La 26e édition des Journées de l'entreprise a tout particulièrement été placée sous le signe du... social. Non point, bien sûr, que les capitaines d'industrie, les chefs d'entreprise et les argentiers tunisiens se soient découvert une fibre de philanthropes, mais les temps sont actuellement à l'humilité en toute chose. Trêve de plaisanterie. Si aujourd'hui la dimension sociale du développement est à l'honneur, c'est foncièrement en raison de la conviction désormais partagée par l'ensemble des opérateurs économiques que sans progrès social, il ne saurait y avoir d'essor économique. Souvenons-nous : notre pays a tout de même réalisé une croissance moyenne de 5% l'an au cours des dernières années. Le problème est que les fruits de cette croissance ont été détournés au profit d'une minorité. C'est cette injustice entretenue par une grave crise des valeurs qui a fait que seuls l'argent, le profit et le gain facile comptaient au détriment du travail et du mérite. Aujourd'hui, au-delà des discours et des slogans, c'est ce système de valeurs qu'il faudrait repenser en plaçant la question de la répartition juste et équitable des fruits de la croissance au cœur de la dynamique de développement. L'entreprise, en tant que première et principale entité économique créatrice de richesses, devrait à cet égard être aussi une véritable plate-forme d'ascension et de progrès social. L'entreprise, ce sont avant tout des ressources humaines qui la font au quotidien. Comment espérer attendre de ces ressources un engagement autour des valeurs de l'entreprise si ces mêmes valeurs se trouvent par ailleurs bafouées? Comment l'entreprise peut-elle relever le défi de la compétitivité en l'absence d'une motivation sociale qui reste le moteur de la productivité? Comment aussi demander aux ressources humaines de donner plus pour leurs entreprises tant qu'elles se sentiraient exclues des bénéfices réalisés par elles et jusqu'aux choix stratégiques fixés par le «directoire»? Oui, replacer le social au cœur de la vie de l'entreprise et de l'économie en général est aujourd'hui cette valeur qui fonde à la fois l'esprit citoyen et la culture d'entreprise. Ce n'est pas une valeur facile à observer que de servir l'entreprise et l'économie nationale comme on servirait le bien public. La culture de cette valeur a besoin d'une véritable ascèse, à travers les aléas d'un cheminement qui n'est jamais à l'abri d'erreurs de jugement ou d'orientations mal appliquées. L'exemple devra, en l'occurrence, venir d'en haut et constamment défendu par les sphères du pouvoir politique. C'est une éducation permanente, au contact des réalités concrètes que se forment l'esprit civique et la culture d'entreprise. C'est cet esprit et cette culture qui façonnent une société, lui donnent de la vigueur en la rendant toujours plus solidaire, qui lui donnent sa fécondité en la rendant chaque jour plus industrieuse, plus innovante. Cette vigueur et cette fécondité, c'est d'elles seules que notre société devra toujours tirer sa spécificité et la dynamique économique qui lui permet d'avancer.