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Baccalauréat 2015 et réminiscences... japonaises
Publié dans Leaders le 24 - 06 - 2015

«Je n'hésite jamais à le déclarer, le diplôme est l'ennemi mortel de la culture. Plus les diplômes ont pris d'importance dans la vie… plus le rendement de l'enseignement a été faible. Plus le contrôle s'est exercé, s'est multiplié, plus les résultats ont été mauvais». (Paul Valéry)
L'ambiance morose qui règne aujourd'hui dans le pays n'avait pas besoin de ces piètres résultats du baccalauréat : 27,22% de réussite à la session principale 2015 est en effet une sorte de Waterloo pour notre système éducatif**… ce qu'admet apparemment le ministre de l'Education Nationale en personne quand il affirme - loin de toute langue de bois - que ce chiffre reflète le niveau réel de l'institution (Le Maghreb, 22 juin 2015). Un bien bas niveau hélas- auquel il faut ajouter les 41,24% de candidats recalés- qui ne correspond guère au gros budget consenti par la nation en équipements et… surtout en salaires… comme l'a montré une pénible et récente actualité.
Le pays qui a fait la Révolution ne peut pourtant se satisfaire de ce maigre résultat à l'heure de l'économie de la connaissance car il y a un triple enjeu démocratique, culturel et économique: les citoyens doivent pouvoir s'approprier les enjeux de la science, des technologies contemporaines (nanotechnologie, technologies de l'information et de la communication….) afin de prendre part, de façon informée aux débats et aux choix démocratiques: comment gérer les ressources naturelles, comment combattre la pollution, comment améliorer les transports, réduire les accidents routiers et ferroviaires, comment économiser l'énergie, comment améliorer la vie des Tunisiens dans les zones déshéritées (eau potable, santé..) ….Ce qui exige un niveau de formation à même de placer les Tunisiens dans leur activité économique et les armer face à la féroce compétition mondiale. Pour toutes ces raisons, on ne peut se contenter de ce 27,22% de réussite au baccalauréat.
Tirer les leçons de l'échec
Mais les échecs et défaites peuvent être utiles si l'on s'arrête pour faire le bilan, réfléchir à ce qui doit changer, élaguer, couper les branches mortes et prendre une nouvelle direction…
En dépit de ce maigre rendement du baccalauréat, il n'en demeure pas moins que tout Tunisien aimant son pays ne peut qu'être heureux de constater que cette « épreuve » du bac ait été conduite à son terme et à bon port en dépit du terrorisme, des incivilités et des désordres constatés ici et là.
De toute façon, on ne peut qu'être attristé par ce faible rendement de notre enseignement secondaire, peiné devant la déception de ces milliers de jeunes et de leurs familles. Ces dernières ont souvent déboursé de grosses sommes pour «l'étude» et «les cours particuliers». Ce «gavage» auquel est soumise notre jeunesse voit ainsi son inefficacité prouvée. Le Prix Nobel de littérature Paul Valéry affirmait: «Le but de l'enseignement n'étant plus la formation de l'esprit, mais l'acquisition du diplôme, c'est le minimum exigible qui devient l'objet des études. Il ne s'agit plus d'apprendre le latin, ou le grec, ou la géométrie. Il s'agit d'emprunter, et non plus d'acquérir, d'emprunter ce qu'il faut pour passer le baccalauréat».
En fait, depuis l'institution en 2001-2002 des 25% de la moyenne générale, le ver est entré dans le fruit. Le régime du président déchu a ainsi vicié le système éducatif, en donnant une place centrale à l'argent ainsi qu'en dégradant le statut d'enseignant jadis chanté par Ahmed Chawki. Avec de bien néfastes conséquences dont on peut encore relever les stigmates cette année puisque 59% des candidats n'ont pu bénéficier de leur moyenne générale annuelle, l'écart avec celle de l'examen ne devant pas être supérieur à trois points.
Nombre de nos concitoyens oublient qu'un diplôme est une «présomption» et non «une preuve» de compétence «car c'est au pied du mur qu'on voit le maçon» affirme la sagesse populaire!
Il est vrai aussi que de bien mauvaises habitudes ont été prises par un certain nombre de candidats: l'absentéisme est courant, on ne travaille que telle ou telle partie du cours car «la rumeur» dit que le bac portera là-dessus, on se contente du bachotage des dernières semaines et certains assimilent l'examen à une loterie plutôt qu'à une épreuve d'appréciation de leur bagage intellectuel. N'a-t-on pas encore relevé cette année 217 cas de fraudes? Bien moins cependant que les 525 cas constatés l'an dernier.
Le résultat est un manque de connaissances et de culture. Paul Valéry - encore - disait en 1935: «C'est en considération du diplôme, par exemple, que l'on a vu se substituer à la lecture des auteurs l'usage des résumés, des manuels, des comprimés de science extravagants, les recueils de questions et de réponses toutes faites, extraits et autres abominations. Il en résulte que plus rien dans cette culture altérée ne peut aider ni convenir à la vie d'un esprit qui se développe ». Plus, en 2015, les emprunts aveugles à Internet que ne pouvait connaître notre auteur.
En Tunisie, la politique populiste de Ben Ali a conduit à l'engorgement des facultés et à un taux effroyable d'abandons. Perte sèche de «matière grise» - Bourguiba dixit - pour le pays. Cette piètre politique a surtout considérablement rabaissé la valeur du travail, de l'effort et de l'esprit.
Une rencontre au Japon
Un universitaire tunisien est allé au Japon, en 1985, pour participer à un congrès. Sous l'hôtel où se tenaient les réunions scientifiques, il y avait un immense espace où étaient exposées des montres. Notre professeur s'y est rendu, un jour, après le déjeuner. Il déambula un moment dans cet énorme magasin désert puis se dirigea vers la sortie. L'unique employé de cet espace l'approcha alors et lui demanda poliment dans un anglais passable:
- «D'où venez-vous Monsieur»?
Notre professeur sourit et lui expliqua qu'il venait de Tunisie, «un tout petit pays, bien loin de l'archipel nippon, à l'extrême nord du continent africain».
«Je vois», répondit l'employé qui se mit à réciter quasiment l'histoire de notre pays: Didon, Carthage, Kairouan, le protectorat. Assez étonné, l'universitaire tunisien demanda: «Où avez-vous appris tout ça ?». «Mais au lycée, Monsieur» répondit le Japonais, assez étonné par la question.
A peine notre Tunisien avait-il franchi la porte du magasin que l'employé le rattrapa pour une dernière question: «Monsieur, pouvez-vous me dire qu'elle est la proportion d'Arabes et de Berbères dans votre pays?»
Rentré à Tunis, notre professeur demanda à ses étudiants de dernière année de maîtrise, d'écrire sur une feuille de papier, le nom de trois villes nippones. Seul un petit quart des étudiants parvint à aligner trois noms. Le professeur raconta alors à ses étudiants sa rencontre avec le marchand de montres de Tokyo, ajoutant que ce pays ne compte plus d'analphabètes depuis la fin du XIXème siècle et que son enseignement était basé sur une féroce compétition… qui ne va pas sans dégâts!
Socrate, Platon, Ali Ibn Abî Talèb et plus près de nous Kheireddine (1875) ont essayé de fonder le système éducatif idéal… tablant sur l'esprit d'ouverture, la curiosité, la découverte, l'effort, l'esprit d'initiative et de responsabilité. Initiative et responsabilité conditionnent le succès… mais on n'est pas obligé de partager l'opinion du grand physicien et philosophe autrichien Erwin Schrödinger, Prix Nobel 1933, qui affirmait, évoquant ses années de lycée: «Je n'ai eu que des mauvais professeurs. Quelle bonne école!»
Quant à nos bacheliers à nous, il leur reste à franchir l'exténuante épreuve de « l'Orientation » et de son fameux «score»!
Puisse l'évaluation en cours de notre système éducatif éviter à nos jeunes d'avoir à exprimer à l'avenir les dix inexorables choix ! Car quel esprit sain peut nourrir dix rêves à la fois?
Mohamed Larbi Bouguerra
** Avec un taux de réussite de 86,8% en 2013, la France n'est pas la mieux placée des pays de l'OCDE.


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