Grâce à cette convention, l'entrée en vigueur de la loi organique 58/2017 sur la lutte contre toute forme de violence à l'égard des femmes et des filles, prévue pour le mois prochain, aurait toutes les chances d'une application infaillible et immédiate Les ministres de la Femme, de la Famille et de l'Enfance, de la Justice, de l'Intérieur, de la Santé publique et des Affaires sociales, de la Solidarité et des Tunisiens à l'étranger ont signé, hier à Tunis, la convention multisectorielle de prise en charge des femmes victimes de violence. Il s'agit de l'ultime composante d'un projet pilote dont les préparatifs ont été entamés en 2014. Ce projet consiste en la mise en place des mécanismes, des programmes et des outils indispensables à la prise en charge intégrale des femmes victimes de violence. Concocté grâce à l'appui de différentes organisations nationales et internationales, à savoir le Fonds des Nations unies pour la population (Fnuap), l'Instance des Nations unies pour l'égalité de genre et l'autonomisation des femmes (Onu Femmes) et l'Office national de la famille et de la population (Onfp), ce projet a permis l'instauration d'un mécanisme de référence, notamment le Centre pilote de prise en charge psychologique des femmes victimes de violence. La présente convention sera l'assise principale permettant une meilleure coordination multisectorielle entre les différentes institutions concernées, d'une part, et entre ces mêmes institutions et la société civile, de l'autre. Grâce à cette convention, l'entrée en vigueur de la loi organique 58/2017 sur la lutte contre toute forme de violence à l'égard des femmes et des filles prévue pour le mois prochain aurait toutes les chances d'une application infaillible et immédiate. Honorer les engagements nationaux M. Ghazi Jeribi, ministre de la Justice, a indiqué que la violence à l'égard des femmes ne peut être considérée comme un phénomène social à part entière. Les efforts fournis et autres, projetés dans le cadre de la présente convention, seront investis afin d'éviter une évolution positive de cette atteinte à la dignité physique et morale des femmes. Les fondements juridiques multisectoriels et les mécanismes établis à cet effet ne manquent pas, ce qui incite à l'action et à la coordination des interventions de tous. S'agissant des protocoles relevant du secteur juridique, le ministre a rappelé la généralisation desdits protocoles au niveau des tribunaux. «Ce travail s'inscrit dans le cadre de la concrétisation de l'article 46 de la Constitution, lequel responsabilise l'Etat quant à la protection des acquis de la femme. D'autant plus que la loi organique 58/2017 garantit à toutes les femmes le droit à la dignité et à l'égalité; deux piliers juridiques et constitutionnels qui ne demandent qu'à être appliqués», a-t-il indiqué. Violence de genre : un problème de santé publique De son côté, M. Imed Hammami, ministre de la Santé publique, a qualifié la présente convention de couronnement d'un travail de concertation et de coordination multisectorielles, visant la mise en application et de la loi organique 58/2017 et des différents protocoles sectoriels spécifiques. Il a rappelé le rôle crucial que joue le ministère de la Santé dans la préservation et l'amélioration des indicateurs relatifs à la santé maternelle et infantile. La remise de certificats médicaux justifiant la violence infligée aux victimes et la mise à la disposition de ces dernières des services appropriés et ce, depuis l'accueil jusqu'à la finalisation du dossier juridique, confèrent à la mission du système de santé publique une importance majeure dans la lutte contre la violence de genre. D'autant plus que l'instauration du Centre pilote de prise en charge psychologique des femmes victimes de violence de Ben Arous figure parmi les réalisations référentielles dans ce domaine. «La présente convention promet de donner plus d'élan à une mission commune aux institutions signataires», a-t-il conclu. La cohésion sociale comme cheval de bataille Prenant la parole à son tour, M. Mohamed Trabelsi, ministre des Affaires sociales, de la Solidarité et des Tunisiens à l'étranger, a ravivé la mémoire de l'assistance sur l'engagement de la Tunisie pour la protection des femmes contre la violence sur fond de genre. Après l'adoption de la Convention internationale de lutte contre toute forme de violence à l'égard des femmes, la Tunisie établit une convention multisectorielle dans le but de protéger et de préserver les droits humains des femmes. Pour ce qui est du ministère des Affaires sociales, de la Solidarité et des Tunisiens à l'étranger, l'implication dans la garantie de la paix sociale remonte aux années 90. En effet, pour ce qui est de la protection de l'enfance, le ministère compte sur l'application de l'Institut national de protection de l'enfance (Anpe) ainsi que des 23 centres d'encadrement et d'orientation sociale au profit des enfants sans soutien familial. Les personnes démunies et sans soutien familial sont prises en charge par l'Etat et ce, dans des unités de vie conçues à cet effet. De même pour les enfants en situation de handicap. Le ministre a rappelé la création, en 2014, d'une nouvelle fonction, celle du réconciliateur familial dont l'apport en matière de préservation de l'harmonie familiale et sociale s'avère être de taille. En 2015, le ministère a lancé une nouvelle expérience qui tend à être généralisée : le Samu social avait vu le jour grâce à la coordination entre le ministère de tutelle et les ministères de la Justice, de la Santé publique et de la Femme, de la Famille et de l'Enfance. Sécurité : unités spécialisées contre la violence de genre Prenant la parole, Mme Ahlem Kharbech, porte-parole du ministre de l'Intérieur, a indiqué que le ministère de l'Intérieur s'applique au renforcement des brigades par des unités féminines spécialisées dans la prévention de la violence, la protection des femmes victimes de violence ainsi que dans les procédures juridiques appropriées. Ces unités entameront leur mission suite à l'entrée en vigueur de la loi organique 58/2017. Par ailleurs, des fiches techniques ont été réalisées afin de clarifier l'approche à adopter pour assurer la protection des femmes victimes de violence. Le protocole spécifique au ministère de l'Intérieur a permis, en outre, d'orienter les intervenants dans l'optique d'améliorer les conditions d'accueil des femmes victimes de violence, dans le respect du principe de neutralité. Vers une stratégie nationale de la famille De son côté, Mme Naziha Laâbidi, ministre de la Femme, de la Famille et de l'Enfance, a tenu à remercier tous les partenaires qui se sont mobilisés pour mettre en place la stratégie nationale de lutte contre la violence à l'égard des femmes. Le ministère de la Femme vient, en effet, de finaliser plusieurs plans d'action, servant la réalisation des objectifs de la stratégie. Elle a indiqué, non sans fierté, que la Tunisie a été le seul pays non européen à signer la convention de Lanzarote sur la lutte contre la violence sexuelle à l'égard des enfants. La ministre a attiré l'attention sur les projets sur lesquels s'active le ministère, dont la réalisation d'un cahier des charges spécifique aux centres d'hébergement et de prise en charge des femmes victimes de violence, l'élaboration d'une stratégie nationale de la famille et la valorisation du rôle paternel en optant pour le slogan «Pour une paternité positive».