, souffert de l'absence de collecte régulière des déchets ménagers faute de matériel roulant adéquat. Car, l'architecture des ruelles érigées à l'époque des Fatimides est dotée d'un charme certain, mais ne permettait pas d'accueillir les véhicules utilisés par les services municipaux pour la collecte des déchets ménagers. L'histoire de la ville remonte au Xème siècle. Elle a été construite par le calife Fatimide, Obéid Allah El Mehdi, d'où le nom de la ville qui connut une période florissante sous son règne, époque à laquelle remonte la grande mosquée, qui fait la fierté des habitants de la ville. Toujours est-il que le quartier a été construit en forteresse, ce qui explique l'exiguïté des rues et la difficulté de répondre aux exigences de la vie moderne. Un travail de longue haleine Samir Gandoura, administrateur à l'Association de sauvegarde de la médina de Mahdia, explique que cette action a nécessité un travail de longue haleine, entrepris en partenariat avec l'Union européenne depuis 2004 dans le cadre d'une succession de programmes de coopération urbaine, axés sur le développement durable. La première étape a été franchie par le programme MED-ACT (2004-2006), avec un financement global de l'Union européenne s'élevant à 567.530 euros: «Nous étions confrontés à un problème d'enlèvement des déchets ménagers en raison de l'inadaptation du matériel disponible avec la configuration de la médina. En partenariat avec l'Union européenne, nous avons commencé par une étude pour diagnostiquer le contenu du couffin de la ménagère et également de la poubelle des habitants de la médina pour pouvoir entreprendre une action conforme à leurs besoins». «Les résultats ont démontré que 65% des déchets sont organiques, un chiffre élevé comparé aux déchets ménagers d'un Européen moyen. Nous avons donc acquis un matériel roulant spécifique, en mesure d'évoluer confortablement à travers les dédales de la médina et d'enlever régulièrement les ordures ménagères». Il a fallu sensibiliser les résidents afin qu'ils déposent à des heures fixes leurs déchets dans des sacs poubelles juste avant le passage de l'équipe de ramassage afin d'éviter que leur contenu ne soit déversé dans la rue une action pertinente, selon les responsables, qui mérite d'être actuellement consolidée. Quatre ans après la conclusion de cette phase du projet, c'est un bel exemple de la pérennité de l'action de l'Union européenne, se situant dans une vision de coopération de longue durée, qui permet par la suite aux administrations locales de s'approprier les bonnes pratiques. Les habitants de la médina vivent le résultat au quotidien. Mohamed Turki, employé dans une entreprise de fabrication de savon, est né au cur de cette médina il y a une cinquantaine d'années. Il habite dans un pavillon hérité de ses parents qu'il a retapé avec passion. «Ce quartier fait partie de notre patrimoine et je suis heureux que l'expérience de la collecte des déchets ménagers a réussi et a permis d'offrir, à nous et aux visiteurs, un aspect attrayant. Le dépôt du sachet des ordures ménagères est devenu pour nous un réflexe quotidien». Regardez comme c'est propre Cet avis est partagé par Mohamed Fraj, retraité de 75 ans. «J'ai vécu dans ce quartier que je connais parfaitement. Je peux vous affirmer que ce projet de ramassage des ordures est considéré à juste titre comme concluant et a permis d'embellir la médina. Regardez comme c'est propre», se réjouit-il en pointant du doigt une ruelle. À la suite de ce succès, d'autres projets financés par l'Union européenne ont pris le relais, notamment les projets SHAMS et GODEM, ce dernier dans le cadre du programme interrégional européen CIUDAD, qui vise à aider les administrations locales des pays du Voisinage à s'attaquer durablement aux problèmes de développement urbain, en encourageant la coopération entre les acteurs locaux et leurs homologues de l'UE. Le projet SHAMS financé à Mahdia à hauteur de 90.000 euros par l'UE dans le cadre du programme MED-PACT (contribution globale de l'UE de 600.000 ), le successeur de MED-ACT se rapporte aux déchets organiques émanant des jardins publics et autres, et leur recyclage en composte. M. Gandoura explique que ce projet est techniquement en bonne voie. Un jeune entrepreneur a créé une unité de compostage qui a donné un produit fiable, certificat d'expertise à l'appui émanant d'institutions universitaires. Cependant, il se heurte à une réticence des utilisateurs. Il est difficile de convaincre des agriculteurs habitués depuis des années à utiliser des engrais traditionnels à opter pour de nouvelles formules. «L'expérience sur le plan technique constitue une réussite. Nous sommes même en mesure d'offrir notre assistance à d'autres villes dans le cadre de la coopération. Mais je pense qu'une action de sensibilisation des utilisateurs est souhaitable». Le projet GODEM quant à lui évolue dans de bonnes conditions, avec un soutien de l'UE s'élevant à 492.000 euros. Il se rapporte à l'optimisation des déchets hôteliers de la région de Mahdia, de Sousse et de Djerba. Les conventions sont signées et l'on n'attend plus que le passage à la phase concrète, qui ne va pas tarder.