Par Moufida BOUABID L'université tunisienne, à l'instar des autres universités du monde, souffre de plusieurs imperfections qui entravent son développement. En effet, l'un des problèmes les plus épineux est la non-adéquation de la formation théorique et de la formation pratique. L'étudiant est soumis à des cours magistraux et aux travaux dirigés et rarement il effectue des stages d'initiation dans les entreprises ou dans les administrations pour compléter sa formation. On se demande, d'ailleurs, pourquoi on continue à le soumettre à ce type d'enseignement, souvent sans lien avec l'environnement sur lequel l'université devrait, normalement, s'ouvrir. Une fois diplômé, il trouve d'énormes difficultés à s'insérer dans le marché de l'emploi, dépourvu qu'il est de la maîtrise des moyens de production et des outils d'insertion, faute d'avoir effectué des stages au cours de son cursus universitaire. Les employeurs préfèrent recruter des jeunes diplômés opérationnels et rechignent à offrir des postes à des personnes n'ayant aucune expérience de terrain. Autre problème et qui n'est pas des moindres, c'est l'inadéquation de l'offre et de la demande. Le nombre de diplômés s'allonge d'année en année et l'on compte, aujourd'hui, plus de 150.000 jeunes diplômés au chômage. Cette situation fait que la quête d'un emploi est devenue une véritable sinécure pour des jeunes souvent désorientés et sans soutien. L'Etat est incapable de satisfaire toutes les demandes et les rares concours, dont le fameux Capes, drainent des milliers de jeunes avec l'espoir d'un succès qui n'arrive pas. A leur tour, les entreprises n'offrent pas beaucoup d'alternatives malgré le faible taux d'encadrement. La Révolution du 14 janvier, si elle a permis de lever le voile sur les difficultés réelles du marché de l'emploi, ne pourra pas apporter des solutions immédiates à tous les maux de l'université ni au phénomène du chômage des jeunes. Il faudrait à mon sens agir sur les mentalités pour pouvoir changer de vision et d'option. D'abord, l'université doit se restructurer pour mieux s'adapter aux évolutions en cours avec moins de théorie et plus de pratique. Cela dépend de la volonté de tout le monde, ministère, responsables, enseignants et étudiants, mais aussi des responsables des entreprises qui doivent conclure des accords de partenariat avec les universités pour une meilleure interaction entre le monde universitaire et le marché de l'emploi. A leur tour, les étudiants sont appelés à plus d'application dans leurs études. Ils doivent avoir un esprit d'initiative et non se contenter d'être de simples consommateurs de savoir. Ils sont également appelés à prendre des initiatives, à faire des propositions et à aller chercher eux-mêmes des offres de stages dans les entreprises et non se contenter de voir venir. D'un autre côté, la multiplication des filières et des disciplines n'a pas eu l'effet escompté ni au niveau de l'amélioration de la qualité de l'enseignement ni au niveau de l'employabilité. C'est pourquoi, il faudrait repenser le système d'enseignement pour le rendre plus performant. Le nouvel esprit engendré par la révolution doit se répercuter sur les rapports entre les différents membres de la famille universitaire, c'est-à-dire l'administration, les enseignants et les étudiants. Il faut inculquer chez l'étudiant l'esprit d'innovation et d'entrepreneuriat et le préparer à bien compter sur soi pour pouvoir appréhender l'avenir avec beaucoup d'espoir.