En gestation depuis des mois, une résolution onusienne, soumettant l'Iran à de nouvelles et plus lourdes sanctions a été votée. La réaction de Téhéran ne s'est pas fait attendre. Elle est un mélange de colère et de dédain. Ce qui signifie que le bras de fer entre l'Occident et l'Iran et plus que jamais d'actualité et il est difficile de prédire les conséquences d'autant que l'ébauche de solution proposée par la Turquie et le Brésil fut tout simplement balayée d'un revers de main. D'ailleurs, ces deux pays émergents et en dépit de toutes les tentatives entreprises avant le vote pour qu'ils se rallient à l'option des sanctions présentée au Conseil de Sécurité, ont fait valoir leur différence en votant contre. Cela ne change rien bien sûr à l'issue des débats, mais démontre que sur la scène internationale, une nouvelle donne prend petit à petit forme ; Ni Brasilia, ni Ankara, n'avaient par le passé pris une telle liberté vis-à-vis des Etats-Unis. Toutefois, une remarque s'impose : le monde de ce début de siècle ne diffère en rien de son précédent. Le rapport de force demeure le même. Ce sont toujours les grandes puissances qui détiennent les rênes au sein de l'organisation onusienne via son Conseil de Sécurité. La Chine en dépit de son nouveau statut et la Russie qui n'a pas encore aplani ses contentieux avec l'OTAN se sont alignées sur les positions des Etats-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne. Cet alignement n'est pas sans nous rappeler à bien des égards celui du début des années 1990 quand l'Amérique et ses alliés ont décidé de mener la guerre contre l'Irak. Mais il est aussi et surtout, la parfaite illustration de la primauté des intérêts, notamment économiques qui déterminent les rapports entre ces puissances de l'Orient et celles de l'Occident. Les échanges économiques de l'Iran avec Pékin et Moscou sont loin d'être négligeables, mais n'ont pas pesé dans la balance pour que ces deux capitales prennent leur distance vis-à-vis de Washington et de Paris. Moscou est même allé jusqu'à geler un contrat de vente de missiles antiaériens conclu avec Téhéran ! Une décision de grande portée politique et que les dirigeants doivent bien méditer pour éviter de prêter davantage le flanc et surtout pour en tirer les leçons qui s'imposent. Car il est de toute évidence et en dépit du discours diplomatique de Moscou et de Pékin qui appellent aux négociations et à une solution pacifique, que si demain Washington et ses alliés, étaient poussés par Israël vers la confrontation avec l'Iran, ces deux capitales n'iraient pas jusqu'à opposer leur véto. Dans les meilleurs des cas elles choisiront l'abstention qui bien évidemment ne changerait rien à la donne. Pour Téhéran les nouvelles sanctions vont certainement avoir des conséquences sur le pays et vont se traduire par de nouvelles pressions sur le pouvoir et sur l'économie iranienne qui connaît déjà des problèmes énormes, sans compter que sur le plan social le taux de chômage déjà très élevé risque de s'aggraver davantage pour mettre en péril la paix sociale. Une telle perspective n'échappe sans doute pas aux dirigeants iraniens qui ont choisi jusqu'ici la ligne dure dans le dossier nucléaire. En sera-t-il de même dans l'avenir ? Habiles diplomates, les Iraniens ont toujours su par le passé trouver des issues leur permettant de manœuvrer avec succès. Et même si le président Mahmoud Ahmadinejad avait menacé de mettre fin aux pourparlers avec les "six", il n'est pas du tout exclu que Téhéran infléchisse sa position pour, dans un premier temps, renouer avec l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique) à la faveur de ses bonnes relations avec la Turquie et le Brésil qui demeurent des interlocuteurs crédibles et écoutés sur la scène internationale de par leur poids économique et leurs rapports équilibrés avec le reste du monde. En tout état de cause, Téhéran a tout intérêt à ne pas tirer davantage sur la bride au risque de se mettre sur le dos une partie de ses amis et de ceux qui ne partagent pas forcément le point de vue et les options des pays initiateurs de la résolution 1929.