La Palestine rejette le plan sioniste visant l'occupation totale de Ghaza    Front de salut : les forces ayant soutenu le 25-Juillet ont affaibli leur poids et leur cohésion    Chaima Issa interrogée puis laissée en liberté par l'unité antiterroriste    Noureddine Taboubi reçoit Zied Dabbar après l'attaque contre l'UGTT    Investissements en forte hausse en Tunisie grâce au projet touristique de Jendouba    Citoyenneté mondiale selon le « WCR 2025 » : La Tunisie parmi les pays intermédiaires    Tunisie : hausse du chiffre d'affaires dans les télécoms portée par le fixe et l'Internet    GPT-5 d'OpenAI lancé : la nouvelle révolution de l'intelligence artificielle est là    Décès du comédien égyptien Sayed Sadek    Pour demander la fin de la guerre : Des proches de sionistes détenus dans le territoire lancent une flottille au large de Gaza    Ahmed Jaouadi : Un accueil présidentiel qui propulse vers l'excellence    Nouveau virus en Chine : des milliers de cas de Chikungunya signalés    France : le plus grand incendie de forêt depuis près de 80 ans reste hors de contrôle    Ben Arous – El Mourouj : Démarrage des travaux de réhabilitation de la cité Al Amal    L'inscription en ligne est ouverte pour les élèves, collégiens et lycéens tunisiens au titre de l'année scolaire 2025-2026    Lente reprise, inflation tenace : les prévisions du Fonds monétaire arabe pour la Tunisie en 2025 et 2026    Brahim Nefzaoui : pas de crise de viandes de volailles cette année    Météo en Tunisie : températures entre 30 et 34 au niveau des côtes et des hauteurs    Hatem Ben Youssef : une parure de mariage coûte au moins 4500 dinars    Immobilier en 2025 : des prix qui montent, des acheteurs qui fuient    Pénurie, hausses des prix et retards de paiement : les pharmacies tunisiennes en difficulté    Tunisie : libération du directeur régional de la Sûreté nationale de Nabeul    Tunisie : un juge révoqué placé en détention pour corruption présumée    Chkoundali : malgré une baisse de l'inflation, les prix de plusieurs produits de première nécessité ont augmenté    Tremblement de terre de magnitude 6,2 au large de Taïwan    CSS : Ali Maâloul et 7 nouvelles recrues débarquent !    Entrée en vigueur des surtaxes de Trump : le monde cherche un compromis    Passeports diplomatiques : l'Algérie impose des visas aux Français    Tunisie Telecom rend hommage au champion du monde Ahmed Jaouadi    Le ministre de la Jeunesse et des Sports examine avec Ahmed Jaouadi les préparatifs pour les prochaines échéances    « Arboune » d'Imed Jemâa à la 59e édition du Festival International de Hammamet    JCC 2025-courts-métrages : l'appel aux candidatures est lancé !    Ahmed Jaouadi décoré du premier grade de l'Ordre national du mérite dans le domaine du sport    Météo en Tunisie : temps clair, températures en légère hausse    Tensions franco-algériennes : Macron annule l'accord sur les visas diplomatiques    Faux Infos et Manipulations : Le Ministère de l'Intérieur Riposte Fortement !    Sous les Voûtes Sacrées de Faouzi Mahfoudh    30ème anniversaire du Prix national Zoubeida Bchir : le CREDIF honore les femmes créatrices    Ahmed Jaouadi décoré de l'Ordre du Mérite sportif après son doublé mondial    Macron dégaine contre Alger : visas, diplomatie, expulsions    La Galerie Alain Nadaud abrite l'exposition "Tunisie Vietnam"    Alerte en Tunisie : Gafsa en tête des coupures d'eau    Consulat tunisien à Benghazi : ouverture officielle !    Vague d'indignation après le retour ignoré d'Ahmed Jaouadi    La mosquée Zitouna inscrite au registre Alecso du patrimoine architectural arabe    Orchestre du Bal de l'Opéra de Vienne au Festival d'El Jem 2025 : hommage magique pour les 200 ans de Strauss    Le Théâtre National Tunisien ouvre un appel à candidatures pour la 12e promotion de l'Ecole de l'Acteur    Le Quai d'Orsay parle enfin de «terrorisme israélien»    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Lettre d'outre-tombe
Chokri Belaïd
Publié dans La Presse de Tunisie le 06 - 02 - 2015


Par Ali OUERTANI
Ce matin, sans attendre que le réveil sonne, quelque chose me poussait hors du lit. Le soleil a à peine pointé son nez sur la terre rafraîchie par un mois de février mi-figue, mi-raisin... L'air frais me donna l'espérance d'une journée ensoleillée et fleurie, si ce n'était l'intrigue que me flanquait la vue d'une lettre à la couleur fumée comme si elle était sauvée du feu. Une lettre accrochée à ma porte, sans doute dans la nuit... Je l'ouvris... Elle était signée Chokri Belaïd, un ami que je n'ai jamais connu mais un être qui a habité mon être et qui ne m'a plus quitté...
«Ô Peuple aimé, pour lequel mon sang a coulé, je t'aimais tant, tu sais! Je t'ai quitté à regret... Je savais que tu avais encore besoin de moi. Pardon de t'avoir fait faux bond, mais si rien ne m'obligeait à quitter, je n'ai pu résister au feu... ni l'éviter... Ça venait de derrière ! Tu sais ? mon cher peuple, le traître ne vient jamais en face. Je voyais mon sang couler, et, en une fraction de seconde, je me disais : «Qu'arrivera-t-il à mes filles si petites et si fragiles, qui ne m'avaient pas assez vu? A ma famille qui me languissait? A toi, peuple que je portais dans mes entrailles et dont je n'avais pas assez vu le bonheur tranquille?». Tu avais toujours suscité le plus grand intérêt de ma vie et je ne vivais que pour te voir libéré du joug de la corruption et de la dictature. Ma vie n'avait de sens que dans la lutte. Et j'ai lutté sans relâche pour que tu vives, la tête haute et le dos bien droit. Je n'ai jamais courbé l'échine devant le pouvoir, fût-il coriace et cruel...
Puis la révolution est arrivée comme l'éruption d'un volcan, parce que tu n'en pouvais plus... Tes bras se sont levés et comme un seul homme, tu as crié «dégage» ! Et ils ont dégagé, qui par bateau, qui par avion, ne laissant derrière eux que la joie d'un peuple vainqueur face au despotisme et les manifestations de respect du monde ! Quelle était grande ma joie ce 14 janvier et quel peuple tu étais ! J'en ai pleuré de bonheur ! Ma joie n'avait d'égal que mon sentiment de fierté de t'appartenir...
Et puis, ce qui devait arriver arriva. Du sang a coulé et l'on ne savait d'où venaient les balles. Des snipers, disait-on ! Pour le compte de qui? Rien ne filtrait. Je me disais : «La liberté a un prix et les martyrs de la nation seront les étoiles qui veilleront sur la nation !»... La peur occupa alors le cœur de mes compatriotes et le pouvoir bascula. Une autre dictature s'installa, et le paysage coloré et divers d'une Tunisie tolérante et civilisée prit les couleurs des prêches étranges venus d'ailleurs et d'un wahhabisme dont on n'avait que faire, tant la religion, pour moi, a toujours été synonyme d'entente et d'amour. Je le criais si fort qu'on m'a collé tous les qualificatifs indignes et si injustes. Je l'ai payé de mon sang ! ...
Ce jour-là, ce terrible 6 février, allongé sur le sol froid, mon sang était encore chaud, j'avais un sourire aux lèvres... Je pensais à Ghislaine Marchal qui, étendue par terre, avec des balles dans le corps, et qui avait eu la lucidité, dit-on, d'écrire avec son sang : «Omar m'a tuer» en pensant à son jardinier Omar Raddad ! Je l'admirais au fond de moi, car je n'en avais pas la force. Oh je savais «qui m'a tuer» mais ils m'avaient tellement criblé de balles que je ne pouvais que partir sans crier gare... Sans doute ne voulaient-ils pas que je souffre...
Aujourd'hui, de là-haut je vous vois. Je n'ai cessé de vous voir. Pardonnez ma peine et mes larmes, mais je ne vous reconnais plus. Cette gabegie politique, sociale, sécuritaire, économique, que sais-je... me fait mal. Est-ce pour cela que j'ai offert ma vie? Sans doute sais-tu, ô peuple aimé, que j'ai toujours défendu le pauvre et le démuni, la veuve et l'orphelin, le vieux et l'impotent... Où en sont-ils aujourd'hui sinon plus démunis encore et plus impuissants. Le pays est déchiré, et ses hommes se battent pour une place au soleil, tandis que la neige, le froid et la misère sèchent tes veines et brûlent tes entrailles qui ne mangent plus à leur faim. Tes gouvernants se crêpent le chignon parce qu'il est bon d'être vu et admiré! Qu'ils sachent tous que si le bateau coule, ils couleront avec...
Ô peuple aimé, ne m'en veux pas, je ne t'ai pas trahi... Je suis parti parce qu'on m'y a obligé... J'avais encore beaucoup à faire mais je n'ai pas perdu confiance... Tes jeunes sauront relever le défi. Je leur dis: un peuple qui a défié l'histoire depuis si longtemps ne peut baisser les bras...
Je te salue bien bas, et veillerai sur toi, peuple de mon cœur. Mais, avant de retourner là où je dois être, juste une dernière demande : ne m'oublie pas, car ainsi tu me tuerais une deuxième fois...


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.