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«Il y a dysfonctionnement entre la bureaucratie et l'élan créateur»
Publié dans Le Temps le 25 - 12 - 2016

La culture est la seule vraie arme contre la montée du terrorisme et de l'extrémisme. Cette phrase est considérée comme étant un simple slogan pour certains alors que d'autres y croient vraiment. Pour les deux, le plus difficile est de voir le pouvoir de la culture concrétisé pour que la Tunisie – qui ne cesse de connaître des frappes sévères que cela soit sur ses terres ou ailleurs comme on l'a vécu à Nice ou à Berlin plus récemment – puisse réellement faire face à l'expansion de ce dangereux fléau. Cette question a été notre principale motivation de rencontrer et d'interviewer le ministre des Affaires culturelles, Mohamed Zinelabidine, qui est revenu, aussi, sur ses projets et ses perspectives d'avenir.
-Le Temps : Suite aux déclarations du président de la République, le débat sur le retour des terroristes des zones de tension est de plus en plus s'intensifie. En tant que ministre des Affaires culturelles qu'en pensez-vous ?
Mohamed Zinealabidine :Le président de la République s'est exprimé clairement, à Alger, sur la question du retour des terroristes. Je ne crois pas que cela puisse être l'objet d'un quiproquo. La Tunisie ne sera pas la terre de ces terroristes parce que c'est un pays qui est connu pour être modéré, consensuel et capable de développer une intelligence réactive aux lumières en général. Je ne crois pas du tout que la Tunisie soit l'espace des obscurantistes bercés par le passéisme réducteur et trop circonscris pour être porteur de visions pour le futur ou pour le bien du pays.
-Quel rôle doit avoir votre ministère pour combattre ce fléau ?
Je pense que l'on a un peu manqué notre travail au sein du ministère des Affaires culturelles après la révolution pour dire à quel point il aurait fallu avoir un travail en amont pour exprimer la culture et pour laisser les personnes s'exprimer à travers la culture. Je crois que l'on a raté les premières années, pour des raisons objectives et d'autres subjectives, ce qui pouvait vraiment donner le sens à une réponse culturelle de la révolution. Nous avons manqué cette révolution culturelle parce que, d'abord, nous avons considéré que la culture – les arts, la littérature, l'imagination, la création et la créativité – n'était pas une priorité. Ensuite, nous nous sommes empêtrés dans une vision contradictoire du rôle de la culture et de l'art en général dans le pays ; nous n'avons pas été très consensuels là-dessus ce qui a induit à une scission au niveau de cette approche qui aurait dû nous rassembler autour du rôle fédérateur de la culture pour le citoyen, la République et la démocratie.
Nous avons aussi été mauvais, il faut le dire, dans la gestion d'un ministère qui s'est empêtré davantage, ce qui nous a empêchés d'avoir les réponses nécessaires à un dysfonctionnement administratif, à une bureaucratie tuante, à un clientélisme notoire, à une mauvaise gestion du patrimoine, à une mauvaise stratégie de la ligne politique qui a été plus dans l'événementiel au lieu d'être dans le structurel durable. Nous nous sommes contentés de gérer le quotidien sans envie de voir plus loin.
Nous sommes venus il y a maintenant trois mois pour, d'abord, faire le constat, celui que je viens hélas de vous exposer, et pour dire que nous avons beaucoup de choses à rattraper avant d'installer et d'instaurer de nouvelles règles qui devraient suivre, dans cette idée générale, tout ce qui pourrait promouvoir la culture à un sens réel de possibilité et de faisabilité. Nous sommes donc en train de mener un travail pour retrouver un élan juridique, nous travaillons sur de nombreux textes juridiques – parce que nous ne pouvons pas travailler sans un cadre juridique bien déterminé. Nous travaillons, aussi, sur le dysfonctionnement administratif en revoyant ce qui peut donner le ton à une meilleure ouverture de ce ministère aux compétences réelles. C'est un dysfonctionnement généralisé qui concerne l'administration qui a une manière très bureaucratique et très administrative pour répondre aux créatifs et cela n'est pas acceptable.
Tout cela nécessite, évidemment, une prise en charge réelle. Il existe, aussi, un problème d'incitation aux projets prioritaires ; l'absence des régions, l'absence de l'aide aux associations qui se fait au gré des envies etc. Donc, devant tout cela, nous avons fait notre proposition avec le projet Tunisie cité des arts et Tunisie cité des civilisations. Nous comptons, aussi, inciter les jeunes entrepreneurs à développer leur propre projet dans des espaces qui leur sont dédiés. Nous sommes en train d'étudier des centaines de projets que nous comptons promouvoir dans les quartiers et dans les régions. On a, par ailleurs, tout un programme pour la valorisation du patrimoine.
Pour résumer, je dirai que nous sommes sur un programme corollaire parce que, justement, les manquements sont là. Nous travaillons, aussi, sur la diplomatie culturelle comme devoir d'implication pour l'image internationale de la Tunisie. Par ailleurs, nous avons une excellente équipe réduite qui essaie de raisonner d'une manière très collégiale et très réactive.
-Le dysfonctionnement de l'administration est une question qui a été aussi posée par le ministre de la Bonne gouvernance et de la fonction publique, Abid Briki, qui a parlé d'une administration tunisienne zéro papier d'ici 2020. Qu'en pensez-vous ?
C'est très important pour nous d'alléger la lourdeur de l'administration par ces procédés-là qui concernent, entre autres, l'administration électronique et un réseautage important pour pouvoir travailler sans trop de complication, et, surtout, permettre à tout le monde de pouvoir initier des projets et communiquer autour de ce que l'on peut faire pour ce ministère et par ce ministère.
Parmi ces blocages, peut-on évoquer, par exemple, la fermeture des maisons de la Culture pendant les week-ends ?
Cela concerne essentiellement le statut des bibliothèques et celui des animateurs culturels. On est en train de travailler dessus, on connait très bien la situation et nous sommes en train de convaincre les parties prenantes pour solutionner ce problème petit à petit et débloquer la question de la fermeture de ces espaces durant le week-end. Nous tentons de faire revenir les compétences en termes d'encadrement à leur niveau d'engagement pendant les week-ends. Cela suppose, bien évidemment, des concessions de part et d'autre ce que va demander tout un travail de négociations. N'empêche que nous continuons de travailler pendant le week-end puisque, par exemple, ce dimanche nous sommes à Tataouine dans le cadre des Cités des arts.
-Pour les Cités des arts justement, nous avons suivi vos multiples déplacements au niveau des régions mais nous avons un peu de mal à comprendre le contenu de ce projet auquel vous tenez tant.
Nous avons, déjà, un partenariat avec les composantes de la société civile, les intellectuels, les artistes et avec les porteurs de projets indépendants ; nos rapports et nos relations sont déjà instaurés. Prenons le cas de la ville de Jendouba pour exemple : pendant toute une année, cette ville est décrétée citée des arts pour que ses habitants puissent mettre à contribution et à profit leurs idées pour leur ville. Nous nous finançons mais nous ne sommes plus dans l'Etat de providence, l'Etat qui ordonne: on accompagne, on facilite et on subventionne ces projets pour qu'ils puissent se concrétiser en trouvant l'espace adéquat de leur réalisation régionale. Nous avons maintenant une idée essentielle : la culture n'est pas la capitale, la culture c'est chaque citoyen et chaque espace. D'ailleurs, nous avons un énorme projet pour intégrer tous les milieux – que cela soit une entreprise, une prison, une école, un hôpital etc – pour que l'art soit présent partout et c'est cela même le projet des Cités des arts. Maintenant, on est en train d'amorcer justement ce mouvement en tentant d'édifier – parce que nous venons de commencer et que nous n'avons pas encore atteint les objectifs – une constante et une périodicité de ce travail qui sera établi, petit à petit, dans les régions. Cela se fait déjà mais pas suffisamment comme l'on voudrait, ce qui fait que, maintenant, nous allons intégrer les régions dans le cadre de ce qui peut être fait et établi. Je pense que le ministère des Affaires culturelles a ses moyens, son personnel et ses idées et on en train de réaliser ce projet qui peut paraître comme une idée un peu floue, mais on doit y arriver et cela va bien-sûr permettre une faisabilité et une réalisation sur le champ de la réalité pour que les citoyens puissent s'approprier leurs espaces publics pour pouvoir s'exprimer. Il s'agit d'un très grand projet et si on le réalise, la Tunisie changera et créera sa révolution culturelle où chacun citoyen se sentira concerné par sa ville. On est désormais leur partenaire pour réaliser leurs idées et leurs projets et nous sommes là pour les accompagner dans ces réalisations. C'est un rapport de confiance qui va s'établir dans les espaces publics et, plus tard, dans les espaces patrimoniaux, architecturaux et archéologiques. Cela permettra une action culturelle très généralisée et impliquant les uns et les autres, alors que la culture était accaparée par certains clients et certains clans, à pouvoir trouver dans la culture un lieu de respiration.
-Depuis la révolution, le ministère des Affaires culturelles soutient de plus en plus les espaces culturels privés. Cela continuera sous votre mandat ?
Le ministère est injustement présent pour les espaces culturels privés parce qu'il en finance certains alors que d'autres sont même inexistants sur nos cartes. Notre action c'est de généraliser, dans cet esprit de démocratisation de la culture et de la gouvernance locale, la création de ce genre d'espace. Tout cela nous fait réagir pour pouvoir être à l'écoute de cette ambition culturelle partagée.
-Cette aide aux espaces privés ne fait pas de tort aux espaces publics qui souffrent de plusieurs maux ?
Nous avons tout un programme pour le suivi des espaces culturels publics ; nous nous sommes donné pour ambition d'agir pour 100 espaces d'un ensemble de 220 en tout. Nous allons essayer d'opérer une politique de mise à niveau de l'infrastructure et de l'équipement. L'ambition est énorme mais l'essentiel c'est de booster les efforts. Il existe déjà un grand travail en termes de logistique, d'infrastructure et tout ce qui concerne, surtout, le côté artistique. Ce travail est entrepris pour et au profit de ces espaces culturels dans tout le pays. Nous essayons de répondre à cela et de réagir par rapport aux bibliothèques nationales, municipales et régionales qui posent, aussi, un vrai problème. Nous avons, et cela s'est fait pour la première fois, quantifié le nombre d'interventions et de projets que l'on souhaite avoir. Cela sans compter la politique publique qui est connue pour intervenir de temps en temps. Nous sommes réellement dans le cadre de plans nationaux pour la culture, nous nous sommes donné pour objectif une quantification et des statistiques chiffrées qui seront respectées dans la mesure de notre détermination et de notre engagement.
-Le budget alloué à votre ministère a connu une petite hausse mais il demeure, malgré tout, assez faible. Est-ce que vous iriez vers le partenariat public privé (PPP) pour accomplir quelques projets ?
Nous avons réussi à hausser notre budget de trente millions de dinars. Pour répondre à votre question, j'estime que le ministère des se doit d'aller vers le PPP. Actuellement, nous travaillons sur un texte juridique qui va, davantage, promouvoir et propulser ce genre de partenariat. Nous sommes, aussi, en train d'agir pour entreprendre un certain nombre de projets ; c'est ce que nous avons d'ailleurs fait avec l'exposition ‘L'éveil d'une nation' au Bardo ou encore avec le festival de Carthage. Nous avons, aussi, signé un contrat très intéressent de PPP avec des institutions privées et nous avons promu les espaces privés à des actions de ce genre-là. Le PPP est bien évidemment un élément extrêmement important pour nous.
-L'arsenal juridique dont vous disposez actuellement est-il assez fluide pour vous aider dans la réalisation des projets que vous nous avez cités ?
Il y a d'abord des textes dédiés à la Cité de la culture qui a besoin d'un statut juridique et ce non seulement pour l'exploitation commerciale – c'est important puisqu'il y a 6 000 mètres carrés de commerce – mais, aussi, pour les pôles culturels : le pôle de l'opéra, le musée des arts modernes, la photothèque etc. Il nous faut donc des textes singuliers et distinctifs. Par la suite, on créera probablement une société d'exploitation pour tout ce qui est commerce et sponsoring. Il existe un intérêt réel pour produire ces textes dans les plus brefs délais.
Les autres textes concernent, entre autres, le statut des professions artistiques et littéraires. Il s'agit de textes qui vont promouvoir le statut de ces professions à travers ce qui pourrait être la valorisation des actions des artistes. On travaille, actuellement, sur la première lecture des propositions et nous avons déjà entamé les rectifications. Nous aurons, aussi, des textes juridiques qui concerneront les statuts des espaces patrimoniaux (les musées et les cites archéologiques). Il y a fort faire en termes d'exploitation, de préservation et de modalité. Ces textes sont là pour définir un plan d'exploitation assez important. Par ailleurs, il existe des textes pour organiser les PPP et d'autres qui concerneront les secteurs d'activité pour la croissance de la culture. Nous travaillons, aussi, sur des projets de loi pour réorganiser les statuts des établissements culturels (les conservatoires, les centres d'art vivant, les centres culturels). Nous avons un Comité d'experts en droit qui est à l'œuvre et je pense que cela va donner un résultat et que nous nous en sortirions, une fois l'arsenal juridique clarifié.


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