La Belgique via la… Chine pour se faire un nom, un prénom et un palmarès au plus haut niveau. Nous l'avons rencontrée pour vous à l'exhibition Yannick Noah-Mansour Bahrami. Elle nous raconte son parcours de combattante et ne doute pas un seul instant qu'elle sera là-haut avec les grandes. «C'est grâce à mes parents et surtout à ma mère que j'ai mis les pieds dans ce monde du tennis. J'avais 2 ans quand j'ai eu ma première raquette en main même si, plus tard, j'ai eu à choisir entre la natation et la balle jaune. Mais à vrai dire, je n'ai pas hésité longtemps. A 8-9 ans, je regardais le tennis à la télé mais, franchement, je suis de celles qui préfèrent jouer que de regarder les autres le faire». Début de l'aventure à 5 ans : «De 5 à 13 ans, j'étais sous la coupe de Nabil Mlika qui m'a appris la technique et la tactique et qui a été honnête avec moi. Quand il a compris qu'il ne pouvait plus rien m'apporter, il m'a dit de partir en équipe nationale. Car, à un certain moment, j'étais même supérieure à Nour Abbès et Sonia Daggou que je battais régulièrement». «Un dur parcours» «Toujours est-il qu'à 15 ans, j'étais devenue imbattable car j'étais surtout plus forte mentalement. Il faut vous dire que je n'ai jamais été poupées et que je n'appréciais pas les filles gâtées. Je savais au départ ce que je voulais». Direction la capitale‑: «A 13 ans, je me suis retrouvée à Tunis sans mes parents, interne au Lycée sportif avec pour entraîneur Rafik Bouchlaka. C'était dur, très dur. Sans les miens, à gérer les études, les entraînements au réveil à 6h30 du matin, retour à 8h00 du soir et une bouffe franchement dégueulasse et à trois par chambre (paraît qu'elles étaient plus nombreuses avant)». Parcours? «Avec Bouchlaka de 13 à 14 ans, un championnat d'Afrique par équipes, championne des -14 en simple et même une victoire au Petit Duc en France, ce qu'aucun Tunisien n'a réussi. Rafik Bouchlaka a beaucoup cru en moi, beaucoup encouragé et je me confiais beaucoup à lui. Sur le plan tennistique, j'ai beaucoup progressé techniquement et physiquement. J'avoue que sur ce premier plan, je suis parfois encore brouillonne». Parcours de combattante «14-15, c'est le début d'un parcours semé d'embûches, le début des problèmes. On a changé tout le staff technique, on a forcé Rafik Bouchlaka à partir et je me suis retrouvée avec Adel Lahdhiri qui ne pouvait rien me donner. Cela a été une très mauvaise année pour moi. En 2009, c'était l'US Open avec cette fois-ci Walid Jallali qui n'était pas mon entraîneur. Je jouais le dimanche et j'avais débarqué à New York le vendredi en catastrophe, sans réservation d'hôtel, sans rien. Eliminée au premier tour en même temps que je croisais dans les allées de Flushing Meadows les Nadal et Federer. Hallucinant! Retour avec Adel Lahdhiri puis avec... Walid Jallali à l'Open d'Australie avec un visa en dernière minute, pas de participation au tournoi qui précède l'Open et à peine une semaine d'entraînement sans aucune teneur. Avec Nour Abbès, nous sommes éliminées au premier tour alors que Slim Hamza passe un tour. Si Sami s'il vous plaît, allez voir Slim Hamza, un très bon. Il vous racontera ses malheurs, ses blessures et comment il a été broyé par un système bon à casser des champions (promis Ons, on le fera)». «Je n'ai jamais lâché!» «Sans mes parents et leur soutien, je ne sais pas ce qu'il serait advenu de moi. Toujours est-il que je me retrouve en 2010 en finale de Roland Garros juniors avec un entraîneur qui n'est même pas le mien, Patrick Simon, directeur technique de l'époque. Puis en dernière minute avec Farès Zaïer que je ne connaissais même pas ! Mais bien que jeune, Farès Zaïer est très bon. A l'époque aussi — et je ne le saurais que plus tard — j'ai reçu plusieurs propositions de plusieurs sponsors que l'actuel président de la fédération a soigneusement cachées. Résultat : aucun sponsor, même pas pour l'équipement. Je ne voulais pas forcément partir mais je voulais au moins bénéficier d'un bon encadrement, stable, un programme». Puis c'est l'accident : «Je me suis alors cassée le poignet et aucune nouvelle de la FTT et de son président. Seule Selma Mouelhi était présente. Entretemps, une année durant, j'ai ruminé ma défaite en finale de Roland Garros et je m'étais juré de prendre ma revanche. Au début, j'avais Luca Appino comme entraîneur mais après il ne pouvait plus rien me donner. La préparation pour le dernier tournoi parisien a été catastrophique. J'étais certes revenue mais je n'avais presque plus de sensations au niveau du poignet gauche. Heureusement, je retrouvais petit à petit mes sensations à Roland Garros en plus de certaines joueuses que je connaissais. A la veille de la demi-finale, je n'ai presque pas dormi. Trop de stress qui a disparu la veille de la finale». Retour sur terre «Une fois à Tunis, je me suis retrouvée dans un véritable tourbillon avec des médias qui m'ignoraient et qui, du coup, me voulaient, des dirigeants qui essayaient de récupérer ma victoire. Luca Appino, directeur technique national, à qui l'on à mis en tête de faire mon entraîneur et une véritable bataille ouverte entre lui et le président de la FTT. Résultat: aucun point de gagné de Roland-Garros à Maputo.» Eclaircie : «Heureusement qu'il y a eu cette offre de l'Académie Justine Henin qui m'observait et me voulait, ce que le président de la FTT m'a encore caché. J'ai même su qu'il y avait une offre de Lacoste. Elle a connu le même sort. Carlos Rodriguez (15 ans avec Henin, ex-numéro un) m'a affirmé que je ne jouais qu'à 30% de mes moyens et que tout le reste est à acquérir. Je romps à présent avec les tournois pour rattraper mon retard. J'irais 6 à 8 semaines en Chine où il y a aussi une Académie Henin pour parfaire ma technique, ma tactique, mon physique et mon mental. D'ici la fin de l'année, je disputerais 2 à 3 tournois sans plus. Je suis prête pour le haut niveau. Mais avant de partir, j'ai offert à la Tunisie et à moi-même une médaille d'or aux Jeux africains de Maputo. C'est presque synonyme d'une qualification aux JO de Londres. C'est important pour moi. Je quitte mon pays la conscience tranquille mais le cœur gros comme ça pour tous ceux qui restent et qui ont le droit de connaître un meilleur sort. Slim Hamza, Ahmed Triki, Nour Abbès, Heithem Abid et tant d'autres encore. J'espère de tout mon cœur que les choses changeront et que le tennis tunisien trouve sa véritable place au niveau local et international». Bon vent ! P.S. : Demain entretien avec Malek Jaziri.