Le Club Africain a livré une prestation tout en générosité à Bizerte. Il rate des choses, mais il se bat et ne lâche rien ! A défaut d'avoir trouvé un fond de jeu et un équilibre tactique, le CA s'est forgé un caractère. Un onze agile, des joueurs qui ont du coffre, mais qui doivent aussi apprendre à temporiser et gérer leurs émotions, l'équipe clubiste a encore de la marge et des constantes à adopter. Cela dit, vu les standards actuels du CA, comme entrevu récemment, c'est déjà pas mal de suivre le plan tracé jusque-là (play-off et passage au carré d'as). Cependant, les Clubistes ont encore affiché pas mal de carences, notamment en défense et au milieu. Mais devant, le contrat est en passe d'être rempli avec des joueurs capables de remettre le CA sur les bons rails. La complémentarité entre Rusike et Khelifa, l'hyperactivité de Ghazi Ayadi, les montées et débordements de Kchok et Belkhiter, le tout adoubé à la paire Ben Yahia-Khlil au cœur du jeu, sans oublier la patte de Darragi, encore à court de compétition, mais ô combien précieux dans la distribution. Quand ce dernier recommencera à distiller ses caviars et à afficher sa complicité avec ses pairs axiaux, le CA aura une toute autre allure. Le CA de cette année avait surtout besoin d'un coup de fouet pour se remettre une nouvelle fois à l'endroit. Le remue-ménage opéré lors de la fenêtre des transferts d'hiver a ainsi remué l'équipe dans le bon sens, et ce, malgré le faux départ face à l'ESM du côté d'El Menzah. Pour revenir aux avant-postes, une remarque s'impose. Les deux avants nominaux clubistes ont plus d'une fois décroché à tour de rôle afin d'offrir des solutions offensives face au CAB. Mouvements d'ensemble, maîtrise collective et densité de groupe, le travail d'Ellili a payé jusque-là. Le constat est pratiquement le même en défense avec un axe retrouvé et des latéraux alertes et impliqués dans le jeu (courses-relais, dédoublements, permutations et retour rapide au charbon). A Bizerte, même si des maladresses ont été constatées, le CA a livré une prestation tout en générosité. Il rate des choses, mais il se bat, ne lâche rien ! Quand il faut presser, le CA ne se fait pas prier. Pas étonnant de le voir finir la soirée sur les rotules d'ailleurs ! Avec un Khelifa retrouvé, en passe de redevenir le fer de lance d'une équipe qui en avait bien besoin, le CA allie désormais puissance et vivacité. Pour un club qui a «galéré» la saison passée via un exercice délicat et un finish tragique en finale de la Coupe de Tunisie, c'est forcément une résurrection, mais pas un miracle pour un club qui n'a rien perdu de ses qualités. A l'image de cette percée magistrale de l'international zimbabwéen, Matthew Rusike, dans le camp adverse, le CA affiche son tonus et sa pèche même en abordant la seconde prolongation (endurance oblige). Cela dit, malgré certaines belles performances individuelles, Chiheb Ellili n'a retenu que la cohésion, l'alchimie, la sérénité et la détermination d'un onze au caractère bien trempé : «L'équipe s'est accrochée. L'envie et la motivation étaient là. Ils avaient faim...». C'est en quelque sorte la victoire du groupe. Eh oui, le football est un sport collectif même s'il s'agit la plupart du temps de mettre en place une initiative collective pour gommer les déséquilibres individuels. En clair, le sport-roi ne se limite pas à l'onctuosité des mouvements. Il a ses mystères et il faut savoir les apprécier. Sauf que dans le football comme partout ailleurs, ceux qui travaillent plus et surtout plus intelligemment sont ceux qui accomplissent le plus de choses ! A Bizerte, c'est un CA composé d'une majorité de joueurs «replacés» qui a accumulé de la confiance au fil du temps. Il a évolué avec des certitudes et avait même les armes pour s'imposer lors du temps réglementaire. Binômes complémentaires Ce n'est pas nécessairement une question de coaching, voire de bons choix de joueurs ou de complémentarité uniquement; pour le technicien clubiste, la tactique ne représente qu'une seule partie du tableau , mais ce n'est pas un coin du tableau ! Il faudrait plutôt l'imaginer telle une sorte de lumière qui saurait éclairer les couleurs et faire comprendre le sens de l'œuvre globale. Il faudrait la voir partout, mais à petites doses, savoir l'intégrer dans le discours comme Ellili s'y emploie d'ailleurs lors des répétitions. Bref, ce qui est intéressant ici, ce n'est pas la tactique en elle-même, c'est la compréhension du jeu. Car, nous autres puristes, écrivons beaucoup sur le football. Mais nous ne sommes pas des techniciens ! Nous parlons avec une posture d'observateur, pas de savant ou d'expert. D'où le danger qui en découle de faire des généralités et de parler de football dans son ensemble, dans sa globalité. Jusque-là et depuis le choc CAB-CA, l'on s'est beaucoup trop attardé sur les individualités au détriment d'une analyse des mouvements collectifs. Même en face, côté cabiste, l'on a par la suite préféré tout mettre sur le dos des soi-disant mauvaises performances offensives que de remettre en cause l'approche collective ou tactique d'ensemble. Pour le vainqueur, le CA, il peut de nouveau se montrer ambitieux. Il s'appuie sur des binômes complémentaires au niveau des trois lignes de jeu, son attaque flambe (la meilleure du championnat) et sa défense gagne en assurance. Les hommes de Chiheb Ellili n'ont certes pas tout corrigé, mais ils en ont montré assez pour effacer leurs sorties manquées, par le passé. Globalement, et à défaut d'avoir l'emprise, le CA prend les devants, garde la concentration lors des moments forts de l'adversaire, avant de reprendre l'ascendant assez rapidement. C'est forcément payant même si le destin aurait pu en décider autrement...