Le théâtre Toursky est tout entier empreint de l'âme ferréenne et Richard Martin, qui s'est en quelque sorte transfiguré en lui à travers son répertoire musical, et sa pensée libertaire et de grande fraternité, est obsédé par le spectre de la disparition, de la perte de mémoire et de l'amnésie collective. Ces «Rencontres internationales du Théâtre méditerranéen», dont nous avons donné un aperçu lors de nos trois derniers volets, sont donc avec l'esprit fédérateur des vingt-quatre pays de cette mer en partage et sont aussi le symbole d'une lutte pour maintenir en vie ce qui, ailleurs, aurait été voué à la mort certaine. Une sorte de Noé pour sauver du Déluge Et José Monleon, fondateur et initiateur de telles rencontres annuelles, nourries, cette année, par les révolutions nouvelles, le Printemps tunisien et arabe, est une sorte de Noé apparu pour sauver les choses vivantes de ce Déluge permanent qui s'appelle le Temps. C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, les participants à cette nouvelle session, riche d'un débat porteur sur des projets salvateurs pour la liberté, la dignité, l'égalité et la fraternité, sont prêts à passer à l'acte dans leurs propres pays. Et le thème porteur de «Théâtre et Démocratie», à la lumière des élans révolutionnaires maintenant partout dans le monde, ne fait que répondre à l'urgence de ne pas voir se réaliser le «Tout doit disparaître». C'est-à-dire nos valeurs communes dans cette Méditerranée, dans ses profondeurs et non pas à sa surface où règnent la misère de l'incommunication, le gâchis du capitalisme sauvage et la dérive des jeunes «harragas» à la recherche d'un «mieux-vivre» d'une existence tolérable. Voilà l'esprit dans lequel l'IITM navigue depuis presque un quart de siècle et aussi depuis la disparition de Leo Ferré un certain 14 juillet 1993 et dont on fêtera, l'été 2013, le vingtième anniversaire à travers la «Grande Nuit Léo Ferré» avec bal populaire et spectacle. De grands noms du théâtre, du music hall et de la chanson fusionneront ensemble pour l'occasion : Piere Arditi, Michel Bouquet, Michaël Lonsdale, Sonia M'barek, Rufus, Sapho, Julien Derouault et Marie-Claude Pietragalla, etc. «Léo Ferré, dit Richard Martin, est un continent et une mer immenses à (re)découvrir sans cesse comme les poètes qu'il met en musique : Villon, Verlaine, Baudelaire, Apollinaire, Aragon, Caussimon... Léo Ferré, le poète de l'Amour et des révoltes intelligentes. Et puis n'oublions pas le merveilleux projet d'une singulière navigation en Méditerranée, l'Odyssée 2013, proposée par Richard Martin et ses compagnons. Une flotille de la paix et une marche poétique sur l'eau qui sera initiée par des milliers d'artistes du monde, venus s'y associer y compris à partir de la marina de Yasmine Hammamet. Une manière de montrer que la culture lutte et s'engage utilement pour défendre le droit humain partout où il est nié et humilié». A l'heure où la barbarie s'installe et continue des siennes. (Correspondance spéciale) (*) Titre d'une chanson de Léo Ferré