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Mesdames, je vous aime et vous photographie!
Arts Plastiques - Femmes de mon pays, femmes et demi de Dalila Yakoubi
Publié dans La Presse de Tunisie le 18 - 04 - 2013

Après le 14 janvier, les artistes, particulièrement les photographes, ont laissé libre cours à leur (re)vision du paysage tunisien. Reconsidérer le pays qui a besoin de leur imagination permet à la Tunisie de construire son propre imaginaire collectif.
L'apparition de nouveaux genres, styles et formes est devenue monnaie courante dans un pays, jadis destiné aux photographes «clicheurs» qui sont restés dans un cocon oiseux. Les nouveaux photographes amateurs et professionnels croient en l'évolution du pays et se sont détournés de sa dimension exotique. Conscients de leur rôle actif en tant que transmetteurs d'expressions chargées d'énergie et de générosité, ils ne ratent aucune occasion pour manifester leur riposte et leur révolte contre tout ce qui perturbe l'image du pays, l'image étant aussi notre mémoire. Milan Kundera ne disait-il pas : «La mémoire ne filme pas la mémoire photographie» ? En effet, l'instant fugace et éphémère est éternisé grâce à l'image qui mémorise et qui capte une alchimie conçue de sensibilité et de sens.
La mémoire photographie est, également, des moments historiques qui traversent le temps et l'espace et qui les font éclater sur un fond plastique que Dalila Yakoubi a nommé Femme. La photographe a fait preuve d'un savoir-faire et d'une subtilité surprenante en nommant sa nouvelle création : «Femmes de mon pays, femmes et demi». Elle a attendu la fameuse date qui célèbre la Journée internationale de la femme (8 mars) pour exposer sa création. Cette date n'est qu'un alibi pour l'artiste, puisqu'elle lui a permis de révéler l'urgence et le besoin de réclamer haut, fort et en images, la liberté de la femme. Qui sont ces femmes-Muses ?
La photo est, certes, un langage qui permet à la femme artiste, à la femme citadine ou bédouine, à la femme activiste... de présenter ce qu'elle a de plus beau : le courage, la féminité et la tendresse. Dalila Yakoubi les montre dans ses œuvres, comme des codes constituant des signes symboliques et des significations élastiques lesquelles sont abondamment utilisées dans le répertoire de l'artiste qui les interpose sur un fond social profond. Ainsi, on voit la femme de toute couleur, de toute catégorie sociale et on saisit leurs attitudes : une jeune femme qui crie, la vieille femme ridée (dada) qui nous regarde et qui nous suit de partout. C'est notre Mona Lisa : avec cette vieille femme tendre, on devient enfant, on sent avec profondeur la maternité et la sérénité, mais on voit aussi l'extrême douleur de la femme qui a peur pour elle, pour ses enfants et pour son pays. Dans les tableaux de cette artiste, l'œuvre féministe et féminine nous identifie, nous regarde et sillonne chaque espace qu'on pénètre, car la femme est la matrice du monde, elle est le cœur de la vie. L'intellection est aussi au cœur de l'image, une image poétique qui nous rappelle les correspondances baudelairiennes. En fait, indépendamment du vers de Sghaïer Ouled Ahmed qui, dans cette expo, devient «sloganisé», l'œuvre de Dalila Yakoubi est d'inspiration poétique, confirmant les affirmations de Baudelaire qui a toujours pensé que la poésie est un contenu, avant d'être une forme et qu'elle est identifiable grâce à la composition. Ce qui est donc ressenti relève de l'esthétique qui provoque l'émotion. Mais, n'est-ce pas aussi la femme qui est sujet poétique ?
A Alyssa, la «mère» et la reine de Carthage, ont succédé la femme courageuse qui a lutté contre le colon français et la femme moderne qui a participé à la révolution du 14 janvier. Cette femme militante avocate, écrivaine, médecin, ouvrière, artiste... Ces métiers anoblissent la mission de la femme et la rendent «m'ra wa nosf» (femme et demi). Cette «m'ra» nous tend la main et nous permet de voyager, à travers l'espace et le temps, dans une Tunisie profonde qui a vécu une mouvance et une effervescence prodigieuses, cette Tunisie qui est une gravure dans l'image mentale, affective et intellectuelle. Pour l'artiste, chaque femme lutte et milite à sa façon, nul besoin de faire une enquête, car un ouvrage pareil est loin d'être une documentation, il est plutôt une quête de la revalorisation de la femme à l'image de son pays et une re-visite de son histoire ancienne et quotidienne.
À côté des femmes connues comme Sayda Manoubia, la sainte tunisienne, Radhia Nasraoui (l'avocate), Maya Jribi (la militante), Bessma Khalfaoui (la veuve de Chokri Belaïd), il y a les femmes de l'ombre, ces femmes simples et inconnues mais qui sont désignées dans l'expo comme femmes tunisiennes éternelles, femmes «moitié — et plus — de la société»...
L'anachronique devient un sujet transfiguré d'actualité, puisqu'il révolutionne le présent et réclame des droits. Cette lecture, jalonnée par un langage historique à travers les figures mythiques en passant par celles qui sont actuellement présentes dans le paysage sociopolitique, est une lecture profonde de ces figures qui ont symbolisé de fortes valeurs: la résistance, l'action, l'émancipation. Ainsi, lutter contre l'exploitation de la femme et son écrasement en insistant sur l'action continue est un message intense: à partir de chaque espace, de chaque fonction, la femme essaie de sculpter sa conception de la vie, de la famille et de la société : la femme bédouine à travers la racine qu'elle implante pour la rendre fertile contre la stérilité des cœurs durs, ce qui montre sa générosité; la femme cultivée qui entretient, à sa façon, une vision du monde universelle et libre, et ce, en partant de son propre pays; la femme écrivaine qui, grâce à son stylo-stylet, tente de plumer la liberté du verbe en donnant libre cours à ses émotions; la femme artiste, avec son corps, sa gestuelle et le rythme de ses palpitations qui fait vibrer un public sensible à la sensualité féminine. Ainsi, se trouvant sur une page blanche, sur une toile blanche, sur une terre aride, dans un ciel sans étoiles ni rêves, la femme fertilise et crée des images qui ne sont qu'un certain aspect de l'éternité, une parcelle d'une vérité essentielle. Ce qui sort des mains et du regard de la militante entre, comme par enchantement, dans l'objectif du photographe qui a réussi à dévoiler une existence en puissance et en acte de la femme tunisienne. Cet apport nous réjouit et nous réconforte et comme le disait Nietzsche : «Le bonheur est une femme».


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