Certainement, leur vie a beaucoup changé depuis... Désormais, elles doivent apprendre à aimer ce corps amputé d'une partie qui représente leur féminité... Il a débarqué dans leur vie sans prévenir! Lorsque le médecin leur a annoncé la mauvaise nouvelle, elles ont vu toute leur vie s'écrouler en moins d'une seconde... Et pourtant, elles doivent rester fortes, faire preuve de courage et lutter contre ce monstre enfoui dans leurs corps. Mais elles doivent s'accrocher et rester en vie pour leurs conjoints, leurs enfants, leurs familles ! Trois femmes courageuses témoignent sur leur maladie... « Ma mère s'est éteinte l'année dernière suite à un cancer de poumon ! Encore sous le choc, ce foutu cancer s'en est pris à moi cette année, avec une seule différence : il s'agit d'un cancer du sein détecté il y a environ sept mois. J'étais enceinte d'une petite fille qui est âgée actuellement d'un mois et demi. Au cours de ma grossesse, j'ai découvert un nodule sous mon sein droit qui a rapidement commencé à se développer. Quand j'ai consulté ma gynécologue, elle ne l'a pas pris trop au sérieux, au début, pensant qu'il s'agissait juste d'une calcification mammaire. A cause de ma grossesse, la mammographie m'était interdite. Après mon accouchement, et après les examens (mammographie, échographie,biopsie...), le verdict vient de tomber ! Je souffre d'un cancer, non métastasé, mais il a fallu pratiquer une ablation totale du sein droit », se souvient Rym, une jeune maman âgée de 32 ans et qui vient d'être opérée dernièrement, à l'Institut Salah-Azaeiz. Et de continuer : «J'ai refusé de l'admettre au début : perdre mon sein, ce n'est pas possible ! J'ai perdu ma mère l'année dernière à cause d'un cancer, je me disais que cela ne peut pas se reproduire avec moi ! Je pensais à mes deux gosses, ma fille qui vient de naître. Je ne pourrai pas la porter dans mes bras et la bercer pendant plusieurs mois à cause de la fatigue. Elle sera privée de mon affection, de mon attention pendant toute la chimiothérapie.... Ma vie a été complètement bouleversée, non seulement la mienne, mais aussi celle de mon mari, de mes sœurs, de ma belle-mère.... Ma vie a pris un autre sens. J'ai ressenti une multitude d'émotions variant entre la peur, l'angoisse, l'espoir... Tout à la fois. Heureusement que mes sœurs, mon mari et ma belle-mère m'aident à avancer et à surmonter cette dure épreuve», ajoute Rym, souriante malgré la souffrance. Ce n'est qu'après l'opération qu'elle a subie que Rym a découvert un nouveau corps qui a été amputé d'un sein... « Je sentais ces tonnes de pansements qui ont pris la place de mon sein droit complètement parti ! Je voyais clairement mes côtes ! Et c'est horrible. Le cancer s' est attaqué à ma féminité et je ne sais pas après, si le port d'une prothèse me serait facile, si je peux me procurer de l'argent pour l'avoir... », confesse Rym en larmes. Cette jeune mariée et professeur d'éducation physique en chômage depuis plus de cinq ans, inquiète, ne sait pas encore quand est-ce qu'elle va quitter l'hôpital, si les résultats de son opération sont bons, si elle a remporté sa victoire contre sa maladie. Plusieurs questions tourmentent son esprit. Après son sein, elle a peur de perdre ses cheveux après les séances de chimiothérapie. «Je garderai le sourire tant que je suis en vie» Même cas pour Monia, 54 ans, qui partage la même chambre de Rym. Elle vient de sortir de la salle d'opération amputée du sein droit. Cette femme au foyer a passé toute sa vie à prendre soin de sa petite famille, puis du jour au lendemain, tout a changé ! «Mon calvaire a commencé un soir, le mois de juin dernier. J'avais senti des douleurs au niveau de mon sein droit, mais je n'ai pas accordé trop d'importance et ma gynécologue non plus car je venais de faire récemment une mammographie qui n'a rien révélé d'anormal. J'ai fait un examen de mammographie et les résultats étaient indemnes. L'ironie du sort : quand j'ai insisté pour refaire cet examen, la nouvelle est tombée comme un couperet. J'ai le cancer. J'ai aussitôt compris qu'il s'agissait de quelque chose de grave, qui va changer toute ma vie! La première chose à laquelle j'ai pensé sont mes enfants. Qui va désormais s'occuper d'eux durant mon absence ?Et si je ne gagnais pas cette guerre contre la maladie?.... Tellement de questions qui me taraudent tout le temps sans pouvoir trouver de réponses.. Pour sortir de cette spirale, j'ai fini par comprendre que je dois être forte, qu'il faut accepter la maladie, qu'il faut se battre. Ma famille et mes enfants ont besoin de moi et il est encore trop tôt pour partir et les laisser. Il faut tenir bon et faire face à la maladie... », explique Monia confiante. Et de renchérir : «Après tout, ce n'est pas ma féminité qui compte le plus. Je dois vivre pour ma famille. Si j'ai accepté de me faire amputer de ce sein, c'est parce que je n'arrivais plus à supporter toutes ces douleurs qui irradient de la nuque jusqu'à l'épaule, à cause de cette tumeur. J'ai pris mon courage à deux mains et j'ai demandé au médecin de m'amputer de ce sein malade. Voilà, après une opération qui a duré plus de quatre heures, je suis toujours en vie, et prête à partir en guerre pour faire face aux prochaines étapes. Je ne sais encore rien des résultats de l'opération, s'ils sont bons ou mauvais, je ne sais rien de ce que me réserve le futur. Mais je garderais toujours la tête haute, je serais souriante et confiante tant que je suis encore en vie. Il faut être fort dans ces moments-là pour pouvoir s'en sortir». Thouraya est « peut -être » plus chanceuse que Rym et Monia. Cette patiente, qui vient d'être opérée elle aussi d'un cancer, n'a pas perdu son sein. La taille de la tumeur qui se situait sur son sein gauche ne dépassait pas les deux centimètres et les médecins ont choisi juste de l'extraire. Cette maman de trois adolescents est venue d'une autre ville pour se soigner dans l'hôpital. Et la garde de ses enfants pendant son absence à été confiée à sa belle-mère. Cette femme de 45 ans a décidé de prendre son courage à deux mains et de combattre sa maladie sans perturber pour autant la vie de ses enfants. Elle a décidé de ne pas informer ses proches de sa maladie. «Avec le soutien de mon mari et de mes deux sœurs, je me sens plus forte pour mener la guerre contre le cancer que j'ai découvert le mois de mai dernier. Suite à des examens de routine, ma gynécologue a découvert une petite boule au niveau de mon sein gauche qui a nécessité une intervention chirurgicale. J'ai hâte de revenir chez moi pour reprendre le rythme normal de ma vie et prendre soin de mes enfants qui ont besoin de moi», nous confie-t-elle Certes, avoir un cancer de sein, ou n'importe quel autre cancer, est une expérience douloureuse à vivre et une épreuve très difficile à surmonter. Mais prendre son courage à deux mains pour combattre une maladie et réussir finalement à la vaincre est une épreuve qui nous apprend à apprécier la vraie valeur de la vie. Sous le signe du cancer Poème dédié aux enfants cancéreux de Gabès. Alitée depuis des mois, opérée pendant des heures, Epuisée par les chimio, sœurette, tu pleures. Tes mains cachent ton visage creux, Mais pas tes cris de douleur ! Ton foulard cache tes cheveux Disparus, mais pas ta maigreur ! Cherchant ses mots, ton père te regarde. Ton frère éploré questionne le médecin Ta mère laisse exploser sa colère hagarde : «Juste ciel ! Quel triste sort ! Notre destin Est-il de voir mourir nos chers enfants, Un à un, à cause de la pollution ?» Chaïma Rguigui, élève en 4e année lettres au lycée de Métouia (gouvernorat de Gabès)