• Les textes de loi en date de 1999 et de 2010 ne font que réduire à rien la responsabilité des centres d'hémodialyse Le point culminant des défaillances marquant le domaine de l'hémodialyse demeure principalement l'inadéquation des textes de loi avec la réalité de ce problème de santé publique et son impact défavorable sur la vie des insuffisants rénaux. Ce problème constitue le centre d'intérêt capital sur lequel se penche l'Association tunisienne des insuffisants rénaux (Atir); un combat qui date de 1985 et se poursuit jusqu'à nos jours. En 1985, le traitement des malades souffrant d'insuffisance rénale ne se soumettait à aucun cadre légal. Aussitôt déclarée, l'Atir s'est activée pour sensibiliser les décideurs et les spécialistes concernés sur l'impératif de réglementer ce traitement jugé à la fois comme lourd et vital. «Il était nécessaire de mettre en place un cadre légal incluant les modalités de traitement, les normes de fonctionnement mais aussi des équipements des centres de dialyse», indique M. Ridha Hmila, président de l'Atir. Depuis, trois textes de loi ont vu le jour, ponctuant ainsi un domaine en évolution. Il s'agit de la loi en date de 1989, celle en date de 1999 et celle de 2010. Or, au lieu de renforcer davantage la responsabilité et les obligations des centres de dialyse, les deux derniers textes de loi n'ont fait que les restreindre. En effet, le texte de loi en date de 1999 limite les obligations des centres d'hémodialyse en matière de certaines analyses biologiques ainsi qu'au niveau des explorations radiologiques. Puis, le texte de 2010 a supprimé des radiologies importantes et tant d'autres bilans fort indispensables au traitement. «Les analyses relatives à l'hémoglobine permettant de déceler les indicateurs de l'anémie ont été limitées à une fois par trimestre et non plus à une fois par mois. Pourtant, les insuffisants rénaux sont souvent en proie à l'anémie, d'où l'impératif d'un bilan plus actualisé», explique M. Hmila. D'autant plus que les étapes fondamentales et méthodiques de la prise en charge des malades ne semblent point suivre l'itinéraire requis. Le président de l'Atir rappelle que l'itinéraire spécial prise en charge des insuffisants rénaux répond aux besoins curatifs de ces derniers, dans la mesure où il leur garantit et le traitement d'hémodialyse et le suivi des spécialistes confirmés tout en multipliant les chances de bénéficier d'une greffe rénale. «Il faut que les malades soient, d'abord, traités dans des centres hospitalo-universitaires. Ces derniers sont les plus habilités pour prendre en charge cette maladie. A titre dérogatoire, les malades peuvent être confiés à des centres de dialyse privés pour bénéficier du traitement qui n'est autre que les séances de dialyse. Ces séances doivent être suivies par un médecin généraliste à la compétence d'un hémodialyseur mais aussi par un néphrologue», précise notre interlocuteur. Il ajoute: «Il est à noter que seul le néphrologue est capable de gérer l'évolution et les éventuelles complications de la maladie. Les généralistes hémodialyseurs sont non-compétents dans le sens où ils ne sont pas habilités à gérer la maladie. Par ailleurs, et afin de multiplier ses chances en une greffe rénale, le malade est appelé à retourner au service hospitalo-universitaire». Le non-respect de cet itinéraire ne peut qu'augmenter les risques de complications, chose qui se répercute négativement sur la santé du malade ainsi que sur sa vie sociale. Pour remédier à ces défaillances juridiques et apporter les réformes à même de garantir les droits des insuffisants rénaux en une prise en charge appropriée, l'Atir a avancé une série de suggestions, dont la réforme de la commission du traitement de la maladie rénale. M. Hmila n'hésite pas à dévoiler la non-intégrité passée de ladite commission. «Avant, c'était une véritable mafia. Aujourd'hui, il est temps que les choses changent en mieux. Pour ce, il est strictement inadmissible que des personnes intruses fassent partie de cette instance », souligne le président de l'Atir. Par ailleurs, l'association a élaboré deux cartes sanitaires fort utiles pour les personnes souffrant d'insuffisance rénale: il s'agit de la carte sanitaire des centres publics d'hémodialyse. Notre interlocuteur souligne que l'existence de cette carte a été longtemps dissimulée. «Or, indique M. Hmila, il y a des malades qui ne bénéficient pas de la sécurité sociale et ne peuvent ainsi recourir aux prestations des centres privés. La carte sanitaire a ceci de bon qu'elle oriente ces malades vers les centres publics les plus proches de leurs domiciles». L'Atir a également recommandé d'établir les conditions de création et d'exploitation des centres d'hémodialyse. Ces propositions ont été déposées auprès du ministère de la Santé publique, du ministère des Affaires sociales, des trois commissions constituantes et autres institutions. «Nous sommes en train d'élaborer un dossier sur la greffe rénale. A cet effet, il est utile de souligner que les textes de loi relatifs au don d'organes et aux tissus sont à revoir de fond en comble», ajoute notre interlocuteur. L'Atir remet également en cause la création d'un comité de répartition des malades sur les centres d'hémodialyse, la jugeant contradictoire avec l'article 4 qui exige que le malade ait la liberté absolue de choisir son médecin traitant. L'Atir propose de convertir ce comité en un comité de sensibilisation et d'orientation des malades vers les centres les plus proches de leurs domiciles et de leurs lieux de travail.