Par Malek Slim - Presque dix ans de guerre et aucun des objectifs fixés par les alliés ne fut atteint. Certes, ils sont parvenus à chasser les talibans de Kaboul, mais ces derniers demeurent les maîtres de la province. Leur implantation dans le pays est telle que ce sont eux les véritables détenteurs du pouvoir en dehors de la capitale. Les différents rapports des experts dans la région affirment que les talibans et leurs alliés jihadistes sont plus forts qu'ils ne l'étaient au moment de l'invasion du pays par l'armée américaine. Ils sont, aujourd'hui, plus organisés, mieux équipés, beaucoup plus aguerris à la guérilla et ont leurs réseaux qui s'étendent jusqu'au sein même des sphères du pouvoir sans compter leurs solides arrières dans les régions montagneuses du Pakistan. Les opérations de plus en plus meurtrières qu'ils mènent contre les forces de l'OTAN attestent de la justesse de ce constat. Les Américains, les Français et les Britanniques ont beau renforcer leur présence dans l'optique d'en finir avec l'insurrection mais point d'amélioration sur le terrain des opérations. Celles-ci sont souvent menées à grands coups de tapage médiatique dans telle ou telle province, mais une fois le retrait effectué, les insurgés reviennent et reprennent le contrôle des territoires précédemment abandonnés et que les alliés croyaient avoir définitivement nettoyés. Désormais, et après tant d'échecs au sein des pays de l'OTAN on se rend à l'évidence, de l'impossible victoire dans un pays dont la population a toujours été hostile à toute ingérence étrangère dans ses propres affaires. Un sentiment que nourrissent les nombreuses bavures commises par les militaires des puissances étrangères. Ce ressentiment est tel, que le président Hamid Karzaï – qui ne doit sa survie que grâce à la protection occidentale – est depuis quelque temps à la recherche d'une voie lui permettant de se soustraire un tant soit peu à la tutelle américaine. Il multiplie depuis des mois les avances et les ouvertures en direction des talibans – du moins ceux les moins extrémistes d'entre eux – pour, éventuellement, trouver une issue politique au conflit qui ravage le pays, encouragé – il est vrai – par les Américains qui sont de plus en plus nombreux à ne plus croire à une victoire proche. Par ailleurs, et en dépit de leur engagement dans cette lutte, certains alliés convaincus de l'échec de l'option militaire, se montrent de moins en moins enthousiastes quant à la poursuite de cette guerre et penchent désormais, pour une issue politique où ils ne perdraient pas la face avec une sortie honorable d'un bourbier qui risque de s'éterniser. La guerre qu'ils ont déclenchée, ne sera pas gagnée. Ils en conviennent. Le pouvoir local est très fragile et ne pourra survivre au retrait de leurs forces armées. Ils en sont persuadés. Alors, que faire, pour à la fois, ne pas perdre la face et s'avouer vaincus et éviter le retour des talibans à Kaboul ? Equation difficile à résoudre d'autant que le principal allié pakistanais, est loin de partager la vision américaine sur l'Afghanistan. L'option d'impliquer les autres puissances de la région dans une solution qui garantirait la stabilité future du pays, est sérieusement envisagée, voire vivement souhaitée. Mais encore faut-il que les intérêts de New Delhi, en conflit sur le Cachemire avec Islamabad, ceux de Téhéran, sous pression occidentale pour son programme nucléaire ou encore ceux de la Russie dont les rapports avec les pays de l'OTAN sont empreints de suspicions, puissent un jour proche, converger pour aboutir à un consensus favorisant une telle solution. Les Occidentaux auraient dû songer à cela avant d'engager les hostilités à l'encontre d'un peuple qui, tout au long de son histoire, a été jaloux de sa liberté même s'il devait payer le prix fort.