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Pouvoir et violence : le cas du monde arabe
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 07 - 09 - 2011

''On peut juger du degré de civilisation d'une société en entrant dans ses prisons'' (Dostoïevski)
Par Khaled DELLAGI
L'implosion de l'Union Soviétique en 1991 mit fin au monde bipolaire issu de la Guerre froide en le réduisant à un monde unipolaire articulé autour de l'hyperpuissance US. D'aucuns y ont vu le triomphe sans retour du libéralisme et la ''fin de l'histoire'' (F.Fukuyama). D'autres, dans une recherche pathétique d'un nouvel ennemi pour remplacer l'ennemi défait et pour servir l'intérêt bien compris du complexe militaro-économique américain qui jouait là sa survie, théorisèrent le début d'un ''choc des civilisations '' (S. Huntington), en ciblant d'abord et avant tout le monde musulman étiqueté ennemi héréditaire et inassimilable.
Pour les Américains, les attentats du 11 septembre 2001, attaque impensable, frontale contre leur territoire national, sont comparables à un Pearl Harbor du 21e siècle. Cette date marque le passage à l'acte d'une ''guerre mondiale contre le terrorisme international''. A l'approche du 10e anniversaire de ces attentats, tout l'arsenal de propagande des Etats-Unis est mis à contribution, relayé par celui du monde occidental, pour donner à cet ''événement sans nom'' une signification symbolique : la lutte de l'Occident contre la barbarie ; la guerre du Bien contre le Mal.
Contre la pauvreté de cette pensée manichéenne, il faut opposer la réflexion de l'anthropologue, du sociologue et de l'historien, pour qui la réalité est bien plus complexe.
La décennie écoulée a accouché d'un nouveau monde au prix de multiples convulsions dont les dernières en date concernent le Monde arabe. Depuis plus de 50ans, l'axe des tensions et des guerres a traversé le ''Grand Moyen-Orient '', aire géographique sur laquelle les Etats-Unis n'ont eu de cesse de vouloir mettre la main (doctrine Bush), vaste zone étendue du Maroc au Pakistan englobant les principaux pays arabo-islamiques, avec au centre, l'Etat d'Israël. Le conflit israélo-palestinien fut, est et restera l'épicentre de cette zone sismique dont les ondes de choc se propagent bien au-delà de la région. Prétextant les attentats du 11septembre et pour atteindre leurs objectifs hégémoniques, les Etats-Unis mettent en pratique les théories des néoconservateurs américains en se créant un ennemi : le monde arabo-islamique. En réalité, il n'y a pas de choc des civilisations. Il n'y a de la part des Etats-Unis qu'une volonté hégémonique contrariée par un déclin annoncé, des intérêts économiques à préserver et un petit Etat raciste, agressif et colonisateur, à défendre coûte que coûte.
En ce virage fatidique qu'amorce le monde arabe, seule la bonne compréhension du ressort intime de cette confrontation nous permettrait d'imaginer les solutions et les réformes nécessaires pour sortir de l'impasse au fond de laquelle les politiques désastreuses des régimes déchus nous ont acculés.
L'histoire nous enseigne que la compétition internationale est basée sur la violence, sous toutes les formes, y compris les guerres feutrées diplomatiques. Dans cette compétition, les sociétés arabes sont handicapées par la persistance d'un haut niveau de violence en leur sein même et par leur incapacité à mettre en œuvre un système de bonne gouvernance. En effet, la société se construit autour du pouvoir politique dont le rôle premier est d'endiguer la violence entre acteurs sociaux et de maintenir les équilibres. Le contrôle de la violence est le défi majeur auquel sont confrontées les sociétés arabes et la condition sine qua non à la fondation d'un Etat moderne, un Etat de droit .Tous les pays arabes sans exception ont été, ou sont encore, dirigés par des régimes politiques autoritaires ou dictatoriaux. Dans ces pays, la justice est manipulée par l'Etat au profit de ses affidés, la corruption est généralisée, l'information muselée, les polices pratiquent la torture. Les prisons, à l'image des sociétés, sont de véritables enfers.
Ibn Khaldoun avait bien décrit le cycle infernal dans lequel se sont enfermées les sociétés maghrébines : équilibre précaire entre la solidarité clanique au pouvoir (asabiya) garante de la cohésion sociale du groupe dominant et les tendances centrifuges des compétiteurs sociaux (fitna). Ce schéma est encore pertinent de nos jours dans de nombreux pays tels le Yémen, l'Irak ou la Libye. Dans les pays du Golfe, les liens tribaux traditionnels sont loin d'avoir disparu et tendent à s'opposer à l'émergence d'une identité nationale.
Le couple pouvoir–richesse se nourrit mutuellement et permet au détenteur du pouvoir en place de se maintenir par la distribution des rentes, des prébendes et des honneurs (ressources financières, responsabilités, etc.) pour contenir la violence entre acteurs sociaux. Ainsi instrumentalisées, les richesses nationales ne sont pas orientées vers la saine croissance économique et la redistribution équitable. Pour de nombreux Etats arabes, le pétrole et le gaz sont LA rente par excellence et l'instrument de l'oppression politique : la portion congrue de cette rente est jetée au peuple pour le faire taire quand la minorité s'approprie la plus grande part et en use à sa guise. La richesse accaparée par le pouvoir sert à acheter la paix sociale. L'Etat rentier quand il est non contrôlé par le droit et une justice indépendante, est, par nature, autoritaire et corrompu. Il s'oppose en toute logique à la démocratisation d'une société qui pourrait demain lui demander des comptes, le déstabiliser, voire le renverser.
Le pillage des pays arabes se faisait auparavant par la colonisation directe. Il se poursuit aujourd'hui indirectement par la corruption et la prédation de la classe dirigeante à la solde de leurs maîtres occidentaux.
On observe depuis quelques années un néo-colonialisme agraire avec la ruée vers les terres arables (Soudan) trouvant sa justification dans la recherche de la sécurité alimentaire. Les Etats arabes sont particulièrement vulnérables au réchauffement climatique, à la raréfaction de l'eau et aux spéculations mondiales sur les denrées alimentaires. Cette dépendance alimentaire, autre forme de violence, frappe d'abord les plus pauvres et sert de combustible aux émeutes de la faim.
Enfin, la domination technologique et commerciale américaine dans le secteur numérique est totale à l'échelle mondiale. Elle véhicule la culture américaine et marginalise les autres cultures, y compris la nôtre, préludant l'extinction de la diversité des cultures.
Sur le champ des confrontations feutrées de la diplomatie internationale, les pays arabes sont toujours perdants. L'absence d'Etat de droit, le caractère notoirement prévaricateur de ceux qui sont censés les représenter, étouffe leur appel à la justice (pour le peuple palestinien en particulier !), rend leur voix (la voix de la rue arabe) inaudible ou pire, insignifiante (R. Malley). La vulnérabilité des classes politiques les rend tributaires du bon vouloir des Etats-Unis et les expose aux traités inégaux (traité de paix israélo-égyptien, 1979). En découlent des désordres sociopolitiques : assassinats (A.Sadate), coups d'Etat (Syrie), crises politiques (Liban), conflits ethniques (Irak). Et là où il y a moins d'enjeux internationaux, ce sont les egos hypertrophiés des despotes locaux qui mobilisent un nationalisme artificiel et pérennisent des conflits absurdes (Sahara occidental).
La compétition entre les nations se traduit par un rapport de force où, in fine, l'un doit soumettre l'autre, de gré ou de force. Derrière le masque bienveillant de l'Occident (hier, porteur d'une prétentieuse mission civilisatrice, aujourd'hui conseilleur en démocratie dont ils seraient en peine de prouver en fait qu'elle est dans leurs propres pays autre chose qu'une oligocratie solidaire et autoentretenue) se cachent toujours des intérêts économiques. L'ouverture par le président Obama d'un dialogue avec le monde islamique, qui a suscité tant d'espoirs, a vite tourné court devant les réalités géostratégiques du Moyen-Orient et la pression des lobbies internes. Le veto américain annoncé, qui bloquera la reconnaissance par l'Assemblée générale de l'ONU d'un Etat palestinien dans ses frontières de 1967, est une violence institutionnalisée faite au droit des peuples, à la liberté et au droit tout court. Violence aussi intolérable que celle vécue par les Américains le matin du 11 septembre ! Ce n'est pas demain que l'on verra le président Obama se revendiquer '' Palestinien '', à l'instar du président Kennedy qui s'est qualifié de ''Berlinois ''au lendemain de l'érection du Mur de Berlin, ou du président Chirac qui s'est affirmé ''Américain'' au lendemain des attentats du 11 septembre. Faut-il s'en étonner ? Finalement cette attitude prouve qu'on peut avoir la bouche pleine de mots, liberté, justice et de ne ressentir de l'empathie que pour ceux qui vous ressemblent. Pour les autres, ils attendront ou, mieux, regarderont ailleurs !
La volonté de l'immense majorité des peuples de la terre n'y changera rien et le veto américain sera la énième preuve que l'ONU, tant qu'elle sera ce qu'elle est, n'est en définitive qu'une arme d'hégémonie.
A cette violence institutionnalisée, les Etats arabes se présentent en rangs dispersés : la Ligue Arabe radote, l'UMA est un cadavre momifié et les Etats qui détiennent dans le pétrole, qu'on le veuille ou pas, une arme de persuasion (pour ne pas dire de dissuasion) se tiennent cois, et pour cause !
L'Histoire n'a pas de fin. Les sociétés humaines vivent depuis dix mille ans dans le néolithique et n'ont jamais réussi à venir à bout de la violence. Les révolutions en cours ne suffiront pas à sortir le citoyen arabe du marasme où il se trouve. Pour cela il faudrait qu'une triple révolution éthique se produise : une révolution éthique individuelle, une révolution éthique collective et civique et une révolution de l'éthique universelle enfin (E. Morin) pour vaincre le manichéisme réducteur des Etats prépondérants et faire la place à un monde solidaire.
Les révolutions actuellement en cours dans les pays arabes doivent déboucher à la mise en place d'Etats de droit établissant la primauté de la loi sur la force dans les relations entre acteurs sociaux et le contrôle du pouvoir civil sur les forces armées. Elles doivent entraîner dans leur sillage une bonne gouvernance qui, s'appuyant sur le débat social, l'éducation, la promotion de la recherche et de l'intelligence, veillera à une redistribution équitable de la richesse nationale. C'est à cette condition que leur voix sera demain audible à l'échelle internationale et que le déni de justice comme celui qui se prépare à l'ONU à leur encontre et à l'encontre du peuple palestinien, ne leur soit plus infligé. Rappelons les arguments éculés des soutiens d'Israël «après tout c'est la seule démocratie de la région» (demandons aux Arabes israéliens leur avis sur la question ..), «Israël est un Etat de droit et prend plus de gants avec les Palestiniens que la plupart des autres despotes arabes avec leurs peuples» (demandons l'avis des Gazaouis sur l'embargo féroce qu'ils subissent et sur l'opération Plomb Durci ), «Israël a développé une économie moderne et compétitive» (demandons aux 400.000 indignés qui manifestent à Tel Aviv s'ils trouvent la redistribution des richesses dans leur pays équitable) etc…
A la violence de la mondialisation et de la dictature de l'hyper-libéralisme doivent répondre l'humanisme d'une dé-mondialisation et la réforme de la gouvernance mondiale.
En 1861, la première Constitution du Monde musulman fut tunisienne. Aujourd'hui, la Tunisie, toujours pionnière, a engagé un mouvement révolutionnaire qui fait tache d'huile dans le Monde arabe et qui mettra fin définitivement à l'insultante idée d'exception arabe qui osait prétendre que l'autoritarisme, la violence et la soumission étaient consubstantiels à nos sociétés !
L'espérance d'une vie libre et digne n'est pas morte. L'incroyable, l'impensable est du domaine du possible. Rien ne résiste à la détermination et au courage.
Palestine vivra !


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