• La littérature tunisienne d'expression arabe ou française augure d'un avenir prometteur. Encore faut-il que les éditeurs suivent le mouvement en faisant preuve de plus d'audace Pour célébrer la parution du 39e numéro de la revue Banipal, publication anglophone de littérature arabe contemporaine, numéro entièrement consacré à des extraits de la littérature tunisienne moderne, traduits en anglais, le Centre national de traduction qui a soutenu la publication de ce numéro, a organisé une rencontre avec l'intellectuel irakien, Samuel Shimon, une rencontre à laquelle ont pris part plusieurs hommes de lettres et intellectuels tunisiens, ainsi que les médias, au siège de la Bibliothèque nationale. Le nom Banipal lui a été choisi par son fondateur en 1998 du nom d'Ashurbanipal, dernier grand roi d'Assyrie et patron des arts dont l'immense réalisation fut de créer à Ninive, siège de sa capitale, la première bibliothèque du Moyen-Orient où circulaient les fameuses tablettes rédigées en sumérien, babylonien et assyrien, ainsi que l'épopée de Gilgamesh, l'œuvre maîtresse de la Mésopotamie. Présenté par le Pr Mohamed Mahjoub, directeur du Centre national de traduction, comme authentique militant intellectuel qui, depuis de nombreuses années, œuvre inlassablement à divulguer et faire connaître la littérature arabe en Occident par le biais de sa publication qu'il dirige avec la collaboration de son épouse Margaret Obank, Samuel Shimon a remarquablement réussi à mieux faire connaître la littérature arabe contemporaine et à l'imposer dans un Occident qui nous a «toujours refusé le droit à la parole pour défendre nos valeurs et notre point de vue, sous prétexte qu'il (l'Occident) est le mieux outillé à le faire à notre place». Le directeur du CNT a, par ailleurs, ajouté que la vraie problématique du hijab n'est pas celle que l'on croit, mais plutôt celle qui consiste à «voiler» la réalité et à occulter et passer sous silence les magnifiques réalisations et les remarquables réussites qui se font jour partout dans notre monde arabe. Dans ce contexte, nous nous devons, a poursuivi M. Mohamed Mahjoub, de combler cette lacune en étoffant la traduction dans les langues européennes de nos ouvrages. «Nous avons traduit jusqu'ici une vingtaine de titres et à l'orée de 2015, nous allons porter ce chiffre à 70, et ce, malgré nos moyens assez limités». Dans son intervention, Samuel Shimon, qui est également écrivain puisqu'il a écrit en arabe un roman autobiographique Un Irakien à Paris traduit en français et paru chez Actes Sud en avril 2008, a tenu à rappeler que le n° 39 du magazine londonien Banipal est sorti en octobre 2010 et a été présenté pour la première fois à la Foire du livre de Francfort à l'occasion d'une table ronde autour de la littérature tunisienne moderne. Il a précisé qu'il a découvert ladite littérature il y a un peu plus de trente ans suite à un pur effet du hasard. C'est justement cette découverte qui lui a fait changer de vocation car il se prédestinait à une carrière de cinéaste. Peut-on dans ce cas avancer le fait que ce sont nos poètes et romanciers tunisiens qui lui ont ouvert la voie des belles lettres ? En tout cas, Samuel Shimon connaissait mieux Chabbi, Douagi, Mustapha et Béchir Khraïef et Mahmoud Messaâdi bien plus que certains écrivains d'Irak ou du Moyen-Orient. Plus tard, il a eu à connaître les écrivains de la nouvelle génération celle de l'indépendance et des contemporains: Tahar Bekri, Jaâfar Majed, Faouzia Zouari, Adam Moussa, Noura Ben Saâd, Ezzeddine Madani et Mansour M'henni. En ce qui concerne l'absence de nos hommes de plume sur la scène internationale, l'écrivain de Bagdad impute ce phénomène au manque d'audace et à la tiédeur des initiatives de nos maisons d'édition dans la prise de contacts avec leurs consœurs américaines ou européennes. Faudrait-il qu'on attende un second Samuel Shimon pour qu'un panorama de notre littérature voie enfin le jour et qu'un nouveau Naguib Mahfouz ou un Gébrane Khalyl Gébrane bien de chez nous perce les lueurs de cette longue nuit du roman tunisien ? Toujours est-il que Samuel Shimon a pris sur lui la promesse d'éditer un autre aperçu significatif de notre littérature en mars 2012.