On a beau suggérer que l'âge d'or d'un club comme le Stade Tunisien est bel et bien révolu, mais c'est surtout de grands talents, des joueurs doués et de véritables dirigeants dont a cruellement besoin le club du Bardo. De toutes les façons, plus les responsables d'aujourd'hui en sont conscients, plus ils verront loin, mieux le club pourrait être structuré, mieux il s'organisera, mieux, mieux... Le public, et pas seulement du football, n'aime rien moins que jauger, comparer et classer. Jeter des ponts entre les époques, confronter les générations et opérer des hiérarchies. Il n'est pas certes bon de vivre dans le passé, mais aujourd'hui encore on ne peut se retenir devant le gâchis dans lequel le ST s'est précipité. On ne peut également s'interdire de penser au temps perdu dans les illusions. Mais en même temps, on ne manque pas d'entrevoir les signes d'une nouvelle espérance. Il faut dire qu'on ne se débarrassera pas comme ça des mauvais réflexes, des mauvaises habitudes, de l'accumulation de tant de défaillances. On a fait, il est vrai, au Stade un fort mauvais usage des notions et des valeurs du football à tel point qu'il serait maintenant difficile de faire disparaître magiquement tout cela par un simple coup de balai. Il n'est pas étonnant qu'on en soit arrivé là. Autant dire que les intéressés ont souvent trouvé ici et là leurs intérêts, notamment à travers cette «belle» opportunité de détourner l'attention et de propager les fausses promesses. Entre une pratique sans tête et une théorie sans jambes, on a souvent fait le mauvais choix. Par quelque dimension que l'on saisisse, l'histoire du ST a montré qu'il n'y avait pas vraiment de règle concernant les dirigeants qui se sont succédé au club, qu'il y avait ceux qui sortaient après un triomphe, ceux qui restaient malgré un échec et enfin ceux qui débarquaient de force ou qui préféraient prendre la tangente. De façon générale, le ST a souvent vécu l'âge sceptique du football. La fresque y était un rite d'adhésion collective et la culture des clichés habituels dominait tout. Crise de gouvernance, crise de résultats, crise d'identité, les différents bureaux directeurs cumulaient les ennuis. Tout cela dépassait largement le débat autour du football. Aujourd'hui, la question essentielle n'est pas de savoir si après un si lourd héritage la Stade Tunisien a encore de l'avenir. Le mal est en effet beaucoup plus profond. Il touche aux racines d'un club qui n'a eu souvent ni projet, ni argent, ni ambition. L'heure est venue maintenant pour y voir de plus près, pour faire le point et peut-être aussi rendre des comptes. Qu'on se le dise, le ST est toujours gouvernable, mais encore faut-il trouver la clé. Le défi de Ghraïri... Ainsi, une rupture dans les méthodes de travail suscite de toute évidence une mutation dans les mentalités. Il devrait en être ainsi pour l'équipe d'aujourd'hui dont le salut réside à la fois dans les réformes techniques, administratives, mais aussi dans la révolution des esprits. A travers le projet qu'il tient à mettre en œuvre, Ghazi Ghraïri, qui vient de débarquer au club et à qui revient la charge de la réhabilitation tant attendue, s'efforce non seulement de donner cohérence et intelligibilité à son action, mais aussi favoriser un nouvel état d'esprit, une nouvelle dynamique de travail, une véritable ambiance de groupe. On ne s'empêchera jamais de penser que le football est largement imprévisible et jamais avare de coups de théâtre. L'arrivée de Ghraïri au ST ne faisait pas au début l'unanimité. On doutait de son aptitude à pouvoir affronter les problèmes qui n'ont jamais cessé de conditionner le parcours de l'équipe. D'ailleurs, d'autres entraîneurs étaient sur la liste. Le choix en faveur de Ghraïri semble aujourd'hui donner satisfaction. Il répond à ses détracteurs sur le terrain et on ne peut lui contester de disposer de ressort et de vision. Il veut bâtir son destin d'entraîneur jour après jour, bousculant sans cesse ses limites, pour extraire le meilleur de lui-même, obsédé par le moindre détail, se construisant un rôle unique, un destin que beaucoup ne lui auraient promis, et surtout assoiffé de victoire jusqu'au bout.... Le football peut mener plus loin qu'on ne l'aurait jamais imaginé... L'important, maintenant pour le ST, pour ses joueurs, pour son entraîneur et ses dirigeants, est que l'on puisse travailler en étant moins traqués, et surtout loin du centre de l'attention. Il ne faut pas aussi oublier que réduire le sort du club à celui de l'équipe seniors aura pour effet de transformer les projets envisagés en absurde quitte ou double, faisant oublier l'essentiel: la formation, la base de tout travail de fond, le développement des structures du club, les sources de financement... Faire et défaire les choses, ainsi est l'enjeu stadiste le plus important. Ainsi est le grand enjeu de la vie du club. Les responsables du club, sportifs et administratifs, reprendront certainement leur droit en remettant l'équipe à sa place. Mais notre souhait le plus ardent est que l'on parle plus de projet et de stratégie que de résultat. Il faut dépersonnaliser le ST. Il serait grand temps...