Pendant deux décennies, on s'est servi du sport comme moyen de propagande. Par ailleurs, trop de football nuit au sport roi... A l'heure où la Tunisie ouvre une nouvelle page de son histoire, il y a lieu de repenser la stratégie de la gestion d'un secteur dont on s'est servi comme moyen de propagande, à savoir le sport. La mainmise de l'Etat sur le sport a fini par l'asphyxier. Quand les résultats allaient, les défaillances étaient masquées, particulièrement en football. On a beau instaurer le professionnalisme, en vérité, ce n'était qu'un professionnalisme de façade. Exception faite de l'instauration de contrats pour les footballeurs, la gestion de nos clubs est demeurée amateur, avec à la clé une mainmise de l'Etat qui nommait directement les présidents des associations et des fédérations sportives. Le tout sur fond d'assemblées générales dites électives. Le dénouement est le même : une élection à l'unanimité avec des mains qui se lèvent désignant un président proche des rouages de l'Etat. Du coup, le financement des associations sportives est resté amateur. Les budgets des clubs reposaient essentiellement sur les subventions gouvernementales, le sponsoring et les recettes modestes de la billetterie, à l'exception des quatre grands clubs. Les présidents des associations, en se présentant comme principaux pourvoyeurs, s'occupaient de promouvoir leur image, tout en bénéficiant de relations privilégiées avec les autorités locales et régionales. Les guignols des assemblées Pour mieux cerner la gestion amateur, il suffit de rappeler comment se tiennent les assemblées de nos associations sportives. Des assemblées dont l'apparence donne lieu à un meeting accordant à l'assistance une certaine marge de liberté. Une marge scrupuleusement surveillée par le gouverneur de la région dont dépend l'association en question. Et dans chaque club, il y a toujours une ou deux interventions de supporters fantoches pour amuser la galerie. Le scénario se répète partout. En président des assises, tout bon gouverneur entame son discours par une allocution dans laquelle il tient à rappeler la fameuse sollicitude de l'ex-chef de l'Etat au sport et aux sportifs. Le gouverneur de Tunis avait son approche. A chaque assemblée, la même formule faisant ou voulant faire croire la sollicitude particulière du président de la République aux habitants de la région et particulièrement à leur club, promettant, le cas échéant, des mesures d'urgence pour améliorer l'infrastructure sportive. Un dossier suivi par le chef de l'Etat en personne. Ce faisant, l'Avenir Sportif de La Marsa a longuement souffert de cette manipulation avec une rénovation du stade Abdelaziz-Chtioui qui n'a jamais eu lieu. En sport comme dans tous les autres domaines, les responsables politiques ont toujours cultivé le culte du président déchu. "L'hyper-président", c'est une invention tunisienne et non pas française. Sociétés sportives Pour mettre fin à toutes ces irrégularités, il est impératif d'effectuer une mise à niveau profonde du secteur du sport. Les associations sportives ont tout intérêt à changer de statuts en devenant des sociétés sportives. Un statut qui permettra à nos clubs de se doter de propriétés, d'activités commerciales, d'acheter ou de vendre des actions, leur permettant des revenus fixes. La légalisation des émoluments des entraîneurs et des joueurs, le payement des impôts, la couverture sociale ou l'assurance compléteraient le système financier sportif.