Au firmament, le représentant tunisien a rendu une copie impeccable Solidarité, don de soi, culot offensif et application tactique, l'Espérance a laissé libre cours à sa cohésion en terre soudanaise, dans la droite ligne de son rendement étincelant à Radès. Tel un vieux routier «africain», les «Sang et Or» n'ont pas fait dans la dentelle en cette veillée de samedi. Une gestion appropriée de la situation, un excellent état d'esprit (l'EST n'est jamais tombée dans la provocation adverse), un caractère bien trempé et une alchimie de groupe sans pareil ont permis aux champions de Tunisie d'apprivoiser des locaux incapables de prendre la pleine mesure du représentant tunisien. A la recherche d'un hypothétique maillon faible , les coéquipiers de Fayçal Ajab ont dû déchanter assez tôt. L'EST s'est montrée complémentaire, altruiste, réaliste et compétitive, alors qu' El Merrikh n'a jamais donné cette impression de puissance qui ont fait d'elle un onze incontournable des places d'honneur continentales. Autre spécificité du doyen des clubs tunisiens, la polyvalence et l'assimilation des choix tactiques permettent de parer à tout recentrage du jeu. Darragi absent, c'est à Msakni d'assurer le relais offensif, en plus de l'animation du jeu. Dans le même temps, revoir Ayari piquer des sprints pour revenir au charbon et prêter main forte aux pivots et aux défenseurs dénote de cette «connexion» entre joueurs et leur adhérence aux mêmes principes: se soutenir et défendre leurs couleurs contre vents et marées. Si l'Espérance se démarque singulièrement par son jeu collectif et son tout offensif, le staff technique a aussi imposé d'autres règles comme l'impératif de «pressing de zone», l'abattage dans le périmètre de jeu de l'adversaire, et ce, en vue de ne pas permettre au vis-à-vis de poser son jeu et de construire. Karim Nafti en sait d'ailleurs quelque chose... Des choix judicieux Chapitre orientation tactique, l'EST a évolué en 4-2-3-1 avec deux pivots que sont Korbi et Roger, deux animateurs de couloirs, Ayari et Bouazzi (cumulant aussi la casquette d'inter-droit et gauche), alors que Michael en pointe et Msakni au «dispatching» et aux amorces offensives, sont venus apporter cette profondeur dans le jeu et cette variété propre à l'EST. Dans plus d'une équipe, «un seul être vous manque et tout est dépeuplé». Ce n'est pas le cas de l'Espérance, qui, en l'absence de son détonateur, Darragi, a su revoir sa conception et livrer un match qui en dit long sur la maturité et la palette de jeu de ses individualités. Lors de la manche aller, l'EST au révélateur soudanais est apparu pimpante et renversante. Lors du second acte, le club de Bab Souika a démystifié El Merrikh dans son antre, avec ce que cela demande comme supplément d'âme et détermination à vendre chèrement sa peau. Mobilité, replacement, duels bien négociés tout en étant les premiers sur la seconde balle, l'Espérance a rendu une copie impeccable et a désormais atteint le palier supérieur, le haut niveau. L'explication d'Om Dormane est avant tout une rencontre de nerfs (à fleur de peau pour les locaux). La force tranquille des «Sang et Or» et leur sérénité à toute épreuve ont constitué la clé du match, indépendamment de toute approche tactique. L'incessant jet de projectiles divers, un public et un adversaire hostile, un Stephen Worgu qui sort de ses gonds, un arbitre qui a toléré le jeu dur des locaux, l'ambiance électrique ou plutôt le chant du cygne soudanais ont été plus que révélateurs de la supériorité manifeste de l'Espérance. Sitôt menée au score, à quelques secondes du retour aux vestiaires, les hommes de Benzarti ont par la suite mis sept minutes pour rétablir l'équilibre et assommer ainsi des locaux dépités par la tournure des événements. On y associe les arrêts décisifs de Naouara et nous voilà en présence d'un onze de choc et de charme qui ne cesse de monter en puissance et renouveler ses ambitions au fil des challenges et des rencontres. Il faudra compter avec l'Espérance en phase de poule de la ligue des champions. Une équipe qui allie contrôle du facteur moral et concorde de groupe, via une harmonie et une quiétude qui ne trompent pas, ne peut que s'affirmer à termes et exaucer le vœu de tout un public.