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Un patrimoine à préserver et non à commercialiser !
Publié dans Le Temps le 19 - 06 - 2018

En période estivale, un de nos patrimoines immatériels foisonne à presque tous les coins de rue, et pas toujours à juste raison : le Stambali.
Chez nous, tout le monde sait ce qu'est le Stambali ou croit le savoir. Beaucoup le catégorisent uniquement comme une musique thérapeutique, un défouloir, une drogue auditive qui permet de planer le temps d'une soirée. Certains appartenant à une confrérie l'ont commercialisé à mauvais escient pour se faire un joli pactole provenant de «naïfs» qui ne comprennent rien à la valeur réelle du Stambali, et faisant ressortir le côté folklorique de ce patrimoine dont les racines sont ancrées en Afrique noire. En fait, et si l'on veut vulgariser, le Stambali est un peu comme le negro spirituel et le gospel mélangés ; des liens vers des racines d'abord mélancoliques (le negro spirituel représentant la douleur d'avoir été arraché à sa terre natale et le souvenir de celle-ci) et d'espoir (le gospel). Ce que nous voulons dire par là c'est que le Stambali est un lien pour que la communauté noire tunisienne n'oublie pas ses racines, exorcisant ses douleurs mais également montrant l'espoir, une affirmation d'appartenance pour ne pas être absorbé par l'acculturation. Car, comme aime à le dire le réalisateur Jean Odoutan, «la Culture sans ma culture m'acculture».
Même s'il s'ouvre aux autres en leur offrant le juste nécessaire, le Stambali est un monde fermé sur lui-même, comme pour protéger sa communauté : un langage spécial, des gestes codifiés, des rituels que seuls les initiés peuvent comprendre. Le Stambali est une culture constituée «comme d'un système religieux syncrétique, associant un culte de possession d'origine africaine, le culte des Bori (divinités africaines), au soufisme populaire maghrébin», comme l'a indiqué Ahmed Rahal, docteur en ethnologie, dans «Le Stambali tunisien» (in Cercle d'Etudes nouvelles d'anthropologie, 2016). Il faut comprendre qu'avant d'être chrétiens ou musulmans, les pays d'Afrique subsaharienne étaient anémistes –et l'on peut considérer qu'ils le sont encore même si une des deux religions, le Christianisme ou l'Islam, est dominante. D'ailleurs, Alioune Diop, homme politique et homme de culture sénégalais, avait dit en prenant l'exemple de son pays, qu'il y avait «5 à 10 % de Chrétiens et 90 % de Musulmans, mais il y a en tous cas 100 % d'animistes». Ce qui est valable pour de nombre autres pays avec des proportions autres, mais toujours 100 % d'animistes, comme au Bénin où la religion animiste «Vodoun» est fêtée par tous, et ce, le 10 janvier de chaque année.
Pour en revenir au Stambali, en prenant la partie culte des Bori, et toujours pour reprendre Ahmed Rahal, «le panthéon Bori comporte un ensemble d'entités surnaturelles différenciées, classées en catégories ou clans. À chacune de ces divinités correspondent une devise musicale, une couleur, et un rite sacrificiel spécifique (...). Alliés, ils ont le pouvoir de protéger l'adepte initié, d'investir son corps et de s'exprimer par sa bouche au cours des transes de possession rituelle. Cette forme de possession est souvent désirée car elle confère au possédé une fonction médiumnique et divinatoire». Ce passage est très important car, chez nous, certains se servent d'un état de transe qu'ils ont planifié, donc factice, en bons comédiens, pour impressionner les foules et faire croire qu'ils sont possédés ; faisant d'une culture et d'un culte millénaires une foire folklorique commerciale. Par contre, les vrais initiés ne se laissent pas prendre au jeu des mystificateurs et en rient.
Dans le Stambali, côté musical, les esprits ont chacun leur propre morceau. A titre d'exemple, «Doudou Brahim» (Moulay Brahim) est un hommage à l'esprit de la mer, «Maalem Soufou» est sur un personnage mythique ayant sa propre mise en scène dans le rituel et une grande importance dans l'organisation des esprits. Il y a des morceaux qui sont juste interprétés pour le plaisir de faire danser, comme «Mariammo».
Comme toute musique, le Stambali possède son «chef d'orchestre», appelé «yinna» (maître ou grand maître). Ce «yinna» donne le rythme à travers son instrument de musique, le gombri, et sa voix, puisqu'il est, également, lead vocal. La Tunisie a connu de grands noms de «yinna», comme Hamadi Bidali, Hafedh Haddad, Abdelmajid Mihboub, dont le fils, Belhassen suit la trace, ou encore Habib Jouini qui a été le sujet du documentaire, en 2012, d'Issam Saïdi, «Waya rayé», et dont l'un des fils, Mohamed, également, essaye de suivre la voie. Malheureusement, la notion de «yinna» risque de disparaître pour ne laisser que des musiciens de «seconde zone», délaissant l'art pour le commercial. Toujours est-il qu'il reste encore un «yinna» : Salah Ouergli qui, pour Alan Karass, directeur des librairies du conservatoire de la Nouvelle-Angleterre, à Boston dans le Massachusetts (Etats-Unis), est un musicien phénoménal et une formidable ressource sur le Stambali. Salah Ouergli est aussi reconnu comme un trésor culturel et enthousiaste de cet héritage tunisien. Pourtant, à l'origine Salah Ouergli était étranger au monde du Stambali. C'est sa proximité, dans son enfance, avec Dar Barnou, ancienne et dernière maison communautaire qui accueillait par le passé les anciens esclaves et migrants originaires d'Afrique noire, et qui servait de lieu pour les cérémonies du Stambali, et sa ténacité qui lui ont permis d'être reconnu, à l'âge de 17 ans, par ses aînés comme yinna du gombri, devenant, par là-même, l'ultime dépositaire des secrets du Stambali de Dar Barnou.
La musique stambali, quand elle est jouée en public, utilise principalement deux instruments : le gombri et les chkachek. Cependant, on voit de plus en plus l'apparition de la gambra (ou gambara, selon la prononciation qu'on donne au mot). Le gombri est un instrument mélodico-rythmique, composé, en gros, d'une caisse de résonance de forme cylindrique, dont une surface est couverte, généralement, d'une peau de chèvre et de trois cordes ayant des appellations spécifiques selon la sonorité qu'elles produisent. Ainsi, celle du centre, donnant un son grave, s'appelle «Cheyeb» (vieux). Puis, il y a la «Chbeb» (jeune) et l'aiguë nommée «Koulo» ou «Mradd».
Les chkachek sont un ensemble de quatre éléments identiques, soit deux pairs. Chaque élément est constitué d'une plaque en fer présentant deux cupules.
La gambra est un instrument de la même famille que le gombri. Cependant, sa caisse de résonance est de forme rectangulaire et son timbre plus aigu. Instrument très intime pour les maîtres du Stambali, il est d'habitude utilisé uniquement dans leurs demeures pour les répétitions. Toutefois, comme nous l'avons écrit plus haut, la gambra est de plus en plus utilisée en public, notamment dans des spectacles qui fusionnent la musique modernisée et le Stambali. C'est le cas de «Aroug» de Badreddine Dridi et de «Dendri» de Mohamed Khachnaoui.


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