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De «l'applicabilité» de l'article 38 de la Constitution!
OPINIONS
Publié dans La Presse de Tunisie le 18 - 04 - 2011


Par Abou-Séoud Messadi
Adoptée le 1er juin 1959, et depuis plus d'un demi-siècle, la Constitution tunisienne, censée être en vigueur aujourd'hui, a fait l'objet de modifications sur presque soixante pour cent de ses dispositions à quinze reprises dont sept du temps de Bourguiba (32 ans) et huit après (23 ans)! C'est dire l'importance accordée à ce texte par les uns et surtout les autres.
Mais outre ces remarques préliminaires, nous nous arrêterons sur une disposition de la plus haute importance, parce qu'elle a introduit le régime présidentiel qui a prévalu depuis 1957, régime que beaucoup de Tunisiens veulent exclure aujourd'hui.
L'article 37 ouvre le chapitre réservé au pouvoir présidentiel. Il stipule que ce pouvoir  "est exercé par le président de la République."Et c'est là le principe générateur de ce qui suivra dans la Constitution.
Ainsi, et tout de suite après, il y a l'article qui ouvre la première section de ce chapitre, c'est l'article 38, qui définit ce que c'est un président de la République, d'où son importance capitale et ce qui  lui vaut la présente analyse.
Cet article dispose, en définition de ce que c'est le président de la République : "Le président de la République  est le chef de l'Etat. Sa religion est l'Islam."
La brièveté et la simplicité de cet article n'en posent pas moins des difficultés que nos futurs constituants doivent absolument  éviter pour éviter les dérapages dans l'exercice des pouvoirs.
En effet, si le premier élément de la définition ne pose pas de problème autre que cette connotation autoritariste, paternaliste, un tant soit peu, impérieuse-impériale : c'est "le chef de l'Etat" !
Au vingt et unième siècle, l'Etat, avec ses multiples composantes, à la recherche chacune d'une autonomie grandissante, n'obéit plus à la définition des 17ème et 18e siècles. Et il ne peut y avoir un chef à toutes ces composantes ni à la complexité de l'unité qu'elles forment. Et prenez simplement un petit exemple : le rôle de chef de famille n'est-il pas aujourd'hui quasiment dissous entre la mère et le père? Et plus nous naviguons dans les autres sphères de la société, plus nous trouverons des preuves que cette haute échelle de la hiérarchie tend de plus en plus à s'estomper.
Donc cette dénomination, étymologiquement "tribale", d'un autre temps, doit simplement disparaître du futur texte suprême au profit de l'appellation de "président de la République", parce que  justement la République suppose à la base une "non-unité " par le simple jeu de la majorité/minorité qui se doit le respect mutuel.
Venons-en maintenant au deuxième élément de l'article portant cette définition. Et à vrai dire, il est très difficile de le qualifier d'élément de définition, car l'article est censé définir le rôle du président de la République, or ce que stipule le texte n'est qu'une description: "sa religion est l'Islam", description et de la personne et de sa religion, et sans aucune relation avec ses tâches!
De l'application de la condition de religion
Mais si l'on venait à l'application de cette condition de la religion, voici à quoi nous aboutirions pour les trois phases dans la vie d'un président : sa candidature, le cours de son mandat avec enfin son intérim en cas de besoin (et  nous avons vécu ces trois situations en Tunisie).
Les conditions pour être musulman ne sont pas légion. Elles ne sont que cinq. Et tout candidat doit répondre à ces cinq conditions. Simple, diriez-vous! 
Eh bien non ! D'abord la cinquième des conditions édictée par la Chariaâ, c'est "le pèlerinage pour celui qui en a les moyens". Donc c'est une condition quasi facultative en quelque sorte. Puis sociologiquement, en Tunisie du moins, cet acte n'est accompli qu'à un âge avancé pour plusieurs raisons (épargne du coût élevé sur les années de labeur et de plein rendement, croyance qu'à un âge avancé cet acte annulera tous les péchés commis avant et que cet âge avancé donne aussi la capacité d'avoir un statut de sage, dans la société, une fois cet acte de piété accompli).
Avec une autre disposition de notre Constitution (article 40), le candidat doit avoir 40 ans. Et à cet âge- là, rares sont ceux qui ont accompli le pèlerinage.
En conclusion, cette condition, outre son caractère facultatif, tombe de facto.
Ne peuvent donc être candidats que ceux qui répondent aux autres quatre conditions. Mais concrètement, comment attester que tout candidat s'y conforme?
La première ne pose pas problème puisqu'il suffit de déclarer/ reconnaître qu'Allah est unique et que Mohamed est son messager.
Quant à la prière (cinq fois par jour) et au jeûne (de Ramadan est-il suffisant?) sont-ils facilement vérifiables pour chaque candidat? Enfin et par les temps fiscaux qui courent, la zakat est-elle encore faisable?
Donc se porter candidat à la présidence de la République Tunisienne actuellement exige un passage obligé devant une "autorité suprême de l'Islam" avec un livret attestant au moins que le candidat fait régulièrement son jeûne et ses prières. Mais qui devrait délivrer et annoter quotidiennement, peut-être, ce livret du "citoyen-candidat"? Quelle instance peut avoir cette autorité ? Et, dans cette logique, même s'il y avait cette autorité, elle serait tout bonnement anticonstitutionnelle, et pour causes (avec):
- L'alinéa 4 de l'article 5 de l'ancienne Constitution énonce la garantie de la liberté de conscience et le libre exercice du culte !
- L'alinéa 1er de ce même article énonce plus généralement la garantie des libertés fondamentales et les droits de l'Homme dans leur acception universelle!
- L'alinéa 4 de l'article 8 interdit à tout parti politique de s'appuyer…sur une religion…! ?
Ajoutons à tout cela un autre détail bien que de moindre importance. L'article 40 stipule que tout candidat doit être de religion musulmane, sans que cette condition ne soit étendue à ses parents et grands-parents maternels et paternels. Et bien que cela apparaisse anodin c'est une condition discriminatoire. Si quelqu'un choisit l'Islam à 18-20 ans et se porte candidat à 40 ans, il aura été donc musulman pendant 20-22 ans seulement. Est-il comparable à celui qui est né et a vécu en musulman pendant 40 ans ? Cela n'ouvre-t-il pas la porte au danger "d'entrisme" de quelque puissance étrangère, via des non-musulmans qui se convertiraient à l'Islam à l'âge de 39 ans par exemple? Bref, nous voyons là aussi que cette condition n'a pas de fondement rationnel en ce 21e siècle et 15ème de l'Hégire qui correspond, elle, à la floraison de l'Islam. Après 14 siècles, dont quelques-uns de "dé-raison" (arrêt de l'Ijtihad), peut-on encore faire de ce paramètre de la religion une condition à la candidature? Que ceux qui ont un peu de raison y réfléchissent ! Et que nos futurs constituants aient  un minimum de discernement pour nous éviter tous ces écueils.
Une femme candidate à la magistrature suprême
Ajoutons-y un autre détail, «rédactionnel" celui-ci, mais que peuvent nous sortir les puristes de la dé-raison : le texte de 1959 ne parle que du président de la République au masculin! Et la question peut être posée : une femme a-t-elle la possibilité de se porter candidate à cette charge suprême? Nous savons que, statistiquement, en Tunisie, les femmes représentent la moitié de la population, sinon un peu plus. Exclure la femme de la course à la présidence n'est qu'une hérésie mais que d'aucuns peuvent commettre sous le couvert du puritanisme, religieux s'entend. Et la simple rédaction du texte constitutionnel doit empêcher cela.
Mais retournons à l'Islam de la personne qui doit assumer la présidence de la République. Et supposons qu'à l'étape de la candidature vérification est faite de l'islamité de toute candidature, la Constitution devrait-elle aussi exiger un système qui permette de vérifier  le maintien de cette islamité durant le mandat entier ? C'est dire que, là aussi, le livret devrait continuer à être annoté et que si la personne-président venait à manquer à l'un des préceptes de l'Islam, elle serait déclarée en situation non constitutionnelle et déchue de sa charge ? Là aussi, c'est une autre preuve que cette condition de l'islamité  doit être supprimée de la future Constitution.
Plus est, cette condition de l'islamité peut-elle s'appliquer dans les cas d'empêchement provisoire ou de vacance de la présidence de la République ? La réponse est claire, c'est bien: Non! En cas d'empêchement, c'est le Premier ministre qui assure l'intérim. Et nulle part la Constitution n'interdit la nomination d'un Premier ministre non-musulman qui sera président de la République en cas d'empêchement et cela en totale contradiction avec l'article 38 dont nous traitons.
Par ailleurs, dans le cas de vacance, c'est le président de la Chambre des députés qui assure l'intérim. Et aucune disposition constitutionnelle n'interdit aux citoyens tunisiens non musulmans d'être députés ou président de la Chambre des députés. C'est dire qu'un non-musulman peut et a le droit d'être président de la Chambre des députés et en conséquence d'assumer la présidence de la République en cas de vacance.
Au vu de tout ce qui précède, nous devons conclure  que les dispositions actuelles concernant l'islamité du  président de la République ne doivent, et ne peuvent, pas apparaître dans la nouvelle Constitution à venir. Et que si quelque partie ne veut pas de cette conclusion, il n'y aura qu'une alternative :
- Ou bien préciser dans tous les articles de la constitution les autres religions, mais les connaît-on toutes, celles exercées par les tunisiens?
- Ou bien indiquer dans tous les articles de la Constitution, et pour tous les pouvoirs et institutions prévues dans la Constitution, cette condition de l'islamité  obligatoire des personnes qui peuvent en être chargées, et pourquoi pas aussi du simple citoyen électeur ou électif. Mais cela suppose bien sûr la suppression aussi bien dans le préambule que dans le corpus de la Constitution elle-même de toute référence aux droits de l'Homme, à l'égalité des citoyens, aux traités internationaux, aux libertés fondamentales, au pluralisme… Bref instituer simplement le totalitarisme.


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