Il est l'un des rares artistes, si ce n'est le seul, à exposer chez lui. Son atelier-galerie, «Atelier du dedans» comme il l'appelle, offre d'élégantes cimaises et lui permet de vivre en symbiose avec l'œuvre en cours et les toiles achevées, dans un va-et-vient fécond. L'espace est superbe, suspendu sur la colline de Gammarth, promontoire en plein ciel où rien n'arrête le regard et où l'on respire plus largement, plus grandement, aimerait-on dire. Là, Foued Zaouche travaille, et pour lui ce n'est guère un euphémisme. Ses journées sont drastiquement orchestrées; il n'y a pas de temps mort. Véritable «tâcheron» comme il aime à dire, il consacre à son art tout son temps, et un peu plus même. Ses rencontres avec son public se font à un rythme régulier qu'il s'impose de respecter rigoureusement, heureux de cette confrontation, de cet échange dont il sait tirer le meilleur. En général, Foued Zaouche nous offre, avec son invitation, un texte-argument où il explique ses motivations, ses découvertes, les étapes de cette quête qu'il a entreprise et qui ne s'achèvera jamais. Cette fois-ci, il n'a rien écrit sur le carton élégant, qu'il soigne toujours particulièrement, ce qui est une politesse à l'égard du public en ces temps où la plupart des invitations se font par mail ou par SMS. Et pourtant, cette fois-ci, il aurait eu beaucoup à nous dire sur cette nouvelle voie qu'il semble emprunter, sans pour autant renier ses thèmes habituels, celle d'un surréalisme poétique nouveau dans son mode d'expression : «J'essaie d'enclencher une émotion picturale, mais aussi une réflexion poétique. J'aime que l'esprit puisse s'envoler, et pénétrer une toile, voyager à l'intérieur. Ce qui se passe, en fait, c'est que j'arrive, désormais, à m'extraire de mes toiles, à les regarder comme un étranger, et donc à voyager dans ces paysages. Ces toiles sont des espaces de suggestion ouverts». Mais on retrouve, chez Foued Zaouche, tous les thèmes qu'il aime à traiter, et dont il maîtrise parfaitement la technique. Les paysages agrestes de Sidi Bou Ali, ce lieu qui est son univers mental et son jardin secret, et qu'il accepte de partager avec nous. Scènes champêtres, et horizons lointains sont propices à la méditation. Scènes traditionnelles d'une Tunisie éternelle, dont il ne cesse de défendre la spécificité et l'exception sur les colonnes des journaux. Natures mortes, qui sont, peut-être, l'expression la plus aboutie de sa virtuosité. Portraits, genre dans lequel il excelle et qu'il déplore de ne parvenir à introduire dans nos habitudes. «Je revendique toujours cette exigence technique. Et mes engagements picturaux me poussent à travailler davantage. Mais comme l'âge et l'expérience me donnent plus de maîtrise et moins de contraintes, je deviens toujours plus exigeant, plus enthousiaste aussi. Cette sensation agréable me rend heureux». Dans son atelier, sur la colline, Foued Zaouche continue de travailler, toujours en musique, ne s'interrompant que pour lire et relire ses auteurs favoris, les Stoïciens qui ont tout inventé et répondu à toutes les questions. Et quand il ouvre sa porte, c'est pour partir voir pousser ses oliviers à Sidi Bou Ali.